ÇA PARLE DE QUOI ?
Au début du XIXè siècle, sur les terres encore sauvages de l’Oregon, Cookie Figowitz, un humble cuisinier, se lie d’amitié avec King-Lu, un immigrant d’origine chinoise. Rêvant tous deux d’une vie meilleure, ils montent un modeste commerce de beignets qui ne tarde pas à faire fureur auprès des pionniers de l’Ouest, en proie au mal du pays. Le succès de leur recette tient à un ingrédient secret : le lait qu’ils tirent clandestinement chaque nuit de la première vache introduite en Amérique, propriété exclusive d’un notable des environs.
COW BOYS
Une décennie après La Dernière piste, First Cow confirme le goût de Kelly Reichardt pour le western. Mais elle ne se rapproche ni de John Ford, ni de Sergio Leone avec son style contemplatif qui s'exprime particulièrement bien dans les grands espaces américains, qu'elle se plaît à filmer d'un opus à l'autre. Passé par les festival de Berlin puis Deauville, où il a remporté le Prix du Jury en septembre 2020, son dernier film en date ne fait pas exception.
Avec ce long métrage, la réalisatrice suit un cuisinier et un immigrant d'origine chinoise qui font fureur auprès des pionniers de l'Ouest avec leurs beignets contenant un ingrédient secret : le lait qu’ils tirent clandestinement chaque nuit de la première vache introduite en Amérique. Aux côtés des acteurs John Magaro (bientôt dans Many Saints of Newark) et Orion Lee (aperçu dans Skyfall et Justice League), l'animal a donc un rôle crucial.
Et il est incarnée par une dénommée Evie, choisie sur photo : "C’est celle qui avait les plus grands yeux", explique la cinéaste à propose de son choix dans le dossier de presse. "Quand on travaille avec des animaux, on doit tous ralentir la cadence. Et les équipes de tournage n’ont pas l’habitude de tourner lentement et sans faire de bruit. Mais avec Evie, ou les chevaux de Certaines femmes, toute l’équipe doit fonctionner au ralenti et être attentive à l’animal. Si on le braque, on risque d’accumuler de la frustration."
Quand on travaille avec des animaux, on doit tous ralentir la cadence
Une lenteur qui colle avec celle du récit, pas toujours facile d'accès en raison de son âpreté. Resserré par rapport au roman de Jonathan Raymond dont il s'inspire ("The Half-Life") et qui se déroule sur quarante ans, il se révèle néanmoins très riche pour qui saura entrer dedans.
Non contente de fasciner grâce à sa manière de filmer la nature, Kelly Reichardt se sert du début du XIXè siècle pour évoquer le présent. Et notamment celui de son pays, dont elle brocarde l'individualisme érigé en valeur centrale dans une société qui repose sur l'exploitation et les inégalités qui se creusent un peu plus chaque année.
Tourné avant la pandémie et le premier confinement, qui n'a fait que les accentuer, First Cow n'en est que plus pertinent aujourd'hui. Et le fait qu'il passe par les salles françaises alors qu'il a longtemps été question qu'il sorte sur une plateforme permettra de maximiser son impact en vous plongeant pleinement dans la nature qui lui sert de décor deux heures durant.