AlloCiné : Vous êtes connus pour avoir signé de nombreux vidéoclips musicaux, pour les Red Hot Chili Peppers et Oasis notamment... Est-ce que diriger des rock-stars, souvent un peu pathétiques, vous a inspiré pour mettre en scène la bande de loosers de "Little Miss Sunshine" ?
Valerie Faris : Non, je ne pense pas qu'il y ait un rapport particulier ! (Rires) Mais c'est vrai qu'il y a un peu de pathétique dans les deux cas, à la différence près que dans Little Miss Sunshine, il n'y a jamais de moquerie ou de second degré porté aux personnages. Les musiciens se moquent délibérément d'eux-mêmes et aiment bien se flageller. Là, nous avons énormément d'affection pour les personnages de notre film et pas question de leur faire du mal.
Selon vous, pourquoi avez-vous été choisis pour la réalisation du long-métrage ?
Jonathan Dayton : En fait, et je reprend des propos de nos producteurs Albert Berger et Ron Yerxa : il semble que la passion que nous communiquions sur le projet était telle qu'elle les a convaincus. De plus, l'humanisme que nous essayons de faire ressortir de chacun de nos travaux a sans doute été un élément prépondérant. Je ne sais pas ! (Rires) Disons que nous sommes passionnés, généreux et que si on nous dit oui, on fonce comme des malades, on ne calcule pas et on va à 200 à l'heure. Voilà peut-être pourquoi ils nous ont choisis, peut-être ont-ils eu peur ? (Rires)
Votre univers est puissant, iconoclaste et rebelle. Pourquoi avoir choisi ce script en particulier pour y insuffler votre folie ?
Jonathan Dayton : Même si nos oeuvres sont parfois un peu iconoclastes, irrévérencieuses, nous attachons toujours le plus d'importance à l'histoire et aux personnages. Une comédie musicale avec de jolis personnages aurait également tout a fait pu nous séduire. Donc, dans le cas précis de Little Miss Sunshine, ce sont bien les personnages, leur écriture, qui a fait qu'on a dit oui. Après, nous avons essayé de mettre ce qui fait le sel de notre travail quotidien dans ces personnages. Au final, cest un mélange qui nous correspond parfaitement : nos anti-héros sont d'adorables excentriques. La famille de Little Miss Sunshine va vous en faire voir de belles et vous faire penser à... vous-mêmes ! Car derrière cette excentricité se cache en efet un peu de nous-mêmes.
Le film possède un superbe équilibre entre comédie et drame, entre rires et larmes...
Valerie Faris : Pour nous, il était primordial de respecter cette balance, qui est la clé de toute bonne comédie dramatique. Et puis, si l'on décide de mettre une famille à la lumière, il serait dommage de ne pas montrer ce qui caractérise chaque famille : la diversité des sentiments, les rapports de force, l'opposition amour/haine, mais également la folie, les excentricités. Little Miss Sunshine, de par ses excentricités, est un film tout à fait réaliste, car il est le miroir de nos propres vies familiales.
Pour aboutir à ce résultat, vous avez réuni un casting explosif...
Jonathan Dayton : Oui, ils sont tous un peu barrés ! (Rires) On les a tous mis dans un bon shaker, on a secoué, on a pas oublié de mettre à l'intérieur des dialogues bien déjantés, de l'absurde, du délire, des sentiments, un bus jaune et plein d'autres choses, et on a servi ça sur un plateau ! On était des fans absolus de Steve Carell, notamment, et c'était un honneur de le voir avec nous. Parfaitement jubilatoire également de le voir jouer nos délires sur le tournage ! De manière générale, pour que tout fonctionne sur Little Miss Sunshine, il fallait que chacun soit au même niveau. Le travail d'écriture a donc été effectué dans ce sens. Chacun a sa part du gâteau, sa part du délire, et notre satisfaction est de voir que ces six personnages, dans leur excentricité, parviennent à former une vraie famille ! A partir de là, notre volonté de faire un film pas comme les autres sur l'importance des valeurs familiales était sur la bonne voie...
Propos recueillis par Clément Cuyer le jeudi 25 juillet 2006 à Paris