Il aura fallu moins de dix-neuf films à Marvel pour s'offrir les sommets du box-office, car le premier Avengers s'était déjà chargé de battre des records, six ans avant la sortie d'Infinity War. À y regarder de plus près, rares sont les opus qui ont déçu en matière de recettes, sans qu'il ne soit question de catastrophe pour autant. Sur ce plan, le MCU est une réussite et c'est aussi pour cette raison que nous avons choisi de les mentionner dans la page sur les chiffres ou au sein de ces quelques lignes, pour mieux faire ressortir les points suivants parmi les succès de la Maison des Idées.
IRON MAN
C'est le premier. Celui qui devait donner l'exemple et permettre au Marvel Cinematic Universe de décoller ou le faire caler au démarrage. Heureusement pour la Maison des Idées, le succès a été au rendez-vous, et son univers ne serait pas ce qu'il est aujourd'hui sans Tony Stark, personnage moins connu du très grand public qu'un Captain America ou un Hulk, et grâce auquel ils ont pu tester leur force de frappe en même temps que se trouver un leader. Sur l'écran comme en-dehors, tant il ne semble faire qu'un avec son interprète Robert Downey Jr. (encore plus après la scène finale du premier opus), donc la présence chez les autres (Civil War, Spider-Man : Homecoming) fait figure d'événement.
Et ce quand bien même Iron Man 2 s'est raté en voulant jouer sur trop de tableaux en même temps et que le 3 a irrité certains fans à cause du traitement réservé au Mandarin. Tony Stark est le fer de lance et la clé de voûte du Marvel Cinematic Universe, celui sur lequel le studio a posé ses fondations et grâce auquel les autres héros ont pu se lancer au cinéma. Il n'y a d'ailleurs qu'à voir la place de Robert Downey Jr. sur l'affiche d'Avengers : Infinity War (ou la façon dont Joss Whedon le met en avant dans l'opus précédent) pour s'en convaincre, si besoin était. Et on se demande déjà comment se passera l'après.
CAPTAIN AMERICA
Aussi bien le personnage que l'arc narratif, ce qui n'était pas gagné à la sortie de First Avenger, film qui laisse une impression mitigée (première partie emballante, deuxième bancale) et n'ameute pas les foules dans les salles. Avec son attitude de boy scout et son costume digne d'un déguisement de goûter d'anniversaire, il est même moqué dans Avengers avant de se muer en leader. Mais c'est avec Le Soldat de l'Hiver, sa seconde aventure en solo, que la bascule s'opère : non seulement le long métrage fait bouger les lignes de l'univers, en révélant qu'HYDRA se cachait derrière le SHIELD depuis de nombreuses années, mais le super-héros questionne au passage le symbole qu'il est censé représenter.
Et tandis que l'on ressent la même volonté chez son interprète Chris Evans de retirer l'étiquette qu'on a collée sur lui en jouant dans Le Transperceneige ou Mary, Civil War vient enfoncer le clou et confirmer les tensions entrevues dans Avengers 2, en faisant de Captain America un rebelle face au projet de supervision des super-héros soutenu par Iron Man. Là encore, c'est tout le MCU qui se trouve bouleversé à cause des agissements de ce personnage, sans doute l'un des plus humains de tous et qui incarne très bien l'Amérique d'aujourd'hui, preuve qu'il porte finalement bien son nom.
Avec quelques gaffes à la clé :
THOR
Il y a un an, il aurait échoué sur la page suivante : celle des échecs et semi-réussites. Mais Ragnarok est depuis passé par là, et Thor semble enfin avoir trouvé le ton qui lui convient le mieux, celui du buddy movie. Après un drame shakespearien aux angles de caméra penchés, marques de fabrique du réalisateur Kenneth Branagh, et une aventure qui lorgnait sur Star Wars et dans laquelle Loki lui volait la vedette, l'héritier d'Asgard est tombé entre les mains du rigolo Taika Waititi, qui lui a offert un opus complètement délirant dans lequel le héros réussissait quand même à évoluer, en perdant un œil et son royaume dans l'affrontement avec sa sœur.
La clé de ce changement tient en un mot : l'humour. Pas façon Les Visiteurs, comme dans le premier Thor. Tout réside ici dans l'écart entre la cool attitude et la volonté de jouer les héros, et le résultat, comme lorsqu'il jette un ballon contre une vitre en se vantant d'avoir un plan… et le reprend en pleine figure. Une mise en avant de l'humour qui permet d'exploiter le timing comique quasi-parfait de Chris Hemsworth et de donner encore plus de force aux moments plus héroïques, car plus inattendus. Et Infinity War le confirme en surfant sur la même vague et lui associant Rocket et Groot pour mieux nous faire rire, avant qu'il ne se jette, badass, dans le combat.
Connaissez-vous tous les détails cachés du premier "Thor" ?
LE CASTING
Nous aurions pu, de la même façon que nous l'avons fait avec Iron Man, Captain America et Thor, consacrer des paragraphes à d'autres des personnages du Marvel Cinematic Universe. Mais il fallait surtout mettre en avant le trio historique, et beaucoup se retrouveraient sur cette page. Ne serait-ce que pour l'aspect suivant : le casting. Il y a bien eu les couacs Edward Norton et Terrence Howard, respectivement remplacés par Mark Ruffalo et Don Cheadle dans les rôles de Bruce Banner et James Rhodes. Mais rares sont les ratés de la Maison des Idées dans ce secteur, à tel point qu'il est aujourd'hui difficile d'imaginer d'autres acteurs dans la peau des personnages actuels, tant leurs interprètes ont bien été choisis.
De Benedict Cumberbatch en Doctor Strange à Tom Holland en Spider-Man, en passant par Chris Pratt en Star-Lord, Paul Rudd en Ant-Man ou Josh Brolin en Thanos, le succès de Marvel sur grand écran provient aussi de cette capacité à trouver les bons comédiens pour donner vie à leurs personnages sur grand écran, et on attend avec impatience de voir ce qu'il en sera pour Captain Marvel, première super-héroïne en tête d'affiche de l'un de ses longs métrages. Petit bémol, toutefois, sur Chadwick Boseman en Black Panther, qui paraît écrasé par le méchant Erik Killmonger (Michael B. Jordan) et dont le personnage fait d'abord penser à Thor dans sa première aventure (le côté héritier du trône sans doute). Mais il s'améliore un peu dans Infinity War, ce qui permet d'être optimiste pour la suite.
Chris Evans et Chris Pratt, super-héros et rois du photobomb :
LA COMMUNICATION
Savoir choisir ses acteurs, c'est bien. Savoir communiquer autour des annonces et des films, c'est mieux. Et sur ce plan, Marvel réalise un quasi-sans faute dont les sorties d'Edward Norton sur L'Incroyable Hulk alors que seule une bande-annonce avait été dévoilée, les rumeurs de renvoi d'Alan Taylor pendant le montage de Thor 2 et le départ d'Edgar Wright sur Ant-Man ont été les seuls points négatifs. Pour le reste, les annonces ont été faites quand le studio l'avait décidé, comme lorsque Brie Larson a été confirmée en Captain Marvel lors du Comic-Con de San Diego en 2016, ou que Kevin Feige a organisé une conférence de presse événementielle, en octobre 2014, pour dévoiler le contenu de la Phase 3 et présenter Chadwick Boseman comme l'interprète de Black Panther.
De la même façon, les fuites sont contrôlées et/ou contenues (y compris lorsque la première bande-annonce d'Avengers 2 est mise en ligne plutôt que prévu), les éventuels twists sont tenus secrets jusqu'au bout (outre les surprises d'Infinity War, qui était au courant des retournements autour du Mandarin d'Iron Man 3 et du Vautour de Spider-Man : Homecoming ?) et c'est aussi dans la façon de promouvoir ses films que Marvel assure. Avant d'en voir une bande-annonce, qui parmi les néophytes avait envie des voir Les Gardiens de la Galaxie, Doctor Strange ou Black Panther ? Beaucoup moins qu'après la révélation de ces vidéos efficaces et qui donnent le ton, et ont leur part de responsabilité dans le succès rencontré.
LA PHASE 3
La première a posé les bases, et la seconde a eu du mal à enchaîner, tombant trop facilement dans la formule établie avec Avengers (nous y reviendrons sur la page suivante). Avec la Phase 3, Marvel a clairement rectifié le tir en osant un peu plus (dans la limite de l'exercice puisque nous parlons de productions très grand public), et ce dès le film d'ouverture, Civil War, qui créait une scission chez les héros emmenés par Captain America et Iron Man. Non content de donner un peu plus de place à la diversité (Black Panther et son casting presqu'exclusivement noir, la future Captain Marvel), le studio a également su donner sa chance à des auteurs un peu plus aguerris, en leur laissant les mains à peu près libres.
C'est ainsi que Scott Derrickson a imposé ses visions psychédéliques sur Doctor Strange, que Taika Waititi a plongé Thor et Hulk dans un buddy movie aux allures de grand délire (avec plus de fidélité aux comic books de Jack Kirby qu'on ne le croit) ou que le très énervé Ryan Coogler a infusé Black Panther d'un brin de politique. Autant de longs métrages auxquels il faut ajouter Les Gardiens de la Galaxie 2, dans lequel James Gunn a semblé plus libre encore que sur le précédent (avec des effets positifs et négatifs), qui ont permis de sortir un peu de la routine, et pour qui le succès a été au rendez-vous. Coïncidence ?
"Infinity War", dernier opus en date de la Phase 3 :
Et n'oublions pas, dans les réussites, les aboutissements que représentent Avengers et Infinity War, où tous les éléments mis en place dans les films précédents se rejoignent et valident la stratégie narrative mise en place par Kevin Feige et son équipe. L'Ère d'Ultron, de son côté et malgré des qualités évidentes, aurait plus sa place dans les échecs, page suivante.