Les séries noires ont trouvé leur "Alibi"

Pour son dernier numéro, le magazine trimestriel d’investigation Alibi consacre un dossier de plus de 20 pages aux séries. "The Wire", "The Shield", "Justified"… A travers plusieurs articles, portraits ou interviews, le magazine dédié à l'univers du Noir se plonge dans les lignes de séries écrites comme des polars, sombres et intenses à la fois...

"Alibi, vous en aurez tous besoin un jour"... Tel est la catchphrase bien trouvée d'Alibi*, magazine trimestriel d'investigation lancé en janvier 2011. Bien entendu vous n'y trouverez pas des astuces pour consolider vos alibis et assurer vos arrières en cas de meurtres MAIS si vous êtes fan de polar, d'enquêtes et de tout ce qui touche à l'univers du Noir, ce magazine devrait faire votre bonheur. Mêlant subtilement la fiction à la non-fiction à travers des rubriques originales, entrecoupées d'interviews, de portraits, de reportages et de textes publiés en exclusivité, Alibi parle donc littérature, forcément, mais aussi de cinéma, de télévision et de tout ce qui fait l'actualité du crime, des véritables criminels aux figures inventées. Un beau magazine-livre, dont le format souple et pratique ressemble à celui d'un graphic-novel, à découvrir surtout lorsqu'on sait que le dernier numéro, le sixième, propose un beau focus sur les séries noires comme The Shield ou The Wire....

Disponible depuis le 04 avril en librairies, ce numéro sous-titré "Séries noires, l'assassin se cache dans le poste" consacre plus de 20 pages à ces séries qui nous immergent dans le monde du crime. A travers plusieurs articles est donc analysé ce genre qui ne cesse d'innover et qui, très souvent, a bénéficié des plumes aguerries de grands auteurs du polar. Pour preuve, l'introduction, qui aborde l'engouement généré par les séries et la qualité grandissante des scénarios, est entrecoupée d'interventions des brillants George Pelecanos, Dennis Lehane ou Dominique Manotti. On entre ensuite dans le vif du sujet en compagnie d'autres grands talents du genre. C'est ainsi qu'on pénètre d'abord dans l'antre de The Shield, avec celui qui a inventé le flic le plus bordeline du petit écran, le créateur d'une des séries les plus noires de la télé : Mr Shawn Ryan, que l'article nomme très justement le "disciple de James Ellroy à Hollywood." Le dossier comporte également un autre portrait, celui de Wendell Pierce, le Bunk de The Wire, incarnation du "good police" de Baltimore, que David Simon a rappelé sans surprises pour rejoindre Treme. C'est ensuite au tour de Graham Yost, le créateur de Justified, de nous faire partager sa passion pour Elmore Leonard, l'auteur dont il s'est inspiré pour construire Justified.

Peu abordées dans le dossier - qui ne pouvait de toute façon pas couvrir toutes les séries noires - les séries françaises ne sont pas non plus absentes. C'est Engrenages qui a le privilège d'être l'élue de la sélection, puisqu'un reportage nous emmène dans les coulisses de la prochaine saison de ce show français qui pourrait s'exporter prochainement aux Etats-Unis. On ne saurait oublier l'excellent article consacré à la bonne santé, presque indécente, de la production anglaise. Des enquêtes d'Hercule Poirot à la génération Luther/ Sherlock, les Anglais ont en effet toujours compris les ressorts du crime et comment ils pouvaient les exploiter intelligemment via le petit écran. Sans copier les Américains pour autant. Pour finir en beauté et éveiller encore plus notre curiosité, le dossier s'achève sur deux articles bien insolites. L'un sur une série colombienne sur le monde des narcos, Sin tetas no hay paraíso, l'autre sur l'importance de la musique dans Derrick ! Qui l'eût cru ?

_{DOSSIER SERIES NOIRES - Le Sommaire}

_Contexte

_{Midwest Confidential - Portrait de Shawn Ryan, le créateur de The Shield}

_{Au nom d'Elmore - Entretien avec Graham Yost, créateur de Justified}

_{L'autre face de l'Amérique - Rencontre avec Wendell Pierce de The Wire}

_{Scène de police ordinaire - Sur le tournage d’Engrenages}

_{Crème anglaise - Panorama des séries policières britanniques}

_{Pas de seins, pas de copains - Focus sur la télénova colombienne Sin tetas no hay paraíso}

_{Derrick, geyser de musiques - Le cocktail sonore qui accompagnait la série}

_{A voir avant de mourir - Les quatre séries indispensables}

Le reste de ce numéro vaut aussi le coup d'oeil, notamment le panorama consacré aux jeunes auteurs prometteurs de polars, la nouvelle rubrique "Ca ferait un bon film", la rencontre avec un amateur du genre (Antoine de Caunes), les portraits/interviews de plusieurs auteurs dont Deon Meyer mais aussi d'inconnus qui vivent le crime au quotidien (comme une entomologiste qui date la mort d'un cadavre grâce à l'étude des insectes !). Dans ce numéro, les lecteurs pourront également découvrir un texte inédit du mexicain Paco Taibo II mais aussi des focus sur la Kalachnikov, la lecture en prison, le poids des policiers et la véritable histoire de la Dodge de Shérif, fais-moi peur ! Car même si Alibi ne consacre pas tout le temps un dossier spécial aux séries, le magazine introduit à chaque fois des articles qui touchent à la culture télévisuelle. Dans ce numéro précis justement, en marge du dossier Séries Noires, deux articles se penchent sur le petit écran : un zoom sur Borgen, une femme au pouvoir et une recette : "L’osso Bucco de Richard Castle". Richard Castle, l'auteur de romans noirs a, lui aussi, plus d'un tour Alibi dans son sac.

Raphaëlle Raux-Moreau

* Alibi est disponible en librairies, dans les Fnac, Virgin et Relay au prix de 15 € TTC