Lancée en octobre 2016 aux États-Unis, la série anthologique d'horreur Channel Zero, qui propose chaque saison une intrigue bouclée différente, à l'image d'American Horror Story, débarque enfin en France sur Syfy. La chaîne proposera en effet la saison 2, intitulée "No-End House", à partir de ce mardi 21 novembre à 22h30. Une saison de 6 épisodes, portée notamment par Amy Forsyth (Defiance), Aisha Dee (The Bold Type), et John Carroll Lynch, qui revisite un thème bien connu de l'épouvante, à savoir la maison hantée, et s'intéresse à l'histoire de Margot Sleator, une étudiante brisée par un drame familial, qui pénètre un soir avec ses amis dans une étrange bâtisse, considérée comme la plus effrayante des maisons hantées. Et bien qu'ils soient convaincus de pouvoir braver les six pièces de cette maison, ils vont vite comprendre comment la maison a gagné sa réputation : personne n'a jamais atteint la salle finale de ce labyrinthe cauchemardesque...
À l'occasion de l'arrivée de la série en France (la saison 1, "Candle Cove", sera diffusée quant à elle à partir du 12 décembre), nous avons pu nous entretenir avec son créateur, Nick Antosca, qui a notamment travaillé comme scénariste sur les séries Hannibal et Teen Wolf, ainsi que sur le film La Forêt. Un passionné du genre de l'horreur, qui nous a parlé de la genèse de Channel Zero, basée sur des creepypastas (des sortes de contes horrifiques circulant sur Internet), et nous a teasé la saison 3, prévue pour 2018. Une troisième salve d'épisodes qui ne sera pas la dernière puisque Syfy a déjà renouvelé la série jusqu'à la saison 4.
AlloCiné : Comment vous est venue l'idée de Channel Zero, une anthologie horrifique basée sur des creepypastas ? Qu'est-ce que vous aviez envie de raconter avec cette série ?
Nick Antosca : Je voulais raconter des histoires qui puissent traduire une dimension horrifique autant existentielle que psychologique. L'horreur est un genre que j'adore mais je trouve que bien trop d'histoires ou de films horrifiques ne sont finalement qu'un assemblage de sursauts faciles et de personnages totalement dénués de psychologie. J'avais donc le sentiment qu'en adaptant ces creepypastas, qui sont assez simples dans leur construction narrative et qui laissent une large place au devéloppement scénaristique, cela me permettrait de raconter des histoires nuancées et effrayantes sur un format assez long d'une saison. Ce que j'avais rarement eu l'occasion de voir à la télévision, l'exception notable étant la série française Les Revenants, qui fait partie de mes séries préférées et de mes inspirations, en terme de style, pour la première saison de Channel Zero, Candle Cove.
Les creepypastas restent des récits assez peu connus du grand public, à l'exception peut-être du Slender Man. Pourquoi avoir choisi ce genre spécifiquement, plutôt que de réelles affaires de meurtres étranges ou des légendes urbaines ?
En fait au départ c'est un peu le hasard qui a fait que je m'y suis intéressé de près. On m'a appelé en me disant "Est-ce que tu penses qu'il y a une série télé à tirer de cette nouvelle, Candle Cove, et est-ce que tu sais ce que sont les creepypastas ?". Et il se trouvait que oui, je connaissais ce genre. Et j'ai immédiatement eu la sensation qu'il y avait une formidable série à tirer de Candle Cove, mais aussi de tout un tas d'autres creepypastas, car il en existe des millions. Ce sont des histoires effrayantes, dérangeantes, étranges et en même temps assez familières. Alors j'ai proposé de créer une série dans laquelle chaque saison serait adaptée d'une creepypasta différente. Cela nous permettait de faire découvrir ces histoires à la majorité des téléspectateurs qui n'ont jamais entendu parler des creepypastas, et donc de les surprendre. Mais aussi de toucher potentiellement les quelques millions d'internautes éparpillés dans le monde qui connaissent déjà ces histoires et de leur offrir une adaptation qui soit assez originale pour les intéresser.
Vous avez déjà une liste des creepypastas que vous aimeriez adapter par la suite, si la série se poursuit au-delà de la saison 4 ?
Oui. Dès le départ, avant même que la série soit officiellement commandée, j'ai établi une liste des creepypastas que j'adore. Il y en a certaines que nous avons déjà utilisé pour nourrir les premières saisons. Et d'autres, malheureusement, que nous ne pouvons pas adapter car nous ne connaissons pas les auteurs. Car c'est le principe même des creepypastas : ce sont des histoires anonymes. Et nous pouvons seulement adapter celles qui ont un auteur connu, que l'on puisse payer et mentionner dans les crédits de la série. Je pense donc que 50% des histoires que j'aimerais vraiment raconter ne pourront jamais être adaptées à cause de cela. Mais ce n'est pas grave car de nouvelles creepypastas voient le jour en permanence. Et au-delà des 20 ou 30 histoires vraiment "célèbres", avec un nombre vraiment importants de fans sur Internet, il existe des milliers de creepypastas beaucoup moins connues. Je pense donc que si nous devions continuer la série après la saison 4, les saisons suivantes alterneraient entre creepypastas familières et creepypastas vraiment méconnues.
Lorsqu'on se lance dans la création d'une série anthologique d'horreur, je suppose qu'on pense forcément à ce qui se fait ailleurs, et en l'occurence à American Horror Story. Est-ce que vous aviez peur de la comparaison ?
Oui, je pense qu'au départ j'avais un peu peur que les gens comparent les deux séries. Mais au final j'ai la sensation que la comparaison est, d'une certaine manière, à notre avantage. Parce que Channel Zero est un peu à l'opposé d'American Horror Story. Ce qui fait qu'on peut tout à fait aimer American Horror Story et Channel Zero. Mais aussi que si vous n'aimez pas du tout American Horror Story, Channel Zero peut tout de même être votre tasse de thé. Tout simplement car les styles des deux séries sont vraiment différents. J'aime bien décrire Channel Zero comme de l'horreur "indé", alors que j'ai l'impression qu'American Horror Story est plus dans l'horreur un peu "too much", dans l'excès.
Comment décririez-vous "No-End House", la saison 2 de Channel Zero, en comparaison avec la saison 1, "Candle Cove" [qui sera prochainement diffusée sur Syfy France] ?
En terme de thématique, je dirais qu'elles vont plutôt bien l'une avec l'autre car elles traitent toutes les deux de personnages qui ont dû faire face à des pertes douloureuses dans leurs vies et qui ne savent plus très bien où ils en sont. Mais dans Candle Cove le personnage principal tente de fuir son passé, alors que l'héroïne de No-End House, Margot, est en quelque sorte coincée dans le passé, elle s'y accroche désespérément.
Mais si l'on compare les deux saisons sur le plan du style, elles sont très différentes. Je dirais que Candle Cove est un peu notre "saison à la Stephen King" alors que No-End House est plus proche de John Carpenter. Après un cadre plutôt reculé en saison 1, nous avons choisi de plonger les téléspectateurs dans une horreur de banlieue américaine typique. J'aime vraiment l'idée que chaque saison ait un univers très différent.
Que pouvez-vous nous dire sur le processus d'adaptation et sur les changements que vous avez apporté à la creepypasta d'origine pour No-End House ?
Il était nécessaire d'étirer un peu l'histoire de base, afin d'approfondir la mythologie et de pouvoir tenir une saison entière. Ce qui nous intéressait c'était de rentrer davantage dans le détail de ce que cette maison est capable de faire. Mais nous ne voulions sourtout pas tomber dans le trop-plein d'explications, dans une lourdeur narrative. Cela aurait vraiment démystifier l'horreur au coeur du récit. Les modifications que nous avons apporté avaient donc vraiment pour effet de grossir la mythologie de la maison et d'intensifier la sensation d'horreur. Nous avons par exemple modifié le contenu des différentes pièces de la maison pour des raisons d'effets cinématographiques et psychologiques. Nous voulions que la maison ait un lien vraiment spécifique et personnel avec chacun des personnages. L'idée étant que plus l'on pénètre dans la maison, plus la maison pénètre à l'intérieur de nous.
La saison 3, "Butcher's Block", est annoncée pour le premier semestre 2018 sur Syfy aux États-Unis. Que pouvez-vous révéler sur cette troisième salve d'épisodes ?
La saison 3 sera vraiment très différente des deux premières. Je dirais que c'est notre saison la plus surréaliste et la plus folle jusqu'à présent. Elle est très sombre et très étrange. Et vous devez vraiment vous attendre à trouver beaucoup plus d'humour noir dans cette saison. Et en ce qui concerne l'intrigue, tout ce que je peux dire c'est que si No-End House est un cauchemar de banlieue, Butcher's Block est une sorte de rêve fiévreux dans une ville en train de mourir. Et l'histoire traite des puissants qui prennent pour proies les plus faibles. Avec des prestations vraiment exceptionnelles de la part de Rutger Hauer, Krisha Fairchild, Olivia Luccardi, Holland Roden, et Brandon Scott.
Holland Roden a été l'une des héroïnes de Teen Wolf durant 6 ans, et vous avez travaillé brièvement comme scénariste sur Teen Wolf en 2012. Le fait qu'elle se retrouve au générique de la saison 3 de Channel Zero est une coïncidence ou c'était une volonté de votre part de travailler à nouveau avec elle ?
Ce n'est pas vraiment une coïncidence, non. Holland Roden est venue auditionner pour la saison 3 et évidemment je me souvenais d'elle. Mais je ne l'avais jamais rencontrée sur Teen Wolf car je travaillais avec les scénaristes à Los Angeles [et la série se tournait à l'époque à Atlanta, ndlr]. Son audition m'a vraiment épaté et j'ai donc appelé Jeff Davis [le créateur de Teen Wolf] et je lui ai dit "Dis-moi comment ça s'est passé avec Holland sur Teen Wolf" et il m'a répondu "Elle est exceptionnelle". Elle a toujours eu très bonne réputation en tant qu'actrice et en tant que personne sur Teen Wolf, et je suis très content de son travail sur Channel Zero.
La bande-annonce de Channel Zero : No-End House, qui débute ce mardi 21 novembre à 22h30 sur Syfy :