Passons maintenant à "Black Snake Moan", où vous interprétez l'un de vos rôles les plus extrêmes. Vous a-t-il été difficile de créer le personnage de Rae ?
J'ai travaillé pendant dix ans avec la Rape Crisis Prevention Organisation [Organisation de Prévention contre les Traumatismes liés au Viol, ndlr] aux Etats-Unis, et j'ai étudié de près le syndrôme post-traumatique qui découle d'une aggression sexuelle, et que l'on appelle également " traumatisme du viol ". Et quand j'ai lu le script de Black Snake Moan, j'y ai découvert la meilleure et la plus honnête des descriptions d'un traumatisme lié à un viol. J'ai alors trouvé qu'il serait très courageux de jouer un personnage tel que Rae, d'autant plus que, vu ma connaissance du sujet, j'étais persuadée que personne d'autre que moi ne pouvait l'interpréter. Il a quand même fallu que je passe l'audition, et que je me batte pour l'avoir. Et quand je l'ai eu, j'ai senti que j'allais pouvoir montrer au monde le vrai visage de ces personnes qui ont besoin de compassion et de compréhension, mais qui ne l'obtiennent pas. Les gens ne comprennent pas ce par quoi elles sont passées, et les traitent, de la même façon qu'on peut le voir au cinéma, comme des traînées ou des nyphomanes. C'est donc pour que les choses puissent changer que j'ai eu envie de faire ce long métrage.
Vous aviez déclaré que ce film vous avait marquée bien au-delà du rôle que vous y interprétez. A quoi faisiez-vous référence ?
Je faisais référence à la leçon que ça a été pour moi, puisque le film a été distribué et marketé par une belle bande d'abrutis : ils ont détourné et exploité mon personnage, et présenté le film comme un porno des années 70. C'était vraiment dégoûtant, car c'était exactement le contraire de ce que j'avais essayé de faire avec tant d'acharnement, et que je sentais que ma performance valait plus que ce qu'ils en avaient fait. Ils m'ont littéralement dépossédée de ma prestation, et cet incident m'a vraiment servi de leçon, puisque j'ai décidé de ne plus m'investir de la même façon dans un rôle, sans être impliquée dans le film en tant que productrice, parce qu'en tant acteur, on a aucun contrôle. Et je refuse d'être à nouveau exploitée de la sorte.
En plus de produire vos propres films, voudriez-vous en réaliser un ?
Pas nécessairement, sauf s'il n'y a pas d'autres solutions. Mais je préfère nettement être actrice.
Comment s'est passé le tournage de la scène où vous chantez ? Ce passage a-t-il été difficile à faire ?
Non, pas vraiment. Enfin, au début, lorsque nous avons répété la scène pour la première fois, j'étais, comment dire, un peu gênée de chanter comme ça devant d'autres gens. Mais lorsque Sam [L. Jackson, son partenaire dans le film, ndlr] a commencé à chanter, Craig [Brewer, le réalisateur, ndlr] s'est exclamé : "Wow, ils sont très bons tous les deux ! Et Christina a vraiment une voix extraordinaire !" Pourtant, j'ai la voix d'un garçon de dix ans... en tout cas c'est ce que j'ai découvert au moment du tournage de cette scène (rires). Mais ça a plu aux gens, ils trouvaient ça amusant. Et du coup, je me suis dit : " Effectivement, c'est génial ! " (rires). Donc c'était plutôt amusant à faire, même si je chante mal (rires).
Au final, la scène est pourtant l'une des plus belles du film.
C'est vrai ? Merci ! Merci beaucoup.
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