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    Les films des années 80 vus par… le collectif Masebrothers

    Cofondateur du collectif Masebrothers, Mathieu Caillière y revisite la pop culture et le cinéma des années 80 à travers des bandes-annonces de faux films comme Kickin' Jack ou Rage of Fire. Rencontre avec un nostalgique passionné... et talentueux.

    Cet entretien est tiré du livre "Génération Vidéoclub - Back to the 80's" publié ce jour par AlloCiné

    AlloCiné : Le cinéma des années 80 : qu’est-ce que cela vous évoque ?

    Mathieu Caillière (Masebrothers) : Un cinéma créatif et authentique. Insouciant aussi, et même un peu naïf parfois, là où le cinéma se prend peut-être plus au sérieux aujourd’hui. C’était également un cinéma très graphique, très "smoke and neon", un cinéma d’artisan là où le cinéma actuel, écrasé par le tout numérique -je parle en tout cas des blockbusters- ne me fait pas vraiment vibrer. Et puis c’était un cinéma cool, popcorn, avec lequel on s’amusait et où l’on retrouvait de vraies stars. Nos héros aujourd’hui sont des héros en collants. Ou des personnages comme Jack Reacher, qui ne sont pas vraiment cools. Nous n’avons plus de vrais héros. Dans les années 80, il y avait John McClane, Marty McFly, Jack Burton… Chaque personnage avait un look, on les caractérisait jusqu’au bout des santiags ! (Rires) Ils étaient immédiatement identifiables. On avait envie d’être eux. Je n’arrive pas à retrouver ça aujourd’hui. Même si bien sûr certains films sortent du lot. Mais pas suffisamment.

    Vous parlez d’un "cinéma d’artisan" : qu’entendez-vous par là ?

    On filmait du vrai, du réel. On fabriquait des monstres qu’il fallait ensuite filmer et mettre en scène malgré les difficultés que cela représente. On filmait de vraies explosions. On filmait de vraies cascades. On construisait des décors, des maquettes, des vaisseaux comme celui d’Alien, par exemple, qui est une vraie œuvre d’art ! Aujourd’hui, le numérique a remplacé tout ça... J’aimais cette idée de me dire que la caméra filmait quelque chose de réel. Et puis il y avait cette notion de cinéma "imparfait" : un film aujourd’hui est trop parfait, trop lisse. Les défauts des films de cette époque font leur charme.

    Cette décennie, c’était aussi celle de la VF...

    Il y avait de vraies voix, des voix extrêmement identifiées et identifiables. La VF, c’était la moitié de l’acteur. Il y avait Schwarzenegger et sa voix… et quand sa voix changeait le temps d’un film, j’avais l’impression de me faire voler ! (Rires) J’étais très fan de Daniel Beretta, le comédien qui double Schwarzenegger. De Michel Vigné aussi, avec qui j’ai pu travailler, qui a été la voix de Chow Yun-fat, Kurt Russell ou Dolph Lundgren. Ces comédiens donnaient corps et donnaient vie à ces personnages, et ils assuraient la continuité d’un film à l’autre. Regardez Patrick Poivey, qui double Bruce Willis : pour tout le monde c’est la voix de Bruce Willis !

    Avec le collectif Masebrothers, vous rendez hommage aux années 80 avec des vidéos parfois en VF, mais aussi en VO avec des voix américaines très marquées. Vous ne rejetez donc pas totalement la VO des années 80 ?

    J’utilise beaucoup la VO sur nos fausses bandes-annonces. Je regardais les films des années 80 en VF, mais les bandes-annonces de ces films, on les voyait en VO avec ces grosses voix US très reconnaissables. J’aime beaucoup ce marketing à l’américaine, avec cette voix qui en rajoutait des caisses pour vendre le film, comme si un gros baraqué était derrière le micro ! (Rires)

    On sent aussi dans vos vidéos l’amour du format VHS…

    Je montais mes premiers films sur VHS, donc j’ai un attachement très fort à ce format. Tous ces défauts, ces sauts d’images, ça me ramène à une vraie nostalgie, en plus d’une patte graphique. J’aimais vraiment ce format, avec ces gros boîtiers : même si la qualité était discutable, c’était un bel objet.

    Et le vidéoclub dans tout ça ? Quels souvenirs gardez-vous de ce lieu ?

    J’ai grandi sans magnétoscope. Je ne l’ai eu que très tard : j’ai donc longtemps convoité le support VHS. Quand j’ai enfin pu y accéder, c’était quelque chose. Je pouvais enfin entrer dans ces temples du cinéma. J’avais une vraie admiration pour le vidéoclub, avec ces étalages de cassettes et de jaquettes comme on n’en voit plus aujourd’hui. Pour moi, c’était Disneyland ! On rentrait, on savait qu’on voulait voir le dernier Van Damme ou le dernier Stallone, on angoissait cinq minutes en espérant que l’étiquette soit encore là pour récupérer le film… (Rires) Il y avait à cette époque une relation particulière au cinéma. C’était un vrai

    moment solennel. Le samedi soir, c’était la soirée vidéo avec un, voire deux films. On partageait un vrai moment de cinéma.

    Le partage, ça passait aussi par le gérant du vidéoclub et ses conseils parfois avisés, parfois moins, non ?

    J’ai eu tous les cas de figure ! J’ai eu la mamie peu impliquée qui vous loue la cassette sans un mot, et j’ai eu le passionné qui vous fait découvrir d’autres cinémas. Je me souviens d’un gérant qui m’a amené vers le cinéma asiatique et notamment les films de la collection HK, qu’il ne proposait même pas dans son vidéoclub. Quand je rentrais, j’y restais au moins une heure, on échangeait, on découvrait… C’est quelque chose qui me manque. J’aimerais bien trouver encore des endroits comme ça, même pas pour louer mais juste pour discuter, pour les conseils. On n’était pas seul avec sa télécommande devant un écran sur Netflix ou une plateforme SVOD à choisir un film. La relation est complètement différente aujourd’hui... C’est ce que nous essayons de ramener avec Masebrothers : un peu d’amour pour le cinéma et un vrai partage.

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