Après Guillaume de Tonquédec l'an dernier, c'est au tour de Sandrine Bonnaire d'être la présidente du jury de l'édition 2022 du Festival de la Fiction TV, qui a démarré hier à La Rochelle et qui se poursuivra jusqu'à dimanche.
La comédienne, réalisatrice, et scénariste, vue récemment au cinéma dans Voir le jour et L'Evénement, nous a parlé de son rôle de présidente, de la manière dont elle jugera les nombreuses fictions en compétition, qui comprennent notamment Touchées, L'homme de nos vies, Vortex, La Cour, et 3615 Monique, et de son rapport à la télévision.
Sans oublier d'évoquer Les Combattantes, la nouvelle mini-série événement de TF1 qui arrivera à l'antenne ce lundi 19 septembre et dans laquelle elle incarne Eléonore Dewitt, une bourgeoise confrontée à la guerre et à ses conséquences sur son entreprise familiale en 1914.
AlloCiné : Qu’est-ce qui vous a plu dans cette proposition d'être présidente du jury de l'édition 2022 du Festival de la Fiction TV ? C’est une proposition qu’on ne peut pas refuser ?
Sandrine Bonnaire : Effectivement. On pourrait la refuser quand on voit le nombre de fictions présentées (rires). Non, c’est évidemment un plaisir de voir tous ces téléfilms et toutes ces séries. Je trouve que c’est assez honorifique d’accepter une présidence comme celle-là. C’est un grand festival, de plus en plus important. Et la télévision est aujourd’hui très importante dans nos vies.
Justement, quelle place a la télévision dans votre vie de femme et de comédienne ? Est-ce que le petit écran a nourri votre vocation ?
J’ai grandi avec la télévision, elle était allumée en permanence. Je me souviens qu'il y avait pas mal de films de cinéma qui passaient à la télévision. Même s’il y avait bien sûr des émissions faites pour la télévision. J’ai été bercée par la télé, car mes parents la regardaient beaucoup, surtout mon père. Mais moi je ne l’ai pas regardée pendant des années. Parce que ça faisait trop de bruit, je préférais mettre de la musique. Je m’émancipais aussi d’une certaine manière, je ne voulais pas faire comme mes parents.
Mais aujourd’hui je m’y intéresse à nouveau. Depuis qu’il y a toutes sortes de chaînes et que les plateformes ont débarqué dans le paysage audiovisuel. La télé ne fait pas partie de mon quotidien, mais il m’arrive de l’allumer pour regarder un documentaire, un film, ou une série. Je peux passer d’une chaîne à une autre, même s’il y a certaines chaînes que je n’aime pas beaucoup.
La sélection du festival est très riche cette année, avec des séries historiques, des fictions sociétales, des comédies décalées, des drames fantastiques, ou encore des thrillers lorgnant vers la science-fiction. Avez-vous des genres de prédilection ?
Franchement, non. Je suis ouverte à tout. Tant que ça raconte quelque chose, qu’il y a de l’émotion. Que ce soit du rire ou du chagrin, j’ai besoin de ressentir quelque chose quand je regarde une fiction.
J’adore rire au cinéma, j’adore pleurer au cinéma. Je n’ai absolument pas peur des histoires tristes, j’adore ça (rires). J’adore pleurer devant un film ou une série. Je crois que le principe de regarder un film c’est ça : ça nous procure quelque chose. Et l’intérêt est aussi d’apprendre des choses. La télévision, comme le cinéma, doit éduquer aussi.
Comment allez-vous juger les œuvres en compétition ?
Je vais les juger de par leur forme. La forme est importante selon moi. Je vais juger le fond aussi, ce que ça raconte derrière, est-ce qu’il y a de l’émotion. Et en même temps, pour l’avoir fait plein de fois pour des festivals de cinéma, je sais qu’il y a quand même souvent certaines fictions qui se démarquent et pas d’autres.
J'ai donc convenu que dans un premier temps nous allons commencer par un premier rendez-vous pour discuter et faire le tri. Décider ce qu’on ne garde pas, car il y a beaucoup de fictions en compétition cette année. Et s’il y a des fictions sur lesquelles nous sommes hésitants, l’idée est de les garder et d’en discuter. Le débat est important au sein d’un jury. Et au fur et à mesure on va bien voir ce qui se dessine.
Ces dix dernières années, la fiction télévisuelle française a connu un vrai bond en termes de qualité et d’audace. Le ressentez-vous dans les projets qu’on vous propose ? Êtes-vous beaucoup sollicitée par le petit écran ?
Oui, on m’en a proposé pas mal. J’ai beaucoup tourné pour la télévision. Je trouve qu’il y a de chouettes choses en unitaires en France aujourd’hui. On sent évidemment ce bond en qualité, il y a de vraies qualités d’écriture dans ce qu’on voit à la télé aujourd’hui et dans les scénarios qu'on reçoit.
Vous avez participé à des unitaires (Bébés volés, La loi de Marion, Ce soir-là et les jours d’après) ou à un épisode de Capitaine Marleau ces dernières années. Mais on ne vous avait pas vu dans une série depuis Signature en 2011. Qu’est-ce qui a motivé votre envie de dire oui à la mini-série Les Combattantes, qui débute le 19 septembre sur TF1 ?
Capitaine Marleau, pour moi, c’était surtout pour rencontrer Josée Dayan. Le personnage me fascinait, j’avais envie de travailler avec elle. Je l’aime beaucoup. Mais des séries je n’en ai pas fait énormément, c’est vrai.
Les Combattantes, j’y suis allée car j’ai beaucoup aimé l’écriture et le côté romanesque de cette série. Et j’aime aussi le fait que la série raconte ce qu’ont fait les femmes pendant que les hommes étaient à la guerre. C’est un angle intéressant pour parler de la Première Guerre mondiale et des femmes à cette époque-là, qui sont les grandes oubliées de l’Histoire.
Vous êtes friande de fresques en costumes en tant que spectatrice ?
Non, ce n’est pas tellement mon truc, je l’avoue (rires). Bien que, j’ai adoré The Crown, qui est plus récente mais qui est quand même une saga en costumes. Je trouve que c’est une série qui est superbement faite. Mais ce sont vraiment les sujets qui m’intéressent. Si c’est bien fait, je peux tout regarder.
Aviez-vous vu Le Bazar de la charité avant de signer pour Les Combattantes ?
Non. Et je ne l’ai toujours pas vue.
Vous aviez entendu parler du travail d’Alexandre Laurent en tant que réalisateur ? On dit que c’est quelqu’un de très passionné, vous confirmez ?
Ah ça oui, je confirme (rires). Il est très drôle. Il est passionné, il entraîne son équipe, c’est quelqu’un d’extrêmement joyeux. Il met par exemple de la musique sur le plateau pour entraîner les troupes. J’avoue que ça aide. Je n’ai pas besoin de musique pour jouer, mais quand il y en a ça inspire, ça crée une émotion. Et parfois il peut aussi mettre un morceau de rap pour plaisanter (rires). Il est très entraînant. Mais au-delà de ça c’est un très bon directeur d’acteur. Il sait ce qu’il fait au niveau de ses plans, il a sa série en tête, il est très précis.
Vous incarnez Eléonore Dewitt, une bourgeoise campée sur ses principes. Qu’est-ce qui vous a plu dans ce personnage ?
Ce qui m’a plu c’est sa solitude. C’est une femme extrêmement sèche, extrêmement dure, parce qu’elle n’est pas heureuse elle-même. Elle se rattache à ses principes, à ses codes, à sa bourgeoisie. Finalement c’est tout ce qui lui reste. Et elle aussi son orgueil qui la tient et qui la coince.
Mais c’est une femme qui va peu à peu s’ouvrir malgré tout. Elle sera obligée de le faire de toute façon. Ce qui était intéressant c’était de jouer cette méchanceté. Le lien qu’elle a avec son fils est absolument terrible. Même si, c’est l’éducation de l’époque qui veut ça aussi…
Vous tournez principalement avec Sofia Essaïdi, qui joue votre belle-fille dans la série. Comment s’est passée la collaboration entre vous deux ?
J’ai adoré tourner avec Sofia. On a été très complices sur le tournage. J’aime beaucoup l’actrice, la femme, je la trouve formidable.
Comme Le Bazar de la charité, Les Combattantes est une série d'envergure, aux moyens titanesques. C'était impressionnant de faire partie d’une telle machine ?
C’était super de voir tous ces décors, ces costumes. Mais l’équipe était tellement soudée que je n’avais pas l’impression d’être sur une grosse machine. Contrairement à ce que j’ai pu vivre sur La Peste de Luis Puenzo, il y a très longtemps. C’était une coproduction avec les Américains, c’était un énorme truc, et l’ambiance sur le plateau n’était pas très sympathique. Là je n’ai pas du tout senti ça. J’étais émerveillée de tous ces décors fabuleux, je trouvais très agréable de porter tous ces costumes.
Sofia Esaïdi a confié que le tournage en corset était parfois compliqué, vous n’avez donc pas ressenti ça ?
Moi je n’ai pas eu de souci avec les corsets. La costumière nous avait fait des corsets très souples. Je me suis senti très bien dans les costumes d’Eléonore Dewitt.
Vous avez débuté dans l’univers des séries avec Une femme en blanc en 1997. Quel souvenir gardez-vous de cette aventure ?
Un souvenir plutôt chouette. C’était un sujet très intéressant. On voit que le problème dure depuis longtemps car la série date des années 90. On suivait une femme qui se battait pour que les hôpitaux de proximité restent en activité. On voit que les choses n’ont pas beaucoup évolué depuis et que tout ça reste malheureusement d’actualité. On devrait peut-être revoir Une femme en blanc (rires).
Avez-vous des projets à venir pour le cinéma ou la télévision ?
Au cinéma, je vais bientôt tourner dans un film de Caroline Glorion. Et j’ai des projets de réalisatrice, dont un pour le petit écran. Il s’agit d’une mini-série adaptée du livre de Valérie Hervo Les Dessous des Chandelles. Je réaliserai cette série, je jouerai dedans, et je mettrai en scène ma fille aînée pour la première fois, qui me jouera jeune.