Interview intégrale : Gaël Garcia Bernal
Michel Gondry reconnaît que le personnage de Stéphane, que vous interprétez, est proche de lui. Avez-vous senti une responsabilité particulière de ce point de vue ?
C'est vrai qu'il y a beaucoup de Michel dans le personnage de Stéphane : en particulier, il y a mis des expériences qu'il a vécues. Mais en fait c'est une combinaison de différentes choses, Michel a aussi tenu compte de la façon dont je pouvais l'incarner. J'ai ressenti une responsabilité par rapport au personnage, mais pas spécialement parce que j'avais l'impression de "représenter" Michel.
Vous interprétez souvent des personnages naïfs. Etes-vous ainsi dans la vie ?
Je peux être très naif, innocent, un peu stupide même, en particulier quand quelqu'un me plaît : je deviens très nerveux, pas sûr de moi. J'esaie d'aborder la personne, mais parfois cette approche est complètement à côté de la plaque. Ca m'arrivait davantage avant.
Tourner un tel film peut être déstabilisant pour un acteur, car, sur le tournage, vous ne saviez pas à quoi ressemblerait le film...
Pour les acteurs c'était très surprenant de voir le film. On voulait voir si ce qu'on avait fait fonctionnait. J'aime beaucoup le rythme du film, le scénario aussi bien sûr. Mais ce que j'aime avant tout, c'est le fait qu'il ne prétende pas réfleter la réalité. Dans la plupart des films aujourd'hui, on fait beaucoup d'efforts pour nous donner l'impression que "c'est la vraie vie", "ce sont de vraies émotions"... Dans La Science des rêves, on joue avec l'artifice, on est très libre, on ne cache pas le fait que c'est un film. Le personnage lui-même a l'impression de savoir qu'il est dans un film. Et ça me plaît...
Si vous pouviez voir se réaliser une des idées farfelues du film ?
La machine à remonter le temps d'une seconde. Si ça marche, c'est l'invention la plus incroyable d'un point de vue scientifique. Et puis c'est très facile à utiliser, on peut l'essayer avec ses amis... Il me semble d'ailleurs que quelqu'un a tenté d'en mettre une au point récemment. Cette scène du film est vraiment très drôle, en particulier le dialogue entre Stéphane et Stéphanie.
Le travail avec Michel Gondry vous a-t-il donné quelques idées pour le film que préparez actuellement en tant que réalisateur, "Deficit" ?
Avec tous les réalisateurs, on apprend quelque chose, même si c'est difficile de dire exactement quoi. Avec Michel, je dirais que j'ai été impressionné par sa maîtrise, sa manière de placer la caméra. Mais je ne peux pas encore parler de mon film, car le processus n'est pas terminé, je suis actuellement en plein montage...
Avez-vous un rêve récurrent ?
J'avais des cauchemars récurrents quand j'étais enfant, plus maintenant. Quand je rêve que je suis dans un avion, je suis toujours effrayé. Je rêve beaucoup, mais un rêve récurrent, non, je ne vois pas. D'ailleurs, ça fait longtemps que je n'ai pas eu de rêve humide, non plus, c'est dommage... (rires)
Au dernier festival de Cannes, beaucoup de films signés par des cinéastes mexicains ont été très remarqués : "Babel" d'Inarritu, "Le Labyrinthe de Pan" de Guillermo del Toro, "Le Violon" de Francisco Vargas. Quel regard portez-vous sur ce dynamisme du cinéma mexicain ?
Il y a une formidable génération de cinéastes qui est apparue dans le cinéma mexicain, et il y en encore plein d'autres qui vont arriver... Grâce à des gens comme Alfonso Cuaron, Guillermo Del Toro, Inárritu, Luis Mandoki, de jeunes réalisateurs se mettent à faire leurs films, et parviennent à trouver des financements. Je dirais même que ce dynamisme n'est pas seulement celui du cinéma mexicain mais du cinéma d'Amérique latine en général.
Propos recueillis le 7 juin par Marine Bergère et Julien Dokhan