AlloCiné : Parlez-nous de cette série qui vous tient particulièrement à cœur ?
Austin Winsberg (créateur et showrunner) : L’idée de Zoey et son incroyable playlist m’est venue alors que mon père était en train de mourir d’une maladie dégénérative rare, touchant ses neurones. Petit à petit, il s’est éteint et nous n’avons plus eu de contacts possibles. J’ai alors imaginé cette série où une jeune fille, Zoey, traverse la même chose avec un père atteint de cette maladie, sauf qu’elle acquiert, soudainement, après un scanner de la tête, le don d’entendre en chansons ce qui se passe dans la tête des gens qui l’entourent. Alors que je perdais mon père, je suis devenu moi-même papa. Je tentais donc de comprendre ce qu’il se passait dans la tête de ces deux personnes qui m’étaient tellement chères. Avec cette série, je veux montrer qu’il se passe toujours quelque chose dans la tête des gens. Mais dans notre société tellement compartimentée, nous ne nous préoccupons même pas de ces personnes… Par ailleurs, nous avons de plus en plus peur d’exprimer le moindre sentiment, la moindre émotion, pour rester politiquement correct, pour ne pas passer pour une victime. Au lieu de partager ce qu’il y a dans notre tête, nous nous replions sur nous-mêmes, ce qui évidemment est dangereux. C’est donc ce que je cherchais à explorer avec cette série. Comment se remettre à l’écoute de l’autre, comment faire preuve de compassion et de compréhension. Au final, c’est une série pleine de joie de vivre. Je veux vraiment redonner des couleurs au gens dont la vie semble de plus en plus virer au gris, surtout en ces temps bizarre de confinement. Et comment mieux le faire qu’avec de la musique et des chorégraphies pleines de fraîcheur et de renouveau.
C’est donc une invitation à nous retrouver au lieu de nous isoler derrière nos écrans ?
Absolument ! D’autant que nous nous présentons, le plus souvent, une vision tellement fausse et parfois embellie de nous-mêmes sur les réseaux sociaux. Cette série est une invitation pour aller au-delà des apparences pour trouver l’authentique personne qui se cache en chacun de nous. Il nous faut tomber les masques et avoir le courage de réapprendre à nous respecter, à nous apprécier, à nous aimer pour qui nous sommes vraiment.
Quels ont été les chansons les plus dures à obtenir pour la série et quelles sont les chansons qui vous représentent le plus ?
Grace à ma directrice musicale, Jennifer Ross, qui a travaillé aussi sur la série musicale Empire, nous avons eu accès à toutes les chansons que nous désirions ! Il m’a fallu parfois écrire des lettres, comme à Paul Simon pour Sound of Silence, et qui reflète bien l’atmosphère dans laquelle j’étais pendant la mort de mon père. J’ai écrit également à Van Morrison, aux Beastie Boys, à Destiny Childs et bien d’autres pour les convaincre de l’honnêteté et de la passion de notre entreprise. Tous, au final, ont donné leur accord pour utiliser leur création. Quant aux chansons qui me représentent ce n’est pas une réponse facile… Mais ce qui me vient à la tête c’est sans doute I want to dance with somebody de Whitney Houston qui me rend fou de joie chaque fois que je l’écoute. Ou bien, Crazy de Gnarls Barkley. Surtout en ce moment, je crois que les paroles de cette chanson résonnent en moi plus que jamais. Et puis j’adore aussi Africa de Toto : cette chanson me sort toujours de la déprime chaque fois que je l’écoute.
Avez-vous une vision pour cette série au-delà de cette première saison ?
Oui, je viens d’ailleurs d’avoir plusieurs discussions avec les producteurs afin d’explorer de nouveaux horizons pour Zoey et son univers. Nous allons développer en profondeur la relation triangulaire entre Zoey, Simon et Max. Je veux également montrer le rôle de plus en plus important des femmes dans la société et au cœur de toutes les sociétés clés de notre économie, surtout dans le monde des nouvelles technologies. C’est vraiment un « girl power show » et j’en suis fier.
Est-ce que cette série vous a changé, en tant qu’homme ?
Oui, cette série a profondément changé l’homme que je suis. Perdre mon père et produire cette série m’a permis de devenir plus attentif et compréhensif vis-à-vis des autres. Je pense que l’on n’a jamais assez de compassion et en ce sens j’ai beaucoup changé. Je suis moins égoïste et je me penche plus sur les autres, sur ma famille et mes amis. J’ai, sans doute, encore des efforts à faire mais je suis sur la bonne voie…