Un peu d'histoire
En 1992, le deuxième film de Tim Burton sur l'univers de Batman marche moins bien que le premier mais suffisamment pour que Warner lance une série d'animation sur Bruce Wayne. Pour ça, elle va faire appel à trois personnes : Bruce Timm est chargé de l'apparence des personnages, pendant qu'Alan Burnett supervise les histoires et Eric Radomski les décors et le look global de la série.
Et comment ne pas parler de la musique ? Le thème de Batman est inspiré de celle de Danny Elfman pour les longs métrages de Tim Burton, mais les sublimes compositions des épisodes seront signés par la compositrice Shirley Walker.
La série compte deux saisons de 65 et 20 épisodes, diffusés de 1992 à 1995. Entre ces deux saisons, un film verra le jour : Batman contre le fantôme masqué, sorti en salles aux Etats-Unis, mais directement en vidéo en France. Une autre série suit en 1997, The New Batman Adventures, qui prend la suite chronologique de la série d'origine, et dans laquelle on retrouve Batman, Nightwing, Batgirl et un nouveau Robin : Tim Drake.
Contrairement à une idée reçue, Tim Burton ne fut pas du tout impliqué dans la série. Si on le pense souvent, c'est parce que le look du Pingouin est inspiré par celui de Batman, le défi, mais il changera d'apparence dans The New Batman Adventures, pour se rapprocher de ce à quoi il ressemblait dans les comics avant Burton.
Un ton unique
L'idée créative de la série, on la doit à Eric Radomski. Il dessine à partir de feuilles noires sur lesquelles il va faire ressortir les couleurs, ce qui va donner au show tout son côté sombre, d'autant que la majorité de l'action des épisodes se passe de nuit. Le surnom de Batman étant le Chevalier noir, c'était une décision assez logique. L'esthétique du show est très influencée par l'Amérique des années 40 façon film noir, avec des références claires à l'expressionnisme allemand et aux arts déco. Pourtant, la série se passe à l'époque contemporaine et on retrouve tous les éléments technologiques de cette époque, du téléphone portable au "super ordinateur".
L'humour lourdingue des dessins animés de super-héros disparaît et les méchants ne sont plus des guignols mais des êtres humains qui souffrent d'un manque et les épisodes se concluent rarement par un happy end. La bible des scénaristes qui servait à décrire le ton de la série disait même qu'il fallait écrire Batman comme un personnage un peu effrayant et toujours dans les ombres.
Pour garder son côté sérieux, la série abandonne les coups de poing donnés dans la bonne humeur en donnant à ses méchants des mitrailleuses et des armes à feu. Avant la série Batman, ça n'était pas toléré. Par le passé, les séries DC comme Super Friends et Super Power Team baignaient dans une ambiance cartoon héritée de la série Batman des années 60.
La série va aussi aborder des sujets dont on ne parlait pas beaucoup dans les dessins animés de l'époque. On voit par exemple Poison Ivy débarquer dans une réunion 100% masculine pour leur faire savoir qu'il est honteux qu'il n'y ait pas de femmes. Mais la série parle aussi de la précarité, de la différence (avec Killer Croc) et en faisant ça, elle va marquer les esprits et donner une légitimité et une crédibilité au genre super-héroïque.
Tout l'univers animé DC suivra de près ou de loin les bases visuelles posées par Bruce Timm. Même l'un des récents films d'animation, Batman et Harley Quinn, reprend une esthétique très proche de la série. Le fait que ces films soient en plus très violents et grossiers sont aussi une conséquence du ton très sombre qu'avait instauré la série animée. Aujourd'hui, on prend ça pour acquis, mais c'était un pari fou pour une série qui était destinée aux enfants. Aux États-Unis, elle passait même le samedi matin !
Son influence sur les comics
La série a beaucoup fait évoluer les vilains de l'univers DC Comics, elle les a secoué, modernisé, voire en a créé de nouveaux. On lui doit notamment l'apparition d'une super-vilaine culte : Harley Quinn. Créé par Paul Dini (l'auteur / relecteur de 26 épisodes de la série), le personnage est d'abord une complice du Joker pendant quelques épisodes, jusqu'à Amour fou des New Batman Adventures, qui explore son passé et sa première rencontre avec le Joker. On y apprend qu'elle était la psychiatre du clown, avant de se retrouver manipulée par lui et totalement sous son emprise.
On s'attache d'autant plus à Harley qu'elle vit un amour absolument pas réciproque avec le Joker, qui se sert d'elle. Et la série de 92 va aussi donner un passé et une raison d'être à certains méchants. C'est le cas avec Mister Freeze. Avant la série, c'était un gars avec un pistolet à glace. Après, c'est un homme qui a tout donné pour sauver sa femme de la mort, et vivra toujours en solitaire. Pire encore, dans The New Batman Adventures, Freeze est même condamné à mourir. Et ces histoires vont influencer les comics et même y être incorporées.
Harley a son propre comics en 1999 et Mister Freeze le sien dès 1998. Parmi les autres personnages créés par la série qui finiront dans les comics, on retrouve l'agent de police Renee Montoya (récemment vu dans le long métrage Birds of Prey) ou Lockup, un ancien garde violent de l'asile d'Arkham qui devient un psychopathe. Par contre, d'autres personnages comme la chef terroriste Griffe rouge ou Baby Doll, l'enfant star d'un show télé atteinte d'une maladie qui l'empêche de grandir, n'y apparaîtront jamais.
Batman la série animée et The New Batman Adventures sont des immanquables à ne manquer sous aucun prétexte. Il est aussi recommandé leur suite, Batman : la relève.
D'où vient le Joker ? Décryptage par l'équipe d'Origin Story :