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    Kuzco a 15 ans : comment l’empereur mégalo a bouleversé les studios Disney
    Thomas Imbert
    Thomas Imbert
    -Chef de rubrique - Infotainment
    De la Terre du Milieu aux confins de la galaxie Star Wars en passant par les jungles de Jurassic Park, il ne refuse jamais un petit voyage vers les plus grandes sagas du cinéma. Enfant des années 90, créateur des émissions Give Me Five et Big Fan Theory, il écrit pour AlloCiné depuis 2010.

    Alors qu’il vient de fêter ses 15 ans, retour sur la production mouvementée de "Kuzco, l’empereur mégalo", connu pour être l’un des longs métrages les plus drôles de Disney, mais aussi pour avoir considérablement bouleversé l’histoire du studio…

    The Walt Disney Company France

    Des personnages hauts en couleurs, un style cartoonesque à des kilomètres de tous les standards Disney, un véritable défilé de répliques inoubliables et de scènes hilarantes : pour de nombreux afficionados, Kuzco, l’empereur mégalo est sans aucun doute LE plus drôle de tous les classiques jamais réalisés par le studio aux grandes oreilles.

    Difficile en effet de réprimer quelques éclats de rire devant les mésaventures de cet empereur inca imbu de lui-même et égoïste jusqu’au bout des ongles, transformé en lama par son abjecte conseillère Yzma "qui fait peur sans le faire exprès" et par son garde du corps Kronk, expert en gastronomie et en langage des écureuils.

    Largué dans les salles obscures en mars 2001, Kuzco ouvre un nouveau chapitre dans l’histoire des studios Disney et se démarque radicalement de la norme établie dans les années 90 : chansons, contes de fées, histoires à l’ampleur légendaire…

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    Et pourtant… L’empereur mégalo se destinait au départ à une toute autre carrière. En effet, il a bien failli suivre les traces de ses grands frères et s’imposer comme un nouveau conte épique, dans la droite lignée du Roi Lion ou de La Petite Sirène.

    Mis en chantier en 1994, le projet est chapeauté par Roger Allers, dont le Roi Lion vient tout juste d’être triomphalement couronné dans les salles obscures. Sa nouvelle idée : une relecture du célèbre conte de Mark Twain, "Le Prince et le Pauvre", mais avec un empereur inca et son modeste sujet. Le futur classique des studios Disney a pour titre… Le Royaume du Soleil.

    Dans la première version du script, l’empereur Manco (qui sera plus tard rebaptisé Kuzco) fait la connaissance de Pacha, un humble paysan qui lui ressemble comme deux gouttes d’eau. Les deux personnages échangent leurs places pour découvrir la vie de l’autre, mais la sorcière Yzma en profite pour transformer Manco en lama et utilise Pacha pour son plan diabolique : supprimer le soleil, dont les rayons lui auraient subtilisé sa jeunesse et sa beauté.

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    A cette époque, il n’y a pas de classique Disney épique et romantique qui vaille sans une bande originale composée de chansons inoubliables. Alors qu’Elton John avait signé les désormais mythiques "Hakuna Matata" et "L’Amour Brille sous les Etoiles" du Roi Lion, c’est désormais au chanteur Sting que Roger Allers décide de faire appel pour mettre en musique son "Royaume du Soleil".

    L’artiste se met à l’ouvrage et compose 6 chansons. L’une d’entre elle, censée accompagner le personnage d’Yzma dans la séquence où elle prépare son plan machiavélique, rappelle les traditionnelles chansons de méchants que l’on a pu trouver dans La Petite Sirène, ou plus tard dans La Princesse et la grenouille :

    De leur côté, les animateurs Disney partent en repérage au Pérou, affuter leurs crayons et leur imagination sur de véritables sites incas. Pourtant, tous ces efforts ne suffisent pas à empêcher les nombreux soucis de production qui s’abattent bientôt sur "Le Royaume du Soleil".

    Arrivé à une impasse, Roger Allers se voit imposer de nouveaux délais plus que rigoureux et un co-réalisateur, Mark Dindal. C’est à ce moment-là que tout bascule : incapable de s’entendre avec Dindal, Rogers finit par quitter le projet. Son ex-coéquipier reprend le flambeau seul et le projet se retrouve complètement remanié selon sa vision des choses. "Le Royaume du Soleil" devient Kuzco, l’empereur mégalo, et l’aventure musicale se transforme en comédie déjantée. Le script est sensiblement remanié et la BO de Sting déclarée obsolète. Le chanteur se voit obligé d’écrire deux nouvelles chansons et ses 6 précédentes créations sont reléguées (dans le meilleur des cas) au rang de bonus DVD.

    Quelques mois de travail plus tard, la nouvelle version de Kuzco, l’empereur mégalo est enfin prête à sortir mais est loin de convaincre tout le monde : Michael Eisner, alors PDG de Disney, déclare détester le résultat final et ne lui accorde qu’un budget communication extrêmement limité.

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    Malgré ça, Kuzco, l’empereur mégalo s’offre un joli petit succès au box-office, couronné par des critiques enthousiastes. Mais si les spectateurs qui écrasent des larmes de rire à la sortie des salles obscures sont nombreux, certains détracteurs du film le considèrent encore aujourd’hui comme la première page d’une période de disette créative aux studios Disney, et comme le point final de l’âge d’or des années 90.

    L’argument principal de cette analyse s’appelle "The Sweatbox", un documentaire réalisé par Trudie Styler (l’épouse de Sting) pendant la production de Kuzco, et dont le titre (littéralement, "boîte à sueur") s’inspire de l’étouffante salle de projection où les membres de l’équipe du film présentaient leurs travaux aux dirigeants du studio dans une atmosphère pour le moins tendue.

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    Le film, qui dévoile les coulisses de la production houleuse de Kuzco et qui prédit la fin de la suprématie Disney, devient rapidement une bête noire pour les dirigeants du studio en fonction au début des années 2000. Après quelques rares projections en festival, "The Sweatbox" est donc retiré du circuit. Encore aujourd’hui, il est impossible de le visionner légalement, et si certains liens pirates subsistent sur la toile, de nombreux efforts ont été faits pour rayer définitivement le documentaire de la carte.

    Depuis, de l’eau a coulé sous les ponts, et même si les années 2000 se sont effectivement révélées assez compliquées pour le studio aux grandes oreilles (des films tels que La Ferme se rebelle ou Chicken Little n’ont pas vraiment laissé une empreinte indélébile, et le passage au CGI n’a pas été des plus faciles), Disney a fini par renaître littéralement de ses cendres. La terrible mésaventure du "Royaume du Soleil" n’est plus qu’un mauvais souvenir, et sous la houlette de John Lasseter (nouveau directeur artistique du studio), les studios Disney se sont lancés dans un nouvel âge d’or : peut-être le plus important de leur histoire si l’on en croit les récents chiffres au box-office de La Reine des Neiges, des Nouveaux Héros ou de Zootopie.

    (Re)découvrez "Kuzco, l'empereur mégalo"...

     

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