Alors que des projets de loi ont été déposés dans plusieurs Etats des Etats-Unis pour durcir les législations contre l'avortement et que Donald Trump veut débloquer plus de cinq milliards de dollars pour poursuivre la construction d'un mur entre les Etats-Unis et le Mexique, l'équipe de The Handmaid's Tale, rencontrée à l'occasion du lancement de la saison 3 il y a quelques semaines, est unanime : la série est de plus en plus proche de la réalité.
« Notre show est censé être une exagération, mais il devient un peu trop proche de la réalité lorsqu'on vit dans un pays où à certains endroits, on est puni plus durement si un raciste vous viole et vous met enceinte et que vous avortez, que quand vous violez quelqu'un », se désole Bradley Whitford, qui interprète le Commander Lawrence depuis la saison 2. « On vit à un moment où la culture du viol n'a jamais été aussi présente, insiste-t-il. Je pense que la misogynie en est à l'origine et ce n'est pas simplement un bug, non, c'est le système. C'est une période très étrange. Ce n'est même plus controversé de dire que le leader du monde libre est un raciste et un misogyne. J'aimerais qu'on puisse se rassurer en se disant que c'est une aberration, mais ça arrive partout dans le monde. Qu'est-ce qui crée les conditions pour que ces voyous, partout dans le monde, utilisent le régime de la peur pour gagner du pouvoir. Il va falloir arrêter ça très vite, car on est en train de revenir à l'époque de Cro-Magnon. »
Ce n'est même plus controversé de dire que le leader du monde libre est un raciste et un misogyne.
Pour Madeline Brewer, qui prête ses traits à Janine, le constat est terrible également : « Il y a des gens dans le monde qui vivent presque dans les mêmes conditions que les gens à Gilead, sans les costumes. » Et c'est de pire en pire, ainsi que le confirme le créateur de la série dystopique, Bruce Miller : « Nous avons commencé à écrire cette saison il y a un an et demi. Nous ne pensions pas tomber aussi juste. Ce n'est pas un objectif, de suivre ce qui se passe aux Etats-Unis, je pense que je peux parler pour tout le monde en disant qu'on aimerait tous que la série soit à côté de la plaque. Et je parle autant de ce qui se passe avec les réfugiés que de la question de l'avortement. »
Chacun des comédiens déplore le fait de pouvoir si facilement puiser dans le réel pour nourrir son personnage. C'est le cas de Samira Wiley : « Même si la situation de Moira est très différente, car elle est la bienvenue au Canada. Savoir qu'il y a tellement de situations de déracinement desquelles je peux m'inspirer, ça me brise le cœur », commente-t-elle. L'un des producteurs du show, Warren Littlefield, insiste quant à lui sur le fait que même si le récit original était déjà très plausible, les choses ne vont pas en s'arrangeant. Bien au contraire. « A l'époque où Margaret Atwood a écrit La Servante écarlate, elle s'est inspiré d'événements réels qui avaient pu se produire au cours de l'Histoire, et ça semblait très pertinent, rappelle-t-il. Aujourd'hui, ça semble plus pertinent et plus réaliste que jamais. Malheureusement, on vit dans un mode où chaque jour est un nouveau combat pour les droits humains et les droits des femmes. »
On vit dans un mode où chaque jour est un nouveau combat pour les droits humains et les droits des femmes.
« Quand on s'est réveillés, au milieu de la saison 1, se souvient-il, dans un monde dans lequel Trump était président, on a senti une responsabilité encore plus grande. Et ça nous a donné comme l'impression qu'on faisait un peu partie de la résistance. » La veille de notre rencontre avec l'équipe, une partie du casting s'est rendus aux Nations Unies, où travaille la cousine de Bruce Miller : « Nous étions aux Nations Unies hier et nous avons rencontré des gens qui travaillent avec les réfugiés et des gens qui s'occupent des droits des femmes. On crée de la fiction, bien sûr, mais on a vraiment envie de donner le meilleur de nous-mêmes », souligne Amanda Brugel, qui incarne Rita, la Martha qui travaille au service des Waterford, depuis la saison 1.
La manière dont les femmes s'unissent dans la série est très inspirante pour les spectatrices et les spectateurs.
Cette saison plus encore que dans les précédentes, les femmes des différentes castes définies par Gilead commencent à s'unir. Un message positif que Samira Wiley souhaite voir trouver une résonnance au-delà de la série. « Pour une raison que j'ignore, on cherche toujours les différences entre les gens. On oublie parfois qu'on est tous bien plus semblables que différents. On devrait pouvoir utiliser nos forces de manière collective contre l'oppresseur, qui lui cherche à nous diviser. » Sa partenaire Elisabeth Moss espère de son côté que la série aura un véritable impact et que « les gens ne se contenteront pas d'en parler et qu'ils vont utiliser ce sentiment de peur provoqué par la série et l'impression terrifiante que c'est finalement très pertinent pour passer à l'action. » Tout n'est donc pas perdu et Amanda Brugel pense que « la manière dont les femmes s'unissent dans la série est très inspirante pour les spectatrices et les spectateurs ».
En ce qui concerne la situation aux Etats-Unis, reste à voir comment les choses évolueront dans les prochains mois, mais Warren Littlefield pense que les menaces de boycott des studios et du monde de l'audiovisuel devraient porter leurs fruits : « Si la Georgie, le Missouri, l'Alabama, ou même l'Ohio devaient vraiment faire passer ces lois, je ne travaillerais certainement plus dans ces Etats. Un seul épisode de série injecte des millions de dollars dans l'économie locale. Si le studios commencent à se retirer, on parlera de milliards et je pense que ces Etats vont sentir la pression. Je l'espère. »
Le teaser de l'épisode 5, diffusé mercredi 26 juin sur Hulu et disponible sur OCS en US +24 :