Mon compte
    Disney brade ses salaires

    En instaurant la rémunération différée des équipes de tournage sur "Pearl Harbor", Disney bouleverse les règles du jeu des films à gros budget.

    Au pays de Mickey, le libéralisme est roi. Comme toute entreprise, les studios rêvent d'économies d'échelle et de réduction des coûts. A l'instar de Disney, qui a appliqué la méthode du paiement différé aux équipes de Pearl Harbor (avec Ben Affleck, Cuba Gooding Jr, Kate Beckinsale), réalisé par Michael Bay, l'ensemble des règles pour les films à gros budget pourrait être révisé.

    De quels astuces n'a-t-il pas fallu user pour faire fléchir les employés sur leurs prétentions salariales ! En roi de l'industrie du rêve et de l'émotion, Disney a su faire appel aux sentiments. Todd Garner, co-président du Buena Vista Motion Picture Group a recommandé au réalisateur Michael Bay (Bad Boys, The Rock, Armageddon) d'envoyer les équipes de tournage en pèlerinage sur le site hawaïen où sont tombés une centaine de soldats américains lors du raid aérien japonais, le 7 avril 1941. Le résultat est étonnant : tous ont accepté d'être payé en différé.

    De même, en acceptant pareillement les termes du contrat, le réalisateur a les moyens de faire pression. Un courtisan est flatté quand Bay lui propose de travailler avec lui. Il est coincé quand ce-dernier lui dit "Je diffère mon salaire sur ce film, et vous ?".

    Mais les petits employés qui renoncent à leur maigre salaire feront-ils vraiment la différence? Alors que d'autres ont été signés par Disney sous les conditions normales, parce que leur présence était cruciale.

    Qu'est-ce qu'exactement le paiement différé, future coqueluche des studios hollywoodiens? En clair, pendant toute la durée du tournage les équipes travaillent pour un salaire réduit, sachant qu'ils ne toucheront le solde seulement si le film engendre des profits. Une pratique d'ordinaire réservée aux tournages à petit budget.

    Un film comme Pearl Harbor, budgété à 135 millions de dollars, ne devient profitable qu'à partir de 140 millions de dollars. Or l'an passé seuls 10 films ont dépassé ce seuil aux Etats-Unis : Star Wars I - La Menace Fantôme, Le Sixième Sens, Toy Story 2...

    Jusqu'à présent, les tentatives similaires n'ont pas toujours été très heureuses. Pour Le Patient Anglais (1996), Juliette Binoche, Ralph Fiennes et Kristin Scott Thomas attendent toujours que la Miramax règle leur compte. Mais si le modèle Pearl Harbor devait marcher, les paiements différés permettraient aux studios de produire plus de films à 100 millions de dollars. Et surtout d'éviter les pactes de co-financement, à faible potentiel de développement.

    Les autres studios ne tarderont pas à vouloir effectuer des économies comparables à celles de Disney, chez qui même des dirigeants ont accepté la rémunération retardée.

    La machine de la concurrence est en marche. La société d'effets spéciaux de George Lucas, Industrial Light & Magic, a accepté le paiement différé. Ses concurrents sont obligés de suivre le mouvement, même s'ils ne disposent pas d'autant de moyens.

    Toutes ces actions témoignent de la volonté générale de changer la manière dont des films à gros budget sont faits.

    Mais avec cette nouvelle stratégie, beaucoup d'acteurs de l'envers de l'écran risquent de se trouver dans une position difficile : travailler et recevoir une paye amputée ou ne pas travailler du tout.

    Et quand bien même le film aurait du succès, ils ne seront payés qu'au bout de deux ans, perdant les intérêts qu'ils auraient dû toucher sinon.

    C'est Mickey qui gère sa petite entreprise...

    M.C.B.

    FBwhatsapp facebook Tweet
    Commentaires
    Back to Top