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    Nemesis : Christophe Deroo raconte l'aventure de son premier film
    Corentin Palanchini
    Passionné par le cinéma hollywoodien des années 10 à 70, il suit avec intérêt l’évolution actuelle de l’industrie du 7e Art, et regarde tout ce qui lui passe devant les yeux : comédie française, polar des années 90, Palme d’or oubliée ou films du moment. Et avec le temps qu’il lui reste, des séries.

    "Nemesis", le film fantastique de Christophe Deroo est disponible en VOD. Un film volontairement étrange, qui parle de notre époque. Rencontre avec son réalisateur, qui signe-là son premier long métrage.

    Condor Entertainment

    Rencontré au dernier Festival de Gérardmer, le réalisateur français Christophe Deroo a accepté de s'assoeir avec nous pour évoquer son premier long métrage de réalisateur : Nemesis (Sam Was Here), qui vient de sortir en VOD.

    L'histoire : Représentant de commerce, Sam Cobritz est envoyé faire du porte à porte dans la région désertique du sud de la Californie. Après n’avoir croisé que des maisons vides et des portes closes, Sam doit se rendre à l’évidence, les habitants ont disparu. Sur le chemin du retour, les événements troublants se multiplient : sa voiture a été sabotée, d’inquiétants messages de menace lui parviennent et la police le prend en chasse. Seul, dans l’inconnu, pourra-t-il s’extirper du piège qui semble se refermer sur lui ?

    AlloCiné : Il s'agit de votre premier film, quel a été votre parcours avant de passer à la mise en scène ?

    Christophe Deroo : J'ai une formation d'arts plastiques car je voulais faire du dessin animé, puis la passion du cinéma m'a rattrapée, et je me suis orienté vers une fac de cinéma. Sauf qu'on faisait beaucoup de théorie mais qu'on ne pratiquait pas. (...) Je n'avais jamais touché une caméra avant l'âge de 20 ans, donc ça me démangeait beaucoup d'essayer. J'ai donc fait une école privée de cinéma dans laquelle ça s'est bien passé, et j'ai pu apprendre la technique de la lumière. (...) Devenir réalisateur est un peu compliqué donc pour rester dans le milieu je suis devenu chef opérateur de publicités et de films institutionnels. A la suite de ça j'ai fait 3 courts métrages qui ont plutôt bien tourné, et je suis passé au long.

    Et l'un de ces courts métrages a inspiré Nemesis, il s'appelait "Polaris". Pourquoi ce titre ?

    Polaris est le nom donné à la lumière rouge dans le ciel [sorte de fil rouge de "Nemesis", NdlR], elle n'était pas sous cette forme dans le court métrage (...), elle était beaucoup plus nébuleuse et abstraite.

    KuroKitsu

    Pourquoi avoir choisi ce court métrage-là pour en faire un long ?

    Mon film est vraiment un micro budget, 150 000 euros, et tourné en 12 jours. Il ne faut donc pas trop de comédiens, pas trop de décors, (...) et j'avais encore des petites choses à ajouter pour agrandir l'univers de "Polaris" donc l'idée du long métrage s'est imposé. Le choix du script est lié à la contrainte financière.

    Si des gens lisent cet entretien et cherchent à financer leur premier film, pouvez-vous expliquer comment vous vous êtes retrouvés sur une coproduction américaine ?

    En réalité, nous ne sommes pas coproducteurs avec les Etats-Unis, nous sommes un film français tourné aux Etats-Unis. Seul l'acteur principal et le décor sont américains. Même la production exécutive sur le tournage était française.

    Vous avez importé votre équipe aux Etats-Unis...

    C'est ça. On avait fait des repérages à un endroit pour le tournage de Polaris, et nous avions quelques petits contacts sur place, donc nous savions qu'il serait possible de tourner là.

    KuroKitsu

    Et comment avez-vous arrêté votre choix sur Rusty Joiner, qui est un bon acteur mais pas non plus le plus connu : pourquoi lui ?

    C'est l'agence CAA qui nous a conseillé de prendre ce comédien. Au début, quand on a vu son profil, ce n'était pas du tout ce que nous recherchions. Nous voulions quelqu'un de plus commun, de plus chétif. (...) Mais nous l'avons quand même rencontré et c'était la personne la plus motivée pour le rôle, ce qui m'a fait bonne impression. Et surtout, c'était le meilleur comédien.

    Surtout qu'il est présent tout le film, donc il faut les épaules solides pour ça...

    Oui, pour moi [qu'il soit bon comédien] était très important. Et puis finalement, je me suis dit qu'il ajouterait à l'étrangeté du film. Car comme on se demande tout le film s'il a commis les actes dont on l'accuse, avoir quelqu'un de musclé créait davantage le doute : on se dit [qu'il] pourrait être dangereux finalement.

    La radio du personnage d'Eddy, qui diffuse tout au long du film, m'a fait pensé à une sorte d'organe de propagande, qui tente petit à petit de pousser les gens à faire des choses qu'ils ne feraient pas autrement.

    Ah bien sûr, évidemment je voulais faire un film fantastique un peu étrange, mais le sous-texte pour moi fait écho à tout ce qui se passe avec Twitter ou les personnes des forums. (...) On sent qu'il s'agit de petites piles de haine qui s'accumulent et qui peuvent devenir un peu énorme. Pour être honnête, l'idée m'est venue après avoir vu un documentaire sur le harcèlement sur internet. Et à un moment, on interviewe des gens qui ont poussé au suicide quelqu'un, on leur demande pourquoi et ils répondent "je ne sais pas". Il y a quelque chose de pulsionnel (...), et ça me terrifie car il n'y a pas de conviction derrière. (...) Les gens répètent, répètent et personne ne revient au départ. C'est ce dont je voulais parler dans le film, sans le mettre dans un contexte actuel pour éviter le côté "pamphlet".

    Condor Entertainment

    Malgré ce sous-texte sombre, il y a une lumière dans le film : celle dans le ciel oui, mais aussi une très très belle photo et une bande son électro un peu folle. Pourquoi avoir choisi le groupe Christine ?

    Je suis un grand amateur de John Carpenter, et le groupe s'appelle comme ça en référence au film de Carpenter donc très vite, la production qui connaissait le groupe nous a mis en relation. Je voulais que le film reste dans un charme un peu suranné, avec une influence à la Quatrième dimension. (...) J'ai l'impression que les gens sont plus sensibles à la fable qu'à l'attaque frontale (rires) !

    Et après "Nemesis" ?

    J'ai signé pour deux autres films français si on arrive à les monter : une adaptation dans l'univers d'H.P. Lovecraft et un thriller à la Réunion, dans la jungle, avec des volcans et une secte un peu animiste. Je n'ai pas écrit le scénario, mais j'ai demandé à ce qu'une bonne partie soit réécrite.

    "Nemesis (Sam Was Here)" est disponible en VOD :

     

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