Révélé en 2019 dans la série Mental sur FranceTV Slash, Louis Peres, également à l'affiche du film Comment je suis devenu super-héros sur Netflix, tient l'un des rôles principaux de Germinal, superproduction de France Télévisions en cette rentrée qui revisite le roman de Zola en mettant l'accent sur des enjeux contemporains, tout en restituant fidèlement le coeur du propos de l'oeuvre du romancier sur la lutte ouvrière. "En France, Germinal fait forcément écho aux Gilets jaunes. Mais partout dans le monde, il y a des Etienne Lantier en puissance", déclare-t-il.
Formé au Cours Florent pendant trois ans et demi, le jeune comédien est ensuite suivi par un coach, l'un de des anciens professeurs, qui l'aide à la préparation de ses rôles. "En France il n'y a pas beaucoup de coachs, c'est une méthode très américaine. Nous on a cette vision de l'acteur où il n'est pas juste question d'un corps vide dans lequel on coule un personnage, comme le font beaucoup d'Américains, mais plutôt un dialogue entre l'acteur et le personnage" confiait-il au micro d'Allociné en janvier dernier sur le tournage de la série.
"J'ai commencé le cinéma il y a deux ans, et dès mon premier film j'ai pris un coach. J'ai gardé cette habitude pour arriver sur le plateau en étant sûr de moi et de là où je veux aller; je fais toujours confiance au réalisateur, mais j'arrive quand même avec une proposition, pour essayer d'en faire quelque chose à deux."
Localisé en partie à quelques mètres de la frontière belge dans le petit hameau de Marchipont, transformé en ville minière pour l'occasion, le tournage se déroule dans une ambiance détendue mais studieuse, sous la houlette du réalisateur David Hourrègue.
"David est très optimiste, hyper joyeux, mais on doit rentrer les séquences, et il très précis dans ce qu'il fait. S'il n'obtient pas ce qu'il désire à l'image, on ne passera pas à une autre séquence", précise Louis Peres. "Sur le film de Claude Berri (sorti en 1993, ndlr), ils ont filmé les quatre heures en 175 jours. Nous on fait six heures en 73 jours. Donc il y a forcément une nécessité d'efficacité."
Pour le jeune comédien, se retrouver plongé dans les décors d'une ville de mineurs des corons du nord de la France à la fin du XIXème siècle était un défi vertigineux. "J'ai tout de suite mesuré la chance que j'avais. Quand on lit le script, qu'on découvre les tirades gigantesques, les discours devant la foule... c'est très rare qu'on puisse avoir ça au cinéma. La première réaction c'est 'wow', et la deuxième c'est 'merde, comment je vais faire ça ?' "s'amuse-t-il.
Son personnage, Etienne Lantier, est un jeune ouvrier d'une vingtaine d'années qui a fui Lille après avoir frappé son patron. Grâce à Pluchart, un ami à lui, il va se retrouver à Montsou, une ville minière, où il va être accueilli par la famille Maheu. En travaillant à la mine avec eux, il va se rendre compte des conditions de travail des mineurs et de la misère qui sape leur quotidien.
"Tout ça va le révolter. Petit à petit, il va commencer à parler autour de lui, et se rendre compte du pouvoir de parole qu'il a sur les autres, et progressivement prendre les choses en main et s'affirmer en tant que chef. Et malheureusement, ne plus écouter personne et se brûler les ailes."
Partout dans le monde, il y a des Etienne Lantier en puissance
Lors de la préparation, le réalisateur et Louis Peres se sont penchés se sont les raisons qui faisaient d'Etienne Lantier un héros, avec ses faiblesses et ses contradictions face au poids des responsabilités qui lui sont attribués. "Dès le début on a été très connectés avec David. Il m'envoyait toutes ses idées, ses inspirations de musiques, de costumes... Je préparais mes monologues en musique !"
Dans le roman de Zola, des passages entiers décrivent l'orgueil grandissant d'Etiennecet, qui va le conduire à sa perte. "Il a 21 ans dans le livre, et comme tout jeune qui commence à avoir du pouvoir, il va jouer un peu au petit chef. Il n'y avait pas ça dans le film de Berri, c'était une approche plus figée, très différente de Lantier" poursuit l'acteur en référence au personnage joué par Renaud, âgé d'une vingtaine d'années de plus que le héros du roman dans la version de 1993.
"Dans la série, les Maheu reposent tous les espoirs en Etienne, et lui va se dire que si tout le monde lui fait confiance, c'est lui qui a raison, donc c'est à lui de prendre des décisions sans écouter personne. Et ça, c'est dangereux", analyse-t-il. "Pluchart, qui est partisan socialiste, sait faire la part des choses. Idem pour M. Hennebeau; ce sont des politiciens qui comprennent qu'il y a une zone grise, un dialogue inévitable. Pour Etienne, c'est tout blanc ou tout noir, il est incapable de faire la part des choses."
Pour le comédien, l'oeuvre représente aussi un avertissement intemporel. "Un leader, aussi charismatique soit-il, se perd forcément s'il reste seul tout en haut de sa tour. Ca peut nous servir de leçon : ne jamais remettre le pouvoir aux mains d'une seule personne, et lui vouer une confiance totale en le laissant décider de tout."
Pour aller plus loin autour de la série, écoutez David Hourrègue nous parler de la création de Germinal dans Spotlight, l'émission d'Allociné enregistrée lors du festival Séries Mania 2021 :
