Ce vendredi 25 mars, France 2 proposera aux téléspectateurs de découvrir les trois premiers épisodes de la première saison d’Empreintes criminelles , sa série "policière historique". L’histoire est centrée sur une équipe d’experts de la police scientifique des années 20, dirigée par Julien Valour (incarné par Pierre Cassignard), ayant la volonté de résoudre des crimes en imposant de nouvelles méthodes modernes : des pionniers donc, qui tentent de faire survivre cette unité constamment remise en cause par la police dite "classique". L’équipe d’experts, constituée dans le pilote, a à résoudre deux enquêtes par épisode, ce qui n’est pas sans rappeler Les Experts. C’est une influence clairement assumée puisque la série est présentée comme un croisement entre la franchise américaine et Les Brigades du Tigre.
Le concept de la série en lui-même est intriguant. On peut se demander par exemple pourquoi avoir choisi les années 20 comme cadre des intrigues : à première vu, la réponse serait peut-être pour se démarquer des Experts. Mais Lionel Olenga, directeur de collection et co-scénariste des deux premiers épisodes, nous apporte d’autres éléments de réponse : "Si l’on regarde historiquement, la première tentative de police scientifique se passe à Lyon, dans les années 1890, 1895. C’était vraiment les balbutiements. Et pour le coup les années folles nous paraissait être la période idéale pour parler de plus de choses. Il y a avait un univers plus riche en terme de mœurs, en terme de société qui évoluait, c’était après la première guerre mondiale, ce qui nous paraissait plus intéressant." Pour lui, Empreintes criminelles est "une série policière avec un environnement historique et non pas une série historique avec un vague environnement policier". Elle propose un angle différent en instaurant un décalage, par l’ambiance musicale moderne via des choix musicaux contemporains (Massive Attack, Lily Allen, Placebo…), mais également par les tenues vestimentaires : "Les personnages ont un look un petit peu décalé qui pourrait se rapprocher de La Ligue des Gentlemen Extraordinaires ou, même si c’est sorti pendant qu’on était en train de tourner, Sherlock Holmes. Il y a une vraie volonté de décalage qui a été décidée très tôt. On aurait pu faire une série se situant dans les années 20, avec une musique des années 20, avec un style des années 20, mais nous voulions vraiment faire autre chose."
Le décalage lié au modernisme se retrouve également dans la psychologie des protagonistes avec des personnages tels que Lea Perlova (Julie Debazac) l’experte scientifique au look de garçonne, indépendante et féministe, ou Pauline Kernel (Cassandre Vittu) la bourgeoise soumise à son mari, qui se rebelle et fait ses premiers pas en tant que médecin légiste : "C’est là où c’est un peu complexe. On a des personnages qui sont à la fois dans les années 20, des pionniers en décalage avec leur époque, mais dans le même temps, il ne fallait pas les faire trop moderne, sinon on aurait juste une série qui se passe dans les années 20 mais avec des personnages qui se comportent comme on se comporterait nous", explique Olenga. L’effet est plutôt réussi. La série réunit une galerie de personnages intéressants que l’on découvre au fil des épisodes : "On voulait essayer en ce qui concerne les personnages de ne pas tout expliquer et de ne pas tout donner tout de suite, mais plutôt au fur et à mesure, et de laisser les gens parfois deviner. Pour les intrigues policières, on essaie d’être clair, on donne des explications pour qu’on comprenne qui a commis le crime. Côté personnages, il y a tout un tas de choses qu’on met un peu en place et qu’on doit découvrir petit à petit : qui ils sont, leurs failles." Le fil conducteur est sans conteste la relation entre les deux personnages à la personnalité la plus forte, les deux "leaders" qui se livrent à un combat de coq : on a d’un côté le chef de l’équipe, Julien Valour (Pierre Cassignard), un professionnel aux méthodes avant-gardistes, obsédé par la justice, mais ayant également une faille qui le ronge littéralement. Et de l’autre, Pierre Cassini (Arnaud Binard), un policier plus classique, plus dur aussi, à la personnalité plus complexe qu’il n’y paraît.
Bien qu’assumant des influences extérieures, la série revendique une identité propre, qui passe notamment par l’image : "On ne voulait pas une image qui soit la même que dans toutes les séries, très lisse. On n’avait pas peur de mettre des scènes dans l’ombre, d’ajouter une vraie atmosphère. L’idée c’est que lorsque l’on regarde un épisode, on sait que l’on est dans notre série. Il y a une identité visuelle, qui passe par les costumes, la lumière, la musique, qui sont les nôtres. Les séries américaines ont leur propre univers : si on regarde Les Experts : Miami, Les Experts : Manhattan où Les Experts Las Vegas, quasiment en quelques images on sait dans quelle série ont est, parce qu’elles n’ont pas le même éclairage, pas la même luminosité. On avait envie aussi d’avoir un univers visuel qui soit le nôtre." Le générique se veut également différent de ce qui se fait : "Il y a quelque chose visuellement d’intéressant et qui fait que l’on se dit qu’il y a un effort qui est fait de ce côté-là. Trop souvent dans les fictions françaises, le générique consiste à mettre une liste de noms, avec vaguement une musique dessus, sans rechercher ni fond ni forme. Là il y a eu un peu de recherche qui a été fait, avec le côté voyage dans le temps, invitation à aller dans le passé." De quoi attirer un plus large public : "Je me suis dit quand on m’a proposé cette série que là où c’est malin, c’est qu’il y a une telle différence d’univers, qu’effectivement un amoureux des Les Experts peut y trouver son compte. Ce n'est pas juste un copier-coller. On a quelque chose en plus qui est l’aspect historique, le tout début, le fait que personne ne les croient alors que dans Experts, ils ont quand même une notoriété et des résultats qui font qu’ils sont établis. C’était intéressant pour nous d’aller dans le "ils peuvent se tromper". Parce qu’effectivement ils débutent, et commettent donc quelques bourdes."
Empreintes criminelles est au final un ensemble de choix audacieux qui en font une bonne série, qui vaut le détour, même si loin du modèle américain. Mais saura-t-elle convaincre le public ? Lionel Olenga a bien conscience du challenge que cela consiste : "C’est très difficile d’arriver en tant que série policière française car on part avec un boulet, un a priori. Mais il faut que l’on arrive à faire savoir ce que l’on est, c’est pour ça qu’on a une identité visuelle qui est quand même différente". Les personnages mériteraient d’être développés dans une saison 2, dont l’écriture a d’ailleurs déjà débuté, mais cela dépendra des audiences : difficile donc, France 2 ayant décidé de ne consacrer que deux soirées en tout et pour tout à la diffusion de la première saison (qui compte 6 épisodes). Et quand bien même le feu vert serait donné, les épisodes ne pourraient être livrés avant un bon moment. Mais Lionel Olenga se veut optimiste et y croit malgré tout : "Que les gens viennent et n’aiment pas, ils repartent. Mais le pire je pense, serait d’avoir une série où les gens ne viendraient même pas, parce qu’ils ne savent pas qu’elle existe…" Vous êtes prévenu désormais, rendez-vous les vendredis 25 mars et 1er avril à 20h35 sur France 2 !
Boussayna Akaiz