Allociné : Quel effet cela fait d'avoir son livre adapté au cinema ?
Khaled Hosseini : Khaled: Et bien ce livre m'est cher vu que c'est mon premier roman. Et donc j'avais quelques résèrves et assez peur qu'Hollywood en fasse une mauvaise adaptation. Mais quand j'ai compris ce que les producteurs, qui avaient adapté le roman Un Américain bien tranquille avec succès, ainsi qu'écouter la vision du réalisateur Marc Forster, j'ai tout de suite été rassuré. Ils avaient tous vraiment un amour de mon livre et un respect pour chaque mot imprimé. Et donc je savais qu'ils allaient tout faire pour en garder l'essentiel, puisque qu'il faut couper pas mal dans un livre de ce nombre de pages. Le résultat est vraiment à la hauteur de mes espérances et ils ont su conservé l'émotion inscrit dans mon roman. Une fois que j'ai été convaincu du sérieux de leurs ambitions je les ai laissé faire ce qu'il voulait. Et c'est amusant que ce film est devenu ce qu'il est car au début le livre n'était même pas sorti et n'est devenu un best seller que petit à petit. De plus un autre aspect qui m'a emballé avec la vision de Marc Foster était qu'il voulait tourner le film dans sa langue d'origine. Tant mieux car je ne pouvais pas concevoir que l'on tourne ce film en Anglais. Surtout les dialogues entre les enfants, cela aurait été un desastre si cela n'avait pas été tourné en Afghan.
Etes vous surpris du succès du livre un peu partout dans le monde ?
Khaled Hosseini : totalement car je n'osais même pas l'époque publier ce livre. C'était mon premier roman et je le considèrait comme un essai dans le vent, sans penser à y donner suite, juste comme un apprentissage pour pouvoir m'engager sur un second livre. Au début je ne voulais même pas l'envoyer aux maisons d'édition et c'est ma femme qui m'a poussé à le faire. Et maintenant c'est vraiment un “phénomène” et c'est étonnant de voir les gens lire un peu partout mon livre, dans un aéroport, dans un café... Donc, oui, je suis toujours sous le choc. Et puis ce succès restaure en moi l'espoir que finalement, malgré la taille et l'éloignement de l'Afghanistan, que chacun de nous pouvons s'identifier à cette histoire et aux drames décrits. Cela me rappelle combien nous vivons dans un petit monde et combien nous partageons de choses en commun. Avant mon livre personne et surtout aux USA ne connaissait et ne comprenait l'Afghanistan. Le pouvoir des mots traverse toutes les frontières et réunis les hommes. Et maintenant le pouvoir de l'image continue le travail de connection et communication entre les peuples.
Selon vous quelle est la plus grosse confusion vis à vis de l'Afghanistan et cette partie du Monde ?
Khaled Hosseini : Cela ne peut venir comme question que d'un Français! Et bien il y a pas mal de confusion sur l'Afghanistan, et surtout chez les Américains. D'abord pour eux les Afghans et les Arabes c'est la même chose alors que nous venons d'origines différentes. Ils nous mettent tous dans le même sac. Egalement à l'intèrieur il y a une multitude de différentes tribus. De plus tout le monde pense qu'il n'y a que des Talibans et des ultra religieux alors que l'Afghanistan a longtemps été un pays pratiquement laïque où tout le monde venait pour le tourisme et se ressourcer, et pas mal de hippies également pour d'autres raisons évidentes. Il ya toujours une riche culture là bas et une culture qui adore l'Ouest. Les Talibans sont une minorité mais ils volent la première des news. J'ai voulu montrer dans ce livre et ce film un visage plus humain de mon pays, un visage qui n'est pas celui des terroristes mais celui de pères, de fils, d'hommes et de femmes qui aiment la vie et la liberté.
Quel est le symbolisme du cerf-volant pour vous ?
Khaled Hosseini : Et bien pour moi c'est le symbole avant tout de mon enfance! J'ai grandi heureux, en paix, dans une famille aisée où nous faisions tous les jours voler des cerfs-volants. Surtout l'hiver pendant des vacances qui duraient presque 4 mois. Pour moi c'était le temps de l'innocence. Et puis les Russes nous ont envahi et notre vie à basculer. Sont alors arrivés les Talibans financés par la CIA et mon pays n'a plus jamais été le même depuis. Pour moi les cerf-volants sont un symoble de liberté, d'échappée, d'espoir de vivre un jour dans un monde meilleur où mon pays sera en paix comme le reste du monde.
Est-ce que le problème Afghan est vraiment un problème de Religion, des Talibans ou est-ce un problème économique, de pauvreté...?
Khaled Hosseini : Et bien si on a quelques heures pour en débattre je serais ravi de rentrer dans le Coeur du sujet ! Disons que c'est un problème complexe qui comporte plusieurs raisons dont la mauvaise économie et la pauvreté du pays mais aussi à cause de cette pauvreté un fanatisme religieux grimpant. Ce n'est vraiment pas une mince affaire que de résoudre les problèmes en Afghanistan; mais c'est tout de même une question de motivation et de focalisation, et qu'il n'y a pas vraiment en ce moment. Encore une fois, on peut tout de même convenir que l'invasion Soviétique a vraiment précipité le pays à sa ruine et ce qu'il est aujourd'hui. Et bien sûr pour que cette invasion ait eu lieu, il y a d'autres explications antérieures. La vérité est quelque part dans l'Histoire...
Y a t'il des passages du livres que le réalisateur a enlevé et que vous regrettez ?
Khaled Hosseini : Dans l'ensemble non. Mais c'est vrai que vers la fin il y avait une scène choc de suicide qu'il a décidé d'effacer. Bon c'est un choix mais j'aurai bien voulu qu'elle reste pour le film. Cependant cela ne change en rien la grandeur du film. J'aime tellement le cinéma et ceci depuis ma tendre enfance que je comprends que c'est un média different que celui de la littérature et je peux donc comprendre telle ou telle direction. Et puis la plupart des dialogues du film sont tirés de mon livre, donc je suis fier vraiment du travail de Marc Forster.
Propos recueillis à Los Angeles par Emmanuel Itier en décembre 2007