Le documentaire Haut les filles, en salles ce mercredi, raconte l'histoire du rock hexagonal du point de vue des femmes. Au micro de François Armanet, dix chanteuses, de Brigitte Fontaine à Vanessa Paradis en passant par Charlotte Gainsbourg et Jeanne Added, racontent leur rapport à la musique et tournent les pages de six décennies d'une musique longtemps accaparée par les hommes. Rencontre avec Camélia Jordana, l'une des voix de cet ambitieux projet.
AlloCiné : Qu'est-ce qui t'a attiré dans ce projet de documentaire sur le rock au féminin ?
Camélia Jordana : Déjà, le fait que c'était une invitation de François Armanet, le rédacteur en chef de l'Obs, dont j'avais fait la couverture en Marianne. J'avais trouvé ça très élégant de leur part, au lendemain des attentats du Bataclan, de mettre une jeune femme arabe en couv' de l'Obs, en Marianne, qui représente la France. Et puis j'étais aussi très séduite à l'idée de participer à un documentaire qui mettrait les femmes à l'honneur de manière générale, avec ce casting que je trouvais très élégant. Ca me séduisait beaucoup d'être au milieu de toutes ces femmes. Après, le rock féminin, oui, d'accord, mais en vrai, c'est beaucoup plus large que ça. Voilà, ça faisait plein de bonnes raisons !
Les chanteuses qui participent à ce documentaire sont très charismatiques, et issues de plusieurs générations. Tu as du te sentir très fière d'être à leurs côtés sur ce projet...
Ca fait beaucoup de bien car on se sent faire partie d'une lignée. Quand on voit que ça part de Françoise Hardy en passant par Charlotte Gainsbourg, Lou Doillon, Elli Medeiros, Brigitte Fontaine, Jeanne Added... J'ai les poils ! Il y a quand même une espèce de lignée de meufs qui assurent ! Il y a quelque chose que je trouve très réussi dans Haut les filles, c'est qu'à chaque fois, François Armanet commence une phrase avec l'une d'entre nous, puis il y en a une qui la poursuit au milieu, et une autre qui la termine. Ca fait vachement de bien, il y a quelque chose de très joyeux, de très fort, de très puissant et de très large.
Et puis ce documentaire fait aussi du bien car j'avoue qu'en le voyant, tu te sens moins seule. L'air de rien, on ne se croise pas tant que ça, on fait toutes notre bonhomme de chemin, on mène toutes les mêmes combats avec nos partenaires toute l'année, on passe nos vies dans nos tours-bus avec nos équipes pour faire nos tournées, on fait nos entretiens avec les journalistes pour parler de notre travail. En voyant tout ça, on se dit qu'avec Vanessa Paradis et toutes les autres, si on se retrouvait toutes autour d'une table, ça pourrait durer des heures et ça se passerait vachement bien ! (rires)
On te sent très émue d'être a leurs côtés, ensemble...
C'est hyper émouvant, ça fait du bien. Et en voyant toutes ces femmes qui parlent les unes à la suite des autres, on prend conscience du fait qu'on ne les entend pas. Moi, je n'ai jamais entendu Charlotte Gainsbourg, Vanessa Paradis ou Lou Doillon me parler de leur rapport à leur métier, à leur féminité, à leur prise de pouvoir, au regard qu'ont les gens sur leurs courbes quand elles sont sur scène parce que c'est leur choix... On ne les a jamais entendu parler de ça ! Vanessa Paradis, depuis qu'elle a 14 ans, dans l'inconscient collectif, c'est une espèce de femme objet, mais en fait, c'est une personne ! Une femme qui parle, qui a des convictions, un rapport à la féminité, à son métier, à la musique, au cinéma, à son parcours, aux autres femmes aussi. Car c'est aussi ça qui est très important, le rapport qu'on a toutes les unes aux autres.
La bande-annonce de "Haut les filles" :