Fantasmes sexuels et Mardi gras étaient jeudi au menu du Festival de Berlin, inauguré la veille par le chancelier Gerhard Schroeder, avec Karnaval, un premier film français de Thomas Vincent, et Entre las piernas ("Entre les jambes"), le titre explicite du film espagnol de Manuel Gomez Pereira, tous les deux en compétition pour l'Ours d'or.
Karnaval, l'histoire d'un trio amoureux, emporté dans le maëlstrom du carnaval de Dunkerque, n'a rien de banal car elle réunit, le temps d'un jour et d'une nuit, un jeune Arabe, une Française et son mari vigile, un trio explosif. Après s'être disputé avec son père, Larbi, un jeune Arabe, décide de partir pour Marseille. En attendant un train, il erre la nuit sous la pluie. Le Carnaval a commencé avec ses chansons et ses libations. Larbi croise Béa qui ramène son mari, Christian, passablement éméché à la maison. Un baiser donne l'illusion que quelque chose peut arriver.Le lendemain, ils se retrouvent pendant que le mari de Béa est de garde. Le jeune arabe se mêle alors à la foule bigarrée du Carnaval qui avance comme une irrésistible marée.
Comme Larbi, le spectateur se sent étranger, exclu et effrayé par cette tension que l'on sent monter et qui peut déraper à tout instant. Le talent de Thomas Vincent, qui maîtrise de bout en bout ce premier film pourtant tourné au coeur de la mêlée, est de créér un sentiment diffus d'angoisse sans tomber dans la facilité ou la fatalité. Karnaval, avec un K pour Dunkerque, est servi par un trio d'interprètes hors pair, Sylvie Testud, Amar Ben Abdallah et Clovis Cornillac, des inconnus qui ne devraient pas le rester.
Entre les jambes (Between your legs), un film noir au scénario si complexe qu'il en devient confus, mêle sur un ton assez complaisant les fantasmes sexuels et la mort. Javier/Javier Bardem et Miranda/Victoria Abril se rencontrent à l'"Association des drogués anonymes du sexe" lors d'une séance de thérapie de groupe assez drôle. Lui est scénariste-producteur, elle, mariée à un policier (Carmelo Gomez) et mère de famille, travaille dans une radio. Ils sont tous les deux des "sexomanes", incapables de contenir leurs pulsions. Pour Javier, cela se passe par téléphone. Pour Miranda, c'est la passe rapide sous prétexte d'aller promener le chien.
Femme fatale, sida, K7 érotiques clandestines, cadavre, maris cocus... le cinéaste madrilène de 45 ans, réalisateur de "Boca a boca", brasse fantasmes, obsessions, ressorts du thriller et de la comédie noire, en invoquant les mannes de Hitchkock. Ses acteurs n'ont pas l'air absolument convaincus de la réalité de leur personnage et Gomez Pereira arrive à enlaidir Victoria Abril, ce qu'on lui pardonne difficilement.
Steven Spielberg, le réalisateur de La liste de Schindler, reçu à Berlin avec les honneurs d'un dirigeant politique -il a rencontré le chancelier Gerhard Schroeder mercredi- présentait également en séance spéciale The last days, récit de l'extermination des Juifs hongrois. Ce documentaire fait partie des 50 100 témoignages des survivants de l'Holocauste recueillis par la Fondation sur la Shoah qu'il a créée. AFP