C’est son premier rôle principal dans un long métrage. Et pour une première, c’est une réussite. En plus d’avoir le privilège de jouer sous la direction de Paolo Sorrentino, Filippo Scotti incarne le réalisateur, lorsqu’il est adolescent à Naples dans les années 80. Dans La Main de Dieu, le jeune homme livre une prestation sans faille.
Allociné : Comment avez-vous obtenu ce rôle ?
Filippo Scotti : J’ai rencontré Paolo Sorrentino il y a un an lors des auditions. Et je ne savais pas à ce moment-là que je passais un casting pour un de ses films. Mais je l’ai deviné car les scènes étaient très bien écrites et touchantes.
Après quatre ou cinq essais, Paolo Sorrentino m’a dit qu’il me voulait pour être le personnage principal. Ça m’a fait un peu peur mais il m’a demandé de le suivre et lui faire confiance.
A quel moment, avez-vous su que le rôle de Fabietto est en fait celui de Paolo Sorrentino lui-même ?
J’ai compris tout de suite que c’était Paolo. Aussi parce qu’il y avait un détail dans un premier mail qu’il m’a envoyé. D’habitude quand on reçoit un mail pour une audition, on nous demande d’enlever nos boucles d’oreille, de changer de look et de se raser la barbe.
Mais dans ce cas-là, c’était indiqué de se couper la barbe mais pas les favoris. Et à ce moment-là du coup, comme j’étais un peu stressé, j’ai commencé à imaginer avec ma sœur que le rôle est celui de Paolo jeune.
Est-ce que ça a été une forme de pression ? Devoir jouer Paolo jeune ? Comment la gérer ?
J’ai ressenti de la pression, oui. Le lendemain de la dernière audition, quand il m’a dit "Je te veux dans le film", j’ai fait une lecture avec Toni Servillo, Teresa Saponangelo [qui jouent les parents de Fabietto, ndlr] et Paolo. A un moment, je suis allé sur le balcon et Paolo me rejoint. Je lui dis "Tu es vraiment sûr ? Il vaut peut-être mieux réfléchir un peu parce que je ne suis pas sûr que je vais y arriver." Et il m’a répondu "Aie confiance, aie confiance."
Ce n’est pas commun d’interpréter le réalisateur du film. Comment vous êtes-vous préparé pour ce rôle ?
La préparation a été simple et rapide. Il m’a conseillé de ne pas me fixer sur les dialogues du scénario, d’arriver bien préparé sur le tournage au niveau de la succession des scènes. Et surtout de ne pas trop me projeter sur ce que j’allais faire avec tous ces mots, mais d’attendre sur le tournage les émotions qui allaient arriver pour pouvoir les exprimer le moment venu.
Est-ce que vous avez questionné Paolo directement pour mieux comprendre le personnage ?
Non, ce n’est pas ma tâche. J’essaie de comprendre le personnage et non pas Paolo tel qu’il est aujourd’hui. Dans le scénario, c’est Fabietto le personnage principal et non Paolo. Je ne lui ai jamais demandé pourquoi il avait mis cette distance-là, mais ça m’a permis justement de me tenir à distance de la personne qui l’a inspiré.
Qu’est-ce qui vous a le plus plu dans ce projet ?
Dans le scénario, j’ai tout aimé. Parce que c’est rare de lire un scénario aussi bien écrit. Pour moi, c’était déjà merveilleux d’avoir des idées aussi claires juste en lisant le texte, d’avoir la chance de pouvoir recevoir ce texte.
Ce scénario est tellement riche qu’il n’y a pas beaucoup de questions à poser. Lorsqu’il est sur le tournage, il parle peu. Et quand il parle, il donne des indications précises qui permettent vraiment d’avancer, qui vont à l’essentiel.
Comment avez-vous réussi à incarner Fabio, à trouver sa gestuelle ?
Paolo m’a conseillé de regarder Les Sentiers de la perdition de Sam Mendes et de regarder la démarche de Jude Law dans le film.
Qu’est-ce qui a été le plus difficile ?
La scène avec Capuano [le réalisateur qui a initié Sorrentino au cinéma, ndlr] et la première scène qu’on a tournée, c’est la scène à la banque avec le père joué par Toni Servillo, mais parce que c’était le premier jour en fait. Et la scène avec la Baronesse [jouée par Betty Pedrazzi, ndlr].
La scène que vous avez préféré tourner ?
La scène de la famille. C’était très drôle. On a tourné cette scène sur quatre jours. C’était merveilleux.
Entretien réalisé à Paris le 12 octobre 2021