Valeria Bruni Tedeschi et Jacques Gamblin dans Au coeur du mensonge (1999)
J'ai beaucoup aimé travailler avec Chabrol et j'aimerais beaucoup retravailler avec lui. Je souhaite ça à tous les comédiens, parce que c'est très beau de le voir travailler. Il a un univers, et puis il a un calme... C'était bizarre qu'il me propose ce rôle d'inspecteur de police, mais c'est agréable de faire des choses à contre-emploi parce que, là aussi, bizarrement on se dévoile, on découvre des choses de soi. C'est comme quand on met des chaussures très différentes de celles qu'on met d'habitude, on découvre une démarche, une façon de parler, un regard qui est différent.
Je suis devenue moins masochiste
C'est vrai que les tournages avec Claude Chabrol sont très détendus. A l'époque de Nanterre, j'avais l'idée un peu romantique qu'il fallait souffrir beaucoup pour bien travailler (1). Peut-être qu'à 20 ans, on n'a pas les mêmes besoins qu'à 40. Moi, à 20 ans, j'avais sans doute besoin d'être secouée, qu'on m'aide à me dévoiler. J'avais une envie de violence que je n'ai plus. Evidemment, tous les films doivent secouer. A un moment il faut se remonter les manches et se salir un peu les mains, on ne peut pas travailler en dormant. Mais aujourd'hui, beaucoup plus qu'avant, j'ai envie de bonheur, de joie, même dans ma vie. Avec le temps, je suis peut-être devenue moins masochiste. Je n'ai presque plus -ou très peu- de plaisir dans la douleur, et beaucoup de plaisir à l'allégresse. Je crois beaucoup au travail entre amis, en famille. Je crois que même les tournages des films douloureux de Cassavetes étaient joyeux.
(1) Parmi les bonus proposés sur le DVD d'Actrices, signalons un passionnant documentaire tourné à l'Ecole des Amandiers de Nanterre en 1988 (les élèves de Patrice Chéreau avaient pour nom (Vincent Perez, Laurent Grévill ou Agnès Jaoui). Et à la question "Qu'attendez-vous d'un metteur en scène ?", la jeune Valeria répond : "Qu'il me casse..."