AlloCiné : Qu'est-ce qui vous a donné envie de rejoindre le projet et d'incarner William Marston ?
Luke Evans : J'ai été très rapidement séduit par l'histoire de cet homme qui a d'abord inventé le détecteur de mensonges et qui a ensuite créé Wonder Woman et c'était encore plus évident quand j'ai compris quelle était sa vie, sa relation polyamoureuse avec ces deux femmes, à une époque où c'était terriblement difficile à assumer. Il a été professeur à Harvard, écrit de nombreux livres sur ses théories au sujet de la psychologie… C'est un personnage fascinant. My Wonder Women est surtout une incroyable histoire d'amour, de sacrifice, où les personnages se battent pour ce qui est juste et ce en quoi ils croient.
C'est une histoire qui aurait pu être racontée de plein de manières différentes. Angela Robinson a choisi le biais de l'histoire d'amour, vous êtes d'accord avec ce choix ?
Bien sûr, je pense que c'est la meilleure manière. Certes, Wonder Woman est un personnage magnifique, qui a connu une véritable renaissance avec la sortie du film, mais c'est l'histoire derrière sa création qui est passionnante. Le chemin que le film emprunte, c'est celui de ces trois personnages plutôt communs, qui choisissent une vie qui ne l'est pas du tout. Marston était l'une des premières voix masculines du féminisme aux Etats-Unis. Il disait qu'il considèrait que sa femme était beaucoup plus intelligente que lui, et elle-même était une féministe engagée. C'est très important de réaliser que le personnage de Wonder Woman a été créé par un féministe et que cette super-héroïne lui a été inspirée par les deux femmes qu'il respectait, qu'il admirait et qu'il aimait au quotidien.
Lisiez-vous Wonder Woman lorsque vous étiez enfant ou adolescent ?
Non, je n'ai jamais jamais été très fan de comics, je dois l'avouer, même si maintenant ils sont beaucoup plus présents dans l'inconscient collectif. Au cours de mes recherches, j'ai évidemment acheté énormément de comics, j'ai étudié l'évolution du personnage de Wonder Woman, des débuts, jusqu'à ce qu'elle soit censurée dans les années 1950-1960, puis réhabilitée.
Pensez-vous que My Wonder Women soit plutôt un film sur le féminisme ou un film féministe ?
C'est l'histoire d'un homme qui était féministe, qui pensait que les femmes n'ont pas besoin de l'aide des hommes pour s'accomplir et qui a également créé une icône féministe, qui a survécu à l'épreuve du temps... Je pense que c'est un peu les deux !
Aujourd'hui, il y a toujours assez peu d'hommes qui disent : "Je suis féministe." L'êtes-vous ?
Oui, je pense que je le suis. Dans ma vie, les femmes ont toujours eu une voix égale à celle des hommes, parfois même plus importante. Je suis très proche de ma mère et j'ai toujours été entouré par des femmes fortes, que j'admire. Dans ma famille, c'étaient les femmes qui portaient la culotte ! (Rires) On vit à une époque où a beaucoup de débats à ce sujet, surtout dans l'industrie du cinéma, c'est très important qu'on en parle et je pense que les choses vont changer et il est temps que ça arrive, car c'est évident que les femmes doivent pouvoir avoir les mêmes opportunités que les hommes.
Vous jouez aussi dans la mini-série L'Aliéniste, où on retrouve aussi un personnage de pionnière. Est-ce que vous pouvez nous en dire un peu plus sur cette expérience ?
L'Aliéniste se passe à New York en 1896. J'y joue un illustrateur pour le New York Times, Daniel Brühl est un "aliéniste" - qui est le premier nom qu'on donnait aux phychologues -, et Dakota Fanning la première femme à entrer dans la police de New York. Elle est harcelée au quotidien par les hommes de son unité. Quand on a tourné, c'était avant toutes les affaires de harcèlement, mais maintenant que la série est diffusée, ça a une résonnance très forte. Ca a soulevé la question suivante : "Est-ce qu'on a vraiment changé, entre la fin du 19e siècle et aujourd'hui ?" Les même faits se reproduisent constamment.
Est-ce qu'il aura une saison 2 ?
C'est concu comme une mini-série et on a adapté la totalité du roman. Il y a un autre roman, qui raconte la suite, mais pour le moment il n'est pas encore question d'une saison 2. On va attendre de voir comment les gens réagissent à la série et s'ils l'aiment assez, je sais que Daniel, Dakota et moi, on serait ravis de continuer l'aventure avec ces personnages. Aux Etats-Unis, à la fin du dernier épisode, les gens continuaient à discuter des relations entre les personnages et on s'est rendu compte qu'il y avait encore beaucoup de choses à explorer, alors, qui sait ?
En quoi l'expérience de la scène a-t-elle fait de vous un acteur différent ?
Les acteurs qui ont la chance d'apprendre leur métier sur scène ont d'emblée une corde supplémentaire à leur arc. D'abord, on joue la même histoire chaque soir, donc on apprend à la façonner, à la sculpter. On apprend aussi à manipuler le public : il y a deux mille, cent, ou dix personnes qui vous regardent, qui réagissent, et soit vous les tenez dans la paume de votre mains, soit vous ne les tenez pas ! On reproduit la même pièce, mais chaque représentation est légèrement différente. On apprend aussi la maîtrise du rythme. A la télévision ou au cinéma, il est modifié par le monteur, alors que sur scène, il ne tient qu'à vous. Si vous attendez une seconde de trop pour faire rire ou pleurer le public, c'est trop tard, vous avez laissé passer votre chance jusqu'au lendemain soir. Même si être acteur au cinéma n'est pas tout à fait pareil, c'est un réel atout.
La scène vous manque ?
Oui, en particulier quand je vois quelque chose d'extraordinaire en tant que spectateur. Je me dis : "Ce moment me manque, ce moment où le public est là, complètement là." C'est quelque chose de génial et qui n'a pas d'équivalent au cinéma ou à la télévision. J'aimerais beaucoup retourner sur scène quand j'en aurai le temps.
J'adorerais retravailler avec Ridley Scott car ça n'a duré que trente secondes la première fois !
Vous avez tourné avec Peter Jackson, Ridley Scott... Avec quels cinéastes aimeriez-vous collaborer ?
Déjà, j'adorerais retravailler avec Ridley Scott parce que ça n'a littéralement duré que trente secondes la première fois sur Robin des Bois ! (Rires) Je suis un grand fan de Wes Anderson, j'aime sa manière de faire des films, j'ai vraiment hâte de voir L'Île aux chiens ! Ca me plait aussi beaucoup de tourner avec de jeunes réalisateurs aussi, c'est vraiment une joie de partager ce moment où ils se trouvent.
Dans une interview que vous nous aviez accordée pour la sortie de Dracula Untold, vous disiez que vous auriez rêvé de jouer avec Robin Williams. Pourquoi ?
C'était le maître de la comédie, il n'y avait personne comme Robin Williams et je pense qu'il n'y aura plus jamais personne comme Robin Williams. Ce qu'il y avait de merveilleux avec lui, c'est qu'aussi drôle et aussi dingue qu'il ait pu être, lorsqu'il jouait des personnages sérieux, il avait une profondeur incroyable, il vous touchait comme personne. Son talent était infini et c'était toujours hypotisant de le regarder.
Quels sont les comédiens que vous admirez ?
Il y en a tellement. Marlon Brando à ses débuts, sans hésiter. Je le regarde très souvent, je trouve qu'il était totalement en avance sur son temps, sa technique - si on peut parler de technique - est si naturelle, si pure, si vraie. DiCaprio est complètement envoûtant. Et Brad Pitt. Parfois, je regarde Brad Pitt et je me dis que c'est vraiment un génie. Vincent Cassel m'impressionne énormément, il se jette totalement dans les rôles qu'il interprète et ses choix de films sont toujours très intéressants. Et la génération de Robert DeNiro, Al Pacino, Dustin Hoffman : ce sont eux qui ont défini ce qu'on fait aujourd'hui. Parmi les actrices, je trouve Ruth Wilson absolument fantastique. Et, comme pour les réalisateurs, j'adore découvrir de nouveau acteurs ! Timothée Chalamet est stupéfiant, ça a l'air tellement inuitif et naturel pour lui de jouer, et il est tellement jeune !
Il est à moitié français, c'est pour ça...
Voilà ! (Rires)
La bande-annonce de My Wonder Women :