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    Mystères à Hollywood : quand l'envers du décor devient sordide...
    Olivier Pallaruelo
    Olivier Pallaruelo
    -Journaliste cinéma / Responsable éditorial Jeux vidéo
    Biberonné par la VHS et les films de genres, il délaisse volontiers la fiction pour se plonger dans le réel avec les documentaires et les sujets d'actualité. Amoureux transi du support physique, il passe aussi beaucoup de temps devant les jeux vidéo depuis sa plus tendre enfance.

    Si Hollywood est une machine à créer du rêve, l'envers du décor et parfois peu reluisant. Voire même carrément sordide, avec son lot d'affaires parfois criminelles non résolues. Plongée dans les bas-fonds de la cité des anges...

    Karyn Kupcinet, glamour...à mort

    Qui était-elle ?

    Fille d'un journaliste au Chicago Daily Times et animateur TV très connu, Irv Kupcinet, Karyn Kupcinet né en mars 1941. Sa trajectoire en tant qu'actrice est éphémère. Après un passage à l'Actors Studio à New York et encouragée au métier d'actrice par sa mère, elle décroche grâce à Jerry Lewis, un ami de son père, un petit rôle dans Le Tombeur de ces dames, en 1961. Ses (petits) rôles se font surtout à la TV, comme dans The Gertrude Berg ShowHawaiian EyeThe Wide Country, Going My Way, un autre petit rôle dans Perry Mason...

    L'affaire

    Elle meurt à 22 ans, le 28 novembre 1963. Son corps est découvert deux jours plus tard à son domicile de West Hollywood par un couple d’amis. La porte d’entrée est ouverte, la lumière et la télé sont allumées; son corps repose nu sur un canapé. Après examen du corps, la Police découvre des signes de décomposition. Des fluides s'échappent de la bouche, du nez et des orbites. Dans la maison, on retrouve beaucoup de médicaments.

    Le lendemain, le Dr. Harold Kade, médecin légiste du comté de Los Angeles, établit la cause du décès : meurtre par strangulation, l'os hyoïde situé au niveau du cou étant brisé.

    Les théories

    Il existe plusieurs pistes autour de l'affaire Karyn Kupcinet. La première fait la joie des partisans des théories conspirationnistes liées à l'assassinat de JFK, le 22 novembre 1963, quelques jours à peine avant la découverte du corps de l'actrice. Selon William Penn Jones, un des premiers à avoir enquêté sur l'assassinat de JFK (et au passage consultant sur le film d'Oliver Stone...), le père de Karyn Kupcinet était une vieille connaissance du mafieux Jack Ruby, depuis les années 1940;  celui qui assassina Lee Harvey Oswald. Parmi les nombreux indices de l’affaire Kennedy figure un mystérieux appel anonyme à destination de la police de Dallas.

    Dans un ouvrage publié en 1966 ("Forgive My Grief"), William Penn Jones écrit : "Quelques jours avant l’assassinat de JFK, Karyn Kupcinet, 22 ans, essaya de téléphoner depuis la région de Los Angeles. L’opératrice des appels longue distance entendit Miss Kupcinet hurler au téléphone que le Président Kennedy allait être assassiné. Miss Kupcinet fut trouvé morte dans son appartement 2 jours après l’assassinat [de Kennedy, soit 8 jours en fait]". Sa thèse est que la victime eut vent du complot pour tuer Kennedy par son père; elle tenta de prévenir les autorités mais fut réduite au silence. Une version reprise dans le film JFK d'Oliver Stone, ce qui força la famille à protester officiellement contre ces allégations en 1991.

    Une autre version est défendue par James Ellroy, et fit grincer des dents. Dans une article écrit pour le magazine GQ américain en 1998 sous le nom de Glamour Jungle, il trouve des incohérences dans la version développée par Penn Jones. Il ne s'explique pas par exemple pourquoi Karyn Kupcinet a effectué un trajet de 50 km pour passer ce coup de fil. Mais, surtout, il insiste sur la personnalité de la victime. Destructrice, droguée, hantée par les angoisses de prise de poids qu'elle combat avec des cachets, elle prend régulièrement des cocktails potentiellement mortels de médicaments. Elle est en outre dépressive, car vit mal la rupture avec son petit ami, Andrew Prine, qu'elle a rencontré sur le tournage de la série The Wide Country.

    Pour aller dans ce sens, la Police révéla que Karyn Kupcinet avait fait l'objet de menaces de mort anonymes, écrite à partir de lettres découpées dans les journaux. Mais l'enquête révéla à ce sujet que l'auteure n'était autre que Karyn Kupcinet elle-même, après analyse d'une empreinte. En visite chez des amis pour dîner quelques jours avant le drame, elle leur affirma avoir trouvé un bébé abandonné sur le pas de sa porte. Des affirmations qui relevaient de la pure affabulation.

    Bestimage

    Ellroy explique également que le shériff trouva chez la victime posé sur une table un livre plus ou moins ésotérique, qui recommandait de danser nu afin de se désinhiber et expliquait comment faire...Ce qu'aurait mis en pratique Karyn Kupcinet, droguée, avant de (mal) tomber et se briser l'os hyoïde sur une chaise. Une hypothèse en plus, qui s'ajoute à celle d'un suicide par overdose médicamenteuse.

    Le brillant auteur porte même l'estocade, en pointant carrément le médecin légiste, le Dr. Harold Kade. Il est même lapidaire : "À la brigade du Sheriff, plusieurs officiers pensent qu’il ne s’agit même pas d’un meurtre […] Le Dr Kade était un alcoolique. On l’a tiré du lit à 2h du matin pour l’autopsie. Tout ce qu’il a trouvé, c’est la fracture de l’os hyoïde. Il se pourrait bien qu’il l’ait brisé lui-même".

    Où on est-on ?

    L'affaire Kupcinet souleva une énorme émotion, survenant quelques jours à peine après l'assassinat de Kennedy. Les thèses développées par James Ellroy, quoique très probables pour expliquer le mal-être de l'actrice, n'ont pas permises la réouverture du dossier. La thèse officielle, soutenue par la famille de la défunte, est qu'il s'agit toujours d'un assassinat, non résolu.

    Le père de Karyn avait le bras très long : on compta plus de 1500 personnes à ses obsèques, dont le Gouverneur de l'Etat de l'Illinois, Otto Kerner Jr, et le maire de Chicago, Richard J. Daley. Pas mal pour une actrice à la carrière aussi éphémère.

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