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    Fiertés de Philippe Faucon : rencontre avec le réalisateur et co-scénariste de la série événement d'Arte
    Brigitte Baronnet
    Passionnée par le cinéma français, adorant arpenter les festivals, elle est journaliste pour AlloCiné depuis 13 ans. Elle anime le podcast Spotlight.

    Arte diffuse ce soir "Fiertés", une nouvelle série sur 30 ans de combat pour la reconnaissance et la liberté des identités sexuelles en France, mise en scène par le cinéaste césarisé Philippe Faucon ("Fatima"). Coup de projecteur et rencontre.

    Scarlett Production / 13 Productions

    De quoi ça parle ?

    De la veille de l’arrivée de François Mitterrand au pouvoir le 10 mai 1981 à l’adoption de la loi Taubira sur le mariage promulguée le 18 mai 2013 et votée le 23 avril, Fiertés s'intéresse à une histoire d’amour, et plus largement, la vie d’une famille et des combats menés par les homosexuels autour du Pacs, du mariage et de l’adoption. 

    Pourquoi il ne faut pas la manquer ?

    La série Fiertés aborde par le prisme de l'intime des sujets et débats qui ont marqué la société française du début des années 80 à aujourd'hui. Impossible d'y rester insensible car ce choix de l'intime donne au projet une tournure universelle. Comme les scénaristes José Caltagirone et Niels Rahou l'ont expliqué pour présenter la série à la presse, "il était important de s'attacher à des personnages qui existent, qui pourraient exister; il était important de s'attacher à l'humain, à des choses qui nous parlaient, ces histoires de famille, de filiation, d'amour... (...) La famille et l'amour universels sont plus les sujets que l'homosexualité en tant que telle, ce n'est pas une série sur l'acceptation de l'homosexualité".

    Et d'ajouter : "On a eu l'idée de Fiertés après les événements de 2013 autour de la question du mariage pour tous. C'est quelque chose qui transcendait la sphère simplement publique et politique, mais c'est quelque chose qui était extrêmement violent personnellement pour beaucoup d'homosexuels de voir qu'une partie de la société était capable de s'élever, de protester, de perdre du temps à marcher dans la rue pour lutter contre des droits qui devraient être acquis à tous. Ce n'est pas une faveur que l'on fait aux LGBT, c'est juste leur donner les mêmes droits que tout le monde." 

    Portée par un casting formidable, mêlant des noms très connus apparaissant pour de courtes scènes comme Emmanuelle Bercot ou Chiara Mastroianni, des comédiens brillants comme Samuel Theis, Frédéric Pierrot, Stanislas Nordey et de belles découvertes comme Benjamin Voisin, Fiertés est réalisée par un cinéaste dont on aime la pudeur et la délicatesse, Philippe Faucon, très remarqué avec son dernier film, Fatima, qui a obtenu le César du meilleur long métrage en 2016. 

    Nous nous sommes justement entretenus avec Philippe Faucon, qui marque avec Fiertés son grand retour à la télévision. Découvrez notre entretien ci-dessous.

    Fiertés, 3 x 52', ce soir sur Arte à partir de 20h50, également disponible en DVD (Pyramide Video, Arte Editions)

    Avec Samuel Theis, Stanislas Nordey, Frédéric Pierrot, Nicolas Cazalé, Benjamin Voisin,

    Sophie Quinton, Lou Roy Lecollinet, Jérémie Elkaïm, Emmanuelle Bercot, Chiara Mastroianni...

    Bestimage

    AlloCiné : Comment êtes-vous arrivé sur ce projet ? Est-ce que cela a fait suite à Fatima et à son succès aux César ?

    Philippe Faucon, réalisateur et co-scénariste : Oui, je pense que c’est lié. C’est un projet qu’on m’a proposé un peu après les César. J’ai eu une demande de la part de la productrice pour que l’on se rencontre. Elle m’a fait lire un traitement d’une douzaine de pages qui a été écrit par les deux jeunes auteurs qui sont à l’origine de ce projet, José Caltagirone et Niels Rahou. J’ai trouvé ça intéressant. Elle a proposé l’idée à Arte, le principe d’une mini-série qu’on écrirait ensemble avec les auteurs à l’origine du projet, et que je réaliserai.

    Avez-vous abordé ce projet comme un long métrage en trois parties ? Comment cela a changé votre façon de vous emparer du projet ?

    Pour moi, c’était un retour à la télévision. En fait, mes premiers films jusqu’au 6ème ont surtout été des films faits pour la télévision, des unitaires, pour Arte et pour France 2. C’était la période Pierre Chevalier et Humbert Balsan. Cela faisait une quinzaine d’années que je n’avais plus tourné pour la télévision. En revanche, c’est un format que je n’avais pas vraiment pratiqué. J’ai accepté la proposition de la productrice à condition de participer à l’écriture. C’était important. J’avais besoin de croire à ce que l’on était en train de faire.

    Le propos, le sujet, la pratique de l’exercice m’intéressaient. C’est un format qui permet de s’arrêter sur des moments du récit ou des personnages auxquels on peut donner un peu plus d’importance. Le fait d’avoir un récit en épisodes permet dans chaque épisode d’accorder plus d’attention à un temps du récit, une époque, un personnage. Ce qui est aussi inhérent au format télé est que ça doit se faire dans un temps beaucoup plus court mais avec la possibilité de constituer un casting qui pouvait permettre de tourner rapidement des choses de qualité.

    Arthur Farache Sauvegrain-Sca / arte

    Parlons du casting justement : on retrouve de nouveaux visages mais aussi par exemple Stanislas Nordey, très connu des planches, mais beaucoup plus rare à l’écran, ou bien encore Sophie Quinton que l’on ne voit que rarement. Quelle a été votre implication dans ce casting ?

    Le casting est aussi quelque chose dans lequel je m’implique beaucoup parce que la réussite du film se joue pour une part importante là-dessus. J’ai travaillé avec une jeune directrice de casting qui s’appelle Leïla Fournier, dont je connaissais le travail, mais avec qui je n’avais jamais travaillé. Il y avait des rôles sur lesquels il fallait aller chercher des comédiens pas forcément déjà repérés avant en raison de l’âge des personnages. Son métier est de beaucoup suivre les acteurs qui apparaissent.

    Stanislas Nordey, ça faisait très longtemps qu’il n’avait pas tourné pour la télévision. C’était un personnage important du récit qu’on retrouve dans les trois épisodes. Il y avait une part d’inconnu car cela faisait très longtemps qu’il n’avait pas joué pour l’écran et il a un jeu qui est assez marqué par la scène habituellement. Ca l’intéressait de travailler dans un projet avec un rapport à la caméra et à l’image.

    Arthur Farache Sauvegrain-Sca / arte

    Il y a quelques temps dans une interview que vous avez donné à Télérama, autour de la sortie de Fatima et la question de la diversité, vous disiez « Depuis toujours, je suis frappé par le fait que les films français sont en décalage avec la réalité de la société française ». Avez-vous également fait ce constat pour les séries télé et est-ce aussi ce qui vous a donné envie d’y participer ?

    Quand on m’a proposé le projet, je trouvais que c’était assez inhabituel et on va dire gonflé. Je trouvais ça intéressant de revenir là-dessus, de s’arrêter et de revenir sur quelque chose qui avait été très marquant et de se demander pourquoi.

    Je ne me rappelle pas trop de cette interview, mais je devais faire référence à la diversité. Jusqu’à il y a encore pas très longtemps, c’était très frappant l’image qui était rendue de la société française par le cinéma. Ca a un peu évolué depuis mais c’était une image très homogène et qui me paraissait en décalage très important avec la réalité de la société. Il y avait sans doute ce désir de participer à rattraper ce décalage.

    Aux Etats-Unis, des quotas pour la diversité à l’écran ont été mis en place. La décision avait crispé au début, mais depuis elle apparait à présent très acceptée. Seriez-vous favorable à des quotas en France ?

    Pour moi, c’est un peu étonnant qu’on en arrive à mettre en place des quotas, par rapport à quelque chose qui devrait aller de soi. Ca veut bien dire que les concepteurs de séries, les gens qui travaillent dessus à l’écriture, la réalisation, sont principalement issus d’un même fragment de la société et qu’ils parlent et reproduisent ce qu’ils connaissent en méconnaissance d’autres composantes. C’est en train d’évoluer, et qu’on soit amené à le faire par l’imposition de règles est un peu bizarre.  

    Arthur Farache Sauvegrain-Sca / arte

    Vous avez également un long métrage qui arrive, Amin, sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs. Comment ces deux projets se sont-ils imbriqués ? 

    C’était un peu énorme et un peu fou. Les deux projets se sont enchainés effectivement. J’aurais préféré qu’ils ne se fassent pas l’un à la suite de l’autre car j’avais un peu peur qu’ils se nuisent. Je travaillais sur le projet de cinéma au moment où l’on est venu me chercher. Le projet était déjà assez avancé, en recherche de financement. On m’a proposé Fiertés qui m’a intéressé à ce moment. On s’est posé la question de si c’était raisonnable d’entreprendre les deux. Mais j’ai eu de plus en plus envie.

    Finalement, les deux projets se sont mis en place l’un après l’autre, donc c’était un peu énorme, dense, toute cette année ! Je ne pense pas que ce sera quelque chose que je recommencerais un jour ! On a tourné Fiertés en avril-mai 2017, puis on a tourné le long métrage à partir de septembre.

    Diriez-vous que le film s’inscrit dans la continuité de Fatima ?

    Oui, il y a quelque chose qui lie les deux films, même si Amin est un peu plus ample. C’est l’histoire d’un homme venu du Sénégal qui arrive en France pour travailler, et qui a laissé au Sénégal sa femme et ses enfants à qui il envoie de l’argent régulièrement. Il travaille, il rentre souvent dans un foyer. Il va rencontrer une femme en France… 

    Cannes 2018 - Quinzaine des Réalisateurs : Martin Scorsese, Nicolas Cage, Isabelle Adjani pour le 50e anniversaire 

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