AlloCiné : Peut-on dire que Xavier Beauvois, le réalisateur des Gardiennes, a le don de vous surprendre à chacune de ses propositions ?
Nathalie Baye, actrice : Absolument. C'est vrai. D'abord, j'ai lu le roman, il m'a envoyé le roman, que j'ai beaucoup aimé, d'Ernest Pérochon, et ensuite le scénario. Déjà de retravailler avec Xavier Beauvois est un plaisir en soi, et puis le sujet m'a beaucoup touchée. Le scénario était très beau, très fort, très dense. Et puis le rôle de cette femme, Hortense, qui est un rôle rêche, rude, et en même temps fort. Je n'avais jamais interprété une femme de ce genre. Il y avait quelque chose qui me séduisait beaucoup dans tout ça.
Je n'avais jamais interprété une femme de ce genre
Outre ce rôle, qu'est ce qui vous plaît particulièrement dans le cinéma de Xavier Beauvois ?
Sa vérité, son absolue authenticité, son pouvoir de donner des émotions sans bidouillage, sans forcer, sans trucage quoi. Xavier Beauvois est vraiment un artiste : il se sert de tout, de tous les éléments. Là on tournait en pleine campagne, dans un endroit assez sauvage, dans le Centre de la France.
Vous savez, quand on tourne, il y a un plan de travail, on sait qu'on va faire telle chose et telle chose aujourd'hui, et Beauvois, lui, suivant son humeur et ce qu'il voit, ou le temps, le ciel, il va modifier les choses comme ça, et entraîner toute une équipe dans son sillage. C'est très excitant, très séduisant, très nourrissant pour nous les acteurs. (...) J'aime toujours autant travailler avec lui, peut être même de plus en plus.
Guy Ferrandis
Pour parler de ce film, Xavier Beauvois dit que c'est un western, avec des cow-girls !
Oui parce qu'on est dans une campagne très sauvage. Ca se passe pendant la Guerre de 14 et ce sont des femmes qui font tourner la maison, qui s'occupent de la terre, des bêtes, qui sont face à tout ce que les saisons peuvent provoquer de miraculeux comme de terrifiant. Ce sont des battantes, ce sont des guerrières quelque part aussi.
Ce sont des battantes, des guerrières
Elles se battent pour que les choses tiennent, pour que quand les hommes reviendront de la guerre -car les hommes sont au front, sont en danger- montrer qu'elles sont en mesure de s'occuper du domaine et de le protéger, et de le faire même éventuellement prospérer. Et en même temps, ce sont des femmes qui ont la peur au ventre tout le temps parce que leur mari ou leur frère ou leur fils sont à la guerre. A cette époque, dans les petits villages, quand on voit les monuments aux morts, il y avait 85 morts, c'était invraisemblable. C'était une époque d'une dureté, d'une âpreté…
Et ces femmes sont d'autant plus incroyable que, quand les hommes sont revenus, ils ont reprise leur place de chef, ils reprenaient le travail qu'elles avaient fait pendant 4 ans et les femmes sont retournées dans l'ombre. Il a fallu encore très longtemps pour qu'elles puissent un peu aller dans la lumière.
Les Gardiennes : Nathalie Baye et Laura Smet ensemble pour la première fois au cinéma
