Mon compte
    Black Mirror, Bandersnatch : comment a été créé l'épisode interactif

    Bandersnatch, l’épisode spécial de Black Mirror est sorti aujourd’hui. Signe distinctif : vous êtes le héros. Un exercice périlleux qui n’a failli jamais voir le jour, raconte Charlie Brooker et Annabel Jones, créateurs de la série.

    Netflix

    Depuis que Netflix a décidé de se lancer dans la production de contenus et ne plus être un simple diffuseur, la question s’est souvent posée : qu’est ce qui distingue un film ou une série Netflix du reste d’Hollywood ? Une question étrange, on n’aurait pas ce genre de considération pour une chaîne de télévision. Peut-être parce que Netflix ce n’est pas de la télé (ce fut l’un des slogan de HBO) ? Mais en ce 28 décembre et la mise à disposition de l’épisode spécial de Black Mirror (Bandersnatch), une réponse possible se dessine.

    Un épisode dont vous êtes le héros… très peu pour Charlie Brooker

    Aux personnes ayant vécues leur adolescence dans les années 90 et que l’heroic fantasy ou la lecture n’effrayaient pas, il y a beaucoup de chances qu’elles aient eu entre les mains un livre « dont vous êtes le héros ». Ces récits d’aventures que l’on abordait muni d’un crayon, une feuille de papier et d'un dé et qui nous envoyait parcourir les pages en fonction des choix effectués (les nôtres, le résultat du dé ou l’issue d’un combat). Depuis, ce type d’ouvrage est un peu tombé dans l’oubli, le principe ayant été logiquement récupéré par les jeux vidéos, genre Heavy Rain de David Cage, Fable de Peter Molyneux ou encore les adaptations de The Walking Dead par le studio Telltale.

    C’est avec cette idée de récit interactif où le spectateur n’est plus seulement passif d’une histoire mais acteur, que Netflix a soumis l’idée aux auteurs de Black MirrorCharlie Brooker et Annabel Jones. La série d’anthologie, avec sa lecture très noire des dérives technologiques, se prête en effet particulièrement bien à cet exercice périlleux. Tellement périlleux que la première réaction des parents de Black Mirror est de refuser catégoriquement : « Je crois que nous avons plus ou moins quitté la pièce, en claquant la porte » confesse Charlie Brooker pour Wired, alors que Todd Yellin et Carla Engelbrecht responsables de la production et initiateurs du projet ne cachaient pas leur excitation.

    Netflix

    Un projet ambitieux et compliqué

    Pour Charlie Brooker, les récits interactifs sont synonymes d’objet un peu lourd et maladroit aux images excitantes sur l'emballage et décevantes une fois l’histoire achevée (pour peu d’être arrivé jusqu’à la fin). De plus, il ne voit pas comment rendre l’exercice compatible avec Black Mirror. Fin de l’histoire ? Sauf qu’au cours d’une réunion d’écriture, l’une des idées jetées sur la table pouvait très bien servir de base à un « épisode dont vous êtes le héros ». Le ver est dans la pomme, impossible de faire marche arrière : « Oh mer**, maintenant nous devons le faire et ça va être particulièrement compliqué à réaliser » se rappelle Brooker.

    Il n’avait tort. Au départ tout semble s’écrire facilement, un peu comme n’importe quel épisode classique avec des fins alternatives en plus. Le tour est joué. Seulement Brooker et Jones aimant se compliquer la tâche, germe l’idée d’un récit capable de se souvenir des choix du spectateurs. Ainsi, au lieu de bêtement suivre un rail avec quelques QCM à remplir, l’histoire pourrait être plus immersive pour le public. A partir de là, il ne s’agit plus d’écrire un scénario classique mais de s’appuyer aussi sur des outils extérieurs, notamment ceux du jeux vidéos, comme le logiciel Twine qui permet de concevoir un « arbre narratif » où chaque branche constitue un choix possible, se déclinant ensuite en d’autres branches, etc…. jusqu’à ce que Netflix, devant l’ampleur du projet, ne décide de concevoir son propre outils de développement (Branch Manager), capable de gérer des histoires interactives de façon plus efficace et standardisée.

    Bandersnatch peut ainsi durer de 60 à 120 minutes selon les choix du spectateur, l’expérience en moyenne étant de 90 minutes. « Si vous ne faites rien (l’interface choisit pour vous, NdR), vous aurez une médiocre expérience » annonce le réalisateur de l’épisode David Slade. La colonne vertébrale de l’épisode sera la même pour tout le monde, à savoir l’adaptation en jeu vidéo d’un roman dont vous êtes le héros écrit par la défunte mère du créateur, mais chaque spectateur fera l’unique expériences des choix qu’il réalisera (les itérations sont multiples et bien trop importantes pour être listées, une infographie est disponible sur internet pour les plus curieux).

    Vers d’autres oeuvres interactives ?

    Pour Charlie Brooker et Annabel Jones, si le chemin, une fois tout mis en place, n’a pas beaucoup dévié d’un épisode classique de Black MirrorBandersnatch aura néanmoins nécessité deux fois plus de temps de production et beaucoup plus de crises de nerfs : « Nous n’avons généralement pas autant de crises à gérer » précise Annabel Jones, « Normalement, c’est une. Pas 12 consécutives » ajoute Charlie Brooker. De la réception de l’épisode dépendront de futurs projets similaires. On peut facilement imaginer que la création de Branch Manager était autant pour faciliter la tâche des auteurs de Black Mirror que de capitaliser sur de possibles nouvelles expériences. Pour Todd Yellin « nous n’en sommes qu’au commencement, tout juste à la surface de ce type d’histoire. [...] On aimerait beaucoup voir une comédie interactive, un film d’horreur interactif, une romance interactive où l’on pourrait choisir avec qui on voudrait aller au bal de promotion. Il existe toute sorte d’histoires qui ont un potentiel énorme à exploiter ».

    Et vous, qu’allez-vous choisir ?

    Black Mirror : une série d’affiches rétro rend hommage à la série
    FBwhatsapp facebook Tweet
    Sur le même sujet
    Commentaires
    Back to Top