AlloCiné : Si vous n'aviez pas été réalisateur, qu'auriez-vous fait ?
Peter Segal : Si je n'étais pas réalisateur, je pense que je serais devenu chef décorateur. Je continuerais à travailler dans le business du cinéma. Je ne sais pour quelles raisons, j'adore concevoir les atmosphères de films ; cela a eu une très grande importance dans la manière de raconter une histoire. Sinon, si je n'étais pas chef décorateur, j'aurais tenu un magasin animalier.
Votre premier souvenir de cinéma
Cela doit être 2001, l'Odyssée de l'Espace de Stanley Kubrick. Mon père travaillait à la MGM et il rapportait énormément de films à la maison. Nous l'avons regardé dans notre cave à New York. Nous avions étalé un grand drap et étions assis dans un vieux canapé. Je me rappelle avoir été vraiment effrayé. Je devais avoir 6 ans.
Votre référence en matière de réalisateur
Parce qu'il est prolifique, Steven Spielberg. Il a fait tant de choses différentes, c'est le Michael Jordan de la profession. Tout ce qu'il fait est fascinant, aussi bien les histoires dramatiques que les aventures fantastiques. Il est exceptionnel. J'attends impatiemment tout ce qu'il fait...
Votre plus grand regret professionnel
Je me sens mal de ne pas avoir retravaillé avec Chris Farley. J'ai eu la chance d'avoir pu bosser avec cet acteur qui avait un énorme potentiel. Je l'ai dirigé de nombreuses fois à la télévision, notamment pour le "Jackie Thomas Show", et au cinéma dans Tommy Boy.J'étais triste à l'annonce de sa mort. Toute sa vie, il s'est détruit par des excès en tous genres. Il est mort bien trop tôt (il est mort en 1997 à l'âge de 33 ans, des suites d'une overdose NDLR). Je pense qu'il aurait pu avoir une très longue carrière.
Votre objet-fétiche professionnel ?
Le clap. Chaque claquoir marque la fin d'une bataille. J'en suis à mon quatrième après avoir fait La Famille Foldingue. Chaque film est une expérience étonnante. C'est pour cela que je garde ces claps, qui sont comme mes plus beaux souvenirs.
Votre film de chevet
Si je zappe à la télé et que je tombe sur n'importe quel épisode de la série Le Parrain, je reste littéralement scotché à mon poste. Peu importe de savoir à quel moment je prends le film, à la 10e minute ou à la fin. Je ne suis jamais rassasié de ce film. C'est mon long métrage préféré.
Votre plus grand désir
Mon plus grand désir est de faire un film qui me fasse vraiment reconnaître par le public, qui soit ma propre signature. Actuellement, à ce point de ma carrière, il y a des choses que j'ai faites, comme Y a-t-il un flic pour sauver Hollywood ?, dont les gens se souviennent. Mais j'aimerais vraiment avoir un ensemble réel de films quand j'aurais fini qui pourrait définir qui je suis. Pour que l'on puisse dire, "oh, ça ressemble à un film de Peter Segal" comme on dit "Tiens, on dirait du Scorsese ou du Fellini". Avoir un style propre.
La rencontre déterminante dans votre carrière
Probablement David Zucker de Y a-t-il un pilote dans l'avion. Il avait vu mes premières réalisations à la télévision, et il a décidé de me donner une chance pour faire Y a-t-il un flic pour sauver Hollywood ? ; il faut vraiment être très "couillu" pour laisser conduire une telle aventure à un homme très jeune et inexpérimenté. Je lui accorde donc beaucoup de crédit. Il a été une rencontre déterminante pour mon accès à la profession.
"La Famille Foldingue", c'est ?
Dans La Famille Foldingue, Jekyll se sépare de Mister Hyde. Sherman Klump est constamment torturé par son alter-ego, Buddy Love qui revient le hanter.
Le professeur a découvert le vrai amour de sa vie, en la personne de Denise Gaines, jouée par Janet Jackson. Pour vivre heureux avec elle, il doit faire des tests très dangereux afin d'éradiquer l'ADN de son patrimoine. Mais l'opération échoue et il est à deux doigts de mourir. Toute la famille Klumps va alors s'unir pour combattre Buddy Love afin de sauver la vie de Sherman.
Qu'avez-vous apprécié dans la lecture du scénario ?
Le premier script que j'ai lu était totalement différent de ce que nous avons maintenant, mais j'ai beaucoup ri à sa lecture. Il y avait des scènes réunissant toute la famille, Sherman, Mamie, Mama, Papa, Eddie et je les trouvais totalement hilarantes. La première version racontait l'histoire des Klump à Washington. C'était une histoire très différente sur laquelle nous travaillions à l'origine. Mais, c'était trop cher d'emmener toute l'équipe à Washington. Le budget aurait du être alors de 200 millions de dollars et 200 jours de tournages (rires).
Nous avons constamment réécrit et avons donc décidé de garder les Klump à Wellman, cette ville imaginaire. Nous avons donc abandonné l'idée de travailler à grande échelle dans un autre monde.
Est-ce facile de diriger une star comme Eddie Murphy ?
J'ai trouvé que travailler avec Eddie Murphy était assez facile, parce qu'il apporte énormément d'enthousiasme sur le plateau. En fait, c'est un garçon assez réservé dans la vie, mais quand on dit "Action", il s'illumine et donne plus que ce qu'il y a dans le script. C'est très passionnant de travailler avec un tel acteur, car il n'hésite pas à s'investir et à en tirer le maximum d'énergie. C'était amusant de le voir s'épanouir tous les jours.
Quelle sorte d'actrice est Janet Jackson ?
Janet Jackson est merveilleuse. Pas seulement professionnellement, même si je suis assez fier d'être celui qui l'a réintroduit dans le monde du cinéma, mais aussi parce que cela m'a permis de faire sa connaissance en tant que personne. Elle est si douce. On oublie alors complètement que l'on travaille avec une grande star, qui est la petite soeur de Michael. Je garderais cela avec moi pour toujours. C'était génial de se faire de nouveaux amis.
Quel est votre membre préféré de cette famille Klump ?
Probablement Sherman, parce que sans Sherman, il n'y aurait pas de film. Enfin, on peut aussi dire que sans Mama et Papa, il n'y aurait pas de Klump. D'ailleurs, même d'abord avec Mamie (rires).
Mais, Sherman est la glue des Klump. C'est lui qui les rassemble. C'est vraiment la star du show, même si je pense qu'une nouvelle star se détache de la famille, c'est Mamie, car elle a changé le déroulement du film pour toujours.
Une anecdote de tournage
Chaque jour quand j'allais sur le plateau de tournage avec Eddy, je passais dans sa caravane pour lui parler du travail du jour. J'apportais le script et je discutais avec lui, pour savoir si tout était OK, s'il n'y avait aucun problème ou des suggestions à faire. On avait donc des réunions matinales dans sa loge. Il était souvent partiellement maquillé.
Un jour, il était dans sa loge et n'arborait que le visage de Mamie Klump. Il n'avait ni le costume, ni les cheveux. Il portait un sweat-shirt ; il avait donc ce corps mince avec cette tête de vieille femme chauve. Je lui ai dit : "Je ne peux pas te regarder, c'est trop bizarre, ça me fait paniquer". Il m'a répondu alors en riant : "Maintenant, tu sais ce que je vis tous les jours, un calvaire ; je ne peux même pas amener mes enfants dans la loge, ils auraient trop peur !".