© BBC (British Broadcasting Corporation)
C'est le rendez-vous que les sériephiles se donnent tous les deux ans : la série britannique Sherlock, interprétée par Benedict Cumberbatch et Martin Freeman, est en effet un succès critique et public à travers le monde entier. Pour discuter de la troisième saison, actuellement en cours de diffusion sur France 4, nous sommes allés à la rencontre de Steven Moffat, le co-créateur du programme et également showrunner de Doctor Who.
Attention SPOILERS : des références aux deux premiers épisodes la saison 3, déjà diffusés sur France 4, sont présentes dans les propos ci-dessous.
Quelle est la nouvelle dynamique du duo Watson / Sherlock ? Leur relation a-t-elle évolué depuis leur séparation ?
Steven Moffat : Je ne sais pas si leur amitié est véritablement différente. Je pense même que depuis leur rencontre, rien n’a changé et leur duo est resté très stable malgré leurs personnalités très différentes. Bien entendu, John en veut à Sherlock de lui avoir menti mais ils redeviennent très vite amis, comme avant.
La saison 3 s'ouvre sur une scène proposant une explication loufoque à la chute de Sherlock. Etait-ce une façon de se moquer des nombreuses théories postées sur internet ?
En aucun cas nous nous ne voulions nous moquer de nos fans, nous souhaitions simplement rire un peu en soumettant cette théorie et en voyant combien de temps cela prend pour réaliser qu’il s’agit d’un gag. Mais nous ne voulions pas nous moquer des téléspectateurs, ce serait même très irrespectueux de notre part. Je suis au courant des théories publiées sur internet mais je ne les ai pas lues et donc ne m’en suis pas inspiré, contrairement à ce qui a pu être écrit dans la presse.
© BBC (British Broadcasting Corporation)
Au fil des épisodes, le personnage de Sherlock s’humanise et semble accepter d’exprimer ses émotions. Découvre-t-on une nouvelle facette du détective ?
On ne peut parler de nouveauté pour un personnage qui existe depuis cent ans ! Dans les histoires originales, Sherlock est un personnage froid et antipathique qui devient au fur et à mesure héroïque et attachant. Au fil du récit, il dévoile ses émotions mais cela ne le rend pas forcément meilleur. Dans cette saison, il démontre qu’il est capable du pire et notamment d’utiliser les sentiments des autres pour mieux les manipuler. C’est l’essence même de la mythologie de Sherlock Holmes. Si l’on se replonge dans les autres adaptations, notamment celles avec Basil Rathbone, on peut constater que le personnage est gentil dès le début alors que nous avons choisi de montrer comment son évolution. Pour moi "gentil" n’est pas le bon mot, il reste froid et dangereux mais il lui arrive aussi de s’attacher à certaines personnes.
Une rumeur avait évoqué la possibilité de diffuser un épisode spécial dès cet hiver. Cela avait été ensuite démenti. Avez-vous des informations concernant la diffusion des prochains épisodes ?
Nous tournerons dès que Benedict et Martin seront disponibles. Cela ne dépend pas de nous mais de leur emploi du temps. L’écriture ne débutera que dès que nous aurons la confirmation du tournage. Nous avons certes déjà des idées sur ce que nous voulons faire mais Mark Gatiss et moi-même sommes déjà accaparés par nos propres projets, notamment Doctor Who, et je n’ai pas pour habitude d’écrire quelque chose sans savoir quand nous allons le tourner.
Parce que la production de la série se fait tous les deux ans, vous avez déclaré au cours d’une interview que son écriture vous laisse du temps pour vous consacrer à d’autres projets, et par conséquent qu'elle pourrait encore durer de nombreuses années. Combien de saisons pensez-vous écrire au total ?
Aucune idée, sincèrement. Ce ne sera la décision ni de moi ni de Mark (Gatiss) ou de Sue (Vertue, son épouse et productrice de la série) mais cela viendra forcément de Benedict (Cumberbatch) ou Martin (Freeman). Nous continuerons à nous retrouver de la sorte tous les deux ans pour tourner des épisodes tant qu’on nous laissera le faire. Aucun de nous n’a un plan sur la durée concernant l’avenir de la série.
© BBC (British Broadcasting Corporation)
Qu'en est-il de votre participation sur Doctor Who qui semble plus incertaine, notamment depuis vos propos ayant semblé indiquer que votre départ était proche. Qu’en est-il réellement ?
Je regrette de l’avoir dit car cela a mal été interprété mais ce que je voulais dire en réalité c’est qu’avec Sherlock, le tournage occasionnel de la série ne me prend pas tout mon temps et me permet de travailler sur d’autres choses. Par conséquent, je peux envisager de travailler dessus indéfiniment. En revanche, dans le cas de Doctor Who, il s’agit d’un travail à temps plein sur lequel je travaille constamment. Mais je n’ai pas l’intention de partir, j’adore faire ça et tant que cela sera le cas, je vais continuer. Donc rassurez-vous, je ne vais pas quitter la série.
Avez-vous déjà été contacté par les chaînes américaines pour développer une nouvelle version d’un de vos programmes ?
Doctor Who ne peut être adapté, car c’est un programme typiquement britannique et cela ne pourrait marcher autrement. La série connait d'ailleurs un certain succès aux Etats-Unis et la confronter à une autre version serait complètement idiot. Nous avons également eu plusieurs sollicitations pour adapter Sherlock aux Etats-Unis, y compris de la part de CBS assez ironiquement*. Nous les avons toutes refusées car nous voulions faire notre propre version sans avoir à nous confronter à nous-même.
*CBS est la chaîne qui diffuse Elementary, une autre version moderne des célèbres aventures de Sherlock Holmes.
Propos recueillis par Clément Cusseau
