AlloCiné : Comment avez-vous découvert le milieu dans lequel s'inscrit Kiss and cry ? Comment le décririez-vous en quelques mots ?
Lila Pinell et Chloé Mahieu, réalisatrices : Nous avions après Nos Fiançailles le désir de faire un film sur la rivalité entre filles, adolescentes, dans le milieu du sport de haut niveau, afin d'y observer des rapports de force exacerbés, induits par les enjeux, la dureté de la discipline.
Lila avait fait du patinage quand elle était petite et elle a donc proposé cet univers. En apparence c'est un milieu un peu kitch, avec des musiques souvent mièvres et des tenues acidulées à paillettes et volants, mais en réalité le patinage est un sport extrêmement difficile (à la fois technique et artistique) et compétitif : les filles s'entraînent toutes ensemble mais patinent les unes contre les autres.
Nous avions également en tête un fait divers qui nous avait marqué adolescentes: la rivalité terrible entre les championnes américaines Nancy Kerrigan et Tonya Harding, qui s'était conclue par une agression violente dans les vestiaires.
Quand le film commence, on est intrigué : on se demande s'il s'agit d'un documentaire, d'une fiction, un mélange des deux... Etait-ce voulu, en quelque sorte, de brouiller les pistes ? Comment présenteriez-vous le genre du film justement ?
Pour faire ce film nous avons recueillis de nombreux témoignages de patineuses, de parents, mais aussi de jeunes adolescents d’aujourd’hui. Nous nous sommes aussi appuyées sur des souvenirs de notre propre adolescence, pour parler du décalage qui existent souvent à cet âges entre le désir des adultes et celui des enfants.
Nous souhaitions que les comédiens tous amateurs (à l'exception de Dinara Droukarova) se saisissent des personnages que nous avions imaginés pour eux, en apportant dans les séquences improvisées, leurs langages, émotions, complexité. Nous n'avons pas fait d'essais, et les séquences, rejouées plusieurs fois, sont imprégnées du dynamisme et de l'authenticité avec lesquels les comédiens ont investi leur rôle .
Le film est ancré dans le milieu du patinage artistique, mais il est aussi comme un prétexte pour parler d'adolescence, des premiers émois et de la pression qui pèse sur la jeunesse aujourd'hui...
Le kiss and cry est le lieu dans lequel les patineuses attendent leurs notes après une prestation. On trouvait que ça sonnait juste avec les thèmes du film, l'éveil des désirs adolescents. Le cadre du patinage était prétexte à observer de plus prêt les angoisses et les envies de jeunes filles en pleine construction.
L'entraîneur et les adultes qui les entourent sont volontairement caricaturaux, leurs traits sont exagérés, comme si nous les observions depuis le regard des patineuses; à cet âge trouble où l'on a l'impression de s'arracher à l'enfance, on s'imagine et on ne perçoit souvent les adultes, que comme des tyrans, insupportables et volontairement castrateurs. L'agressivité se situe des deux côtés.
La musique est assez présente dans le film. On peut entendre notamment la chanteuse Fishbach ou des compositions de Maud Geffray, moitié de Scratch Massive. Comment avez-vous choisi la bande-son du film?
On voulait une bande son éclectique, et Aurore Meyer Mahieu nous a fait des propositions pour chaque moments musicaux.
Aviez-vous des références pour ce film ? Et plus largement, quels sont les films ou réalisateurs qui ont compté dans votre parcours ?
Lila Pinell : Billy Wilder, Rohmer, Pialat, De Palma, Jacques Demy, Wiseman, plein de choses différentes!
Chloé Mahieu : Billy Wilder, Jacques Demy, Claude Miller, Mike Nichols, Cassavettes, Barbet schroeder, les frères Farrely, Woody Allen, Andrea Arnold... et beaucoup d'autres qui m'ont marqué enfant et plus récemment.
La bande-annonce de Kiss & Cry :