De quoi ça parle ?
Décidé à se venger, le hors-la-loi Nat Love enfourche son cheval avec sa bande pour régler son compte à son ennemi Rufus Buck, un cruel chef de gang échappé de prison.
The Harder They Fall, un film écrit par Jeymes Samuel et Boaz Yakin, réalisé par Jeymes Samuel avec Jonathan Majors, Idris Elba, Regina King, Zazie Beetz, Delroy Lindo… Sur Netflix
C’est avec qui ?
Pour son premier long métrage, Jeymes Samuel – plus connu sous son nom d’artiste musical The Bullitts – a vu les choses en grand. Pour raconter cette histoire 100% fictive, il a convoqué des personnages qui, eux, ont réellement existé et créé une véritable mythologie autour d’eux. (Même si cette mythologie n’a pas été imprimée dans les livres d’histoire.)
Jonathan Majors campe ainsi Nat Love, un gangster animé par une soif de vengeance après avoir assisté enfant à l’assassinat de ses parents. Le coupable ? C’est Rufus Buck, incarné par Idris Elba qui, une nouvelle fois, prend un malin plaisir à incarner les méchants.
Rufus Buck est entouré de fines gâchettes dont Cherokee Bill joué par Lakeith Stanfield, et son bras droit n’est autre que Treacherous Trudy Smith, jouée par une Regina King qui donne toute sa valeur à ce surnom "Treacherous", qui signifie "traîtresse".
Aux côtés de Jonathan Majors, on retrouve quelques visages connus du petit et grand écran dont Zazie Beetz qui joue Mary Fields, Delroy Lindo qui interprète Bass Reeves (le premier shérif noir à l’Ouest du Mississippi) ou encore Edi Gathegi dans le rôle de Bill Pickett.
Ça vaut le coup d’œil ?
Il aura fallu attendre 2021 pour voir une production ambitieuse, menée par un casting entièrement noir, entrer sur le terrain du sacro-saint western. Ce genre qui a marqué les heures de gloire d’Hollywood avec les films de John Ford et autres Howard Hawks a longtemps été aussi une forme de propagande. Celle où l’on raconte une histoire biaisée ou omettant une bonne partie de ses protagonistes.
Avec The Harder They Fall, Jeymes Samuel ne signe pas un film historique, puisque son histoire est totalement fictive. Mais il réhabilite la place des cowboys afro-américains dans l’histoire des westerns en centrant l’histoire sur eux. En les sortant de leurs éternels seconds rôles.
Son but est de créer un classique instantané avec cette histoire de vengeance entre bandits notoires. Il veut immortaliser les noms de Nat Love, Rufus Buck, Mary Fields et les faire vivre dans l’inconscient collectif comme Billy the Kid, Buffalo Bill ou Calamity Jane.
Et le résultat est plutôt bluffant. Car Jeymes Samuel signe un western qui réinvente par la même occasion le genre. Profondément pop avec ses couleurs chatoyantes, parfois drôle, mais aussi construit comme une tragédie grecque, le film donne une fausse impression de légèreté et au fil du temps, imprime la rétine sans même qu’on s’en rende compte.
Celui qui s’est déjà imposé comme un esthète de l’image, avec sa démarche parfois de plasticien dans les vidéoclips qu’il a réalisés, a composé de vrais tableaux qui passent de l’imagerie populaire de la bande-dessinée – on pense à la scène où Rufus Buck est exfiltré de son wagon-prison – à des plans rappelant parfois l’impressionnisme américain.
Il y a clairement du Tarantino dans ce film, dans cet aspect très pop assumé et ce goût de revanche. Pour autant, The Harder n’a rien de comparable à Django Unchained et c’est tant mieux. Le film creuse un autre sillon. Il montre une sorte de réalité alternative. C’est du moins ainsi qu’on le perçoit à l’aune du pan d’Histoire qui a été mis sous le tapis. Il nous montre en fait – par la magie de la fiction – une vérité cachée.
The Harder They Fall est un vrai film de cinéma, bien plus qu’un film politique. De la politique justement, il n’en fait pas. L’argument tient juste au casting et à une scène de braquage, très drôle, dans une ville blanche (littéralement) où les habitants regardent ces bandits d’un air outré et apeuré. Jeymes Samuel réinvente un genre (un peu) poussiéreux pour en faire un objet clinquant et dynamique. C’est là toute la force de ce film.