Rencontré lors du 46ème Festival de Monte-Carlo, Stéphan Guérin-Tillié était revenu avec nous sur l'aventure Zodiaque... et sur ses projets !
AlloCiné Séries : Deux ans après le premier Zodiaque, comment votre personnage a-t-il évolué ?
Stéphan Guérin-Tillié : A l'image de la série. Cette suite est plus tendue et intense. En terme de rythme et de scénario, le virage amorcé avec Le Maître du Zodiaque est annonciateur de ce qui arrive à la télévision française. La question n'est pas de savoir si cette suite est plus un thriller, la violence est largement supportable. On dit souvent qu'il y a dix ans de retard par rapport aux Etats-Unis mais je ne pense pas que ce soit le cas. Simplement la télévision suit une trajectoire qui est logique. Aujourd'hui les téléspectateurs sont beaucoup mieux armés qu'il y a cinq ou six ans pour aborder une série, ils ont tous une culture de l'image. En termes scénaristique et d'image pure, on peut aller plus loin. Le Maître du Zodiaque apporte vraiment plus de rythme, les personnages sont devenus plus ambigus. Ils ont tous un côté clair-obscur, voire blanc et noir. Pour Jérôme (ndlr : son personnage dans la série) c'est exactement pareil. A la fin de la première saison, il avait un humour à froid et n'était pas vraiment concerné par les affaires de la famille. Là il est devenu plus carnassier, plus requin. Il va se marier avec la fille de la famille rivale mais on sent bien que c'est plus par intérêt que par amour. Il y a comme ça tout un mélange de genres. Ce qui m'a séduit dans cette suite c'est aussi le fait que l'on sortait de la saga familiale.
Quand a été prise la décision de donner une suite à "Zodiaque" ?
C'est venu assez vite. Avant même la diffusion des premiers épisodes je crois. Quand la chaîne avait vu le résultat, tout le monde était assez enthousiaste et se disait que c'était intéressant de développer et qu'il y avait une matière qui le permettait.
Le fait qu'une grande partie de l'équipe ait resigné pour une 2ème saison a-t-il été une motivation supplémentaire pour continuer l'aventure ?
Ce qui est compliqué dans les suites c'est que si un acteur ne la fait pas et que son rôle existe encore, il est remplacé par quelqu'un d'autre. Dans ce cas-là, je me serais dit que c'était chaotique... En réalisant Edy (ndlr : sorti en 2005), je voulais faire un film très particulier, un polar, sombre, et tout d'un coup on me retrouve sur un projet beaucoup plus populaire. Ce sont ces grands écarts qui m'intéressent.
C'est la diversité qui fait avancer. Si on n'aime que Les Cahiers du Cinéma (ndlr : célèbre journal de cinéma français), on se prive d'un véritable plaisir en n'allant pas voir des comédies ou des films d'action très populaires. Quand je vais au cinéma, je vais tout aussi bien voir X-Men l'affrontement final que le film d'Eric Guirado ou de Jean-Paul Civeyrac. Mon spectre de spectateurs est très large parce que tout m'intéresse. Je suis curieux. Comme acteur, mon plus grand bonheur serait un jour de pouvoir faire ce genre de films, ce grand écart. Faire Zodiaque c'est un vrai plaisir parce que ce sont d'autres codes, d'autres rencontres. Après, tourner avec Philippe Noiret et François Berléand (ndlr : les vedettes de son film Edy) c'est encore autre chose.
Après le succès du premier, êtes-vous inquiet de l'accueil du public pour cette suite ?
Pour moi, il n'y a pas un enjeu particulier. Je serai heureux qu'elle rencontre le succès parce que je trouve que la série est de qualité. Quand on travaille sur un média comme la télévision, on s'adresse au plus grand nombre et il y a un rapport immédiat dans le résultat. Je serais heureux que ça fonctionne parce que justement on est en train de changer les codes et si ça marche, la télévision va faire des pas en avant.
Qu'y a-t-il de vous dans votre personnage de Jérôme ? Est-il plus proche de vous maintenant que lors du "Zodiaque" ?
C'est toujours étonnant comme question parce que l'acteur c'est moi et il y a donc forcément beaucoup de moi dans le personnage...
Jérôme Anger, qui joue Alexis Daguerre dans Le Maître du Zodiaque, intervient : C'est un acteur formidable (ndlr : désignant Stéphan Guérin-Tillié) Mais il ne faut pas qu'il sache qu'il joue la comédie parce que dès qu'il en prend conscience, il est capable du pire comme du meilleur (rires). L'avantage c'est que dans le meilleur il est vraiment au top.
Le problème c'est que c'est rare (rires) ! Quand il est dans le meilleur, c'est vraiment extraordinaire. Moi, je m'inspire de cet homme là. D'ailleurs je vais l'embrasser si vous me le permettez...
Stéphan Guérin-Tillié: Comme vous pouvez le constater, ça s'est vraiment bien passé sur le plateau. Il n'y a pas eu de rivalité. Tout le monde allait dans le sens du projet. C'est agréable. D'autant plus que le tournage a duré 6 mois et que la série a coûté 13 millions d'euros. C'est assez usant, il vaut mieux bien s'entendre avec ses camarades. J'ai pris aussi beaucoup de plaisir à travailler avec l'équipe technique. Avec cette suite on a retrouvé beaucoup d'acteurs, mais aussi des techniciens qui étaient de la première saison. Sur un plateau, ce sont des artistes et je suis assez sensible à ça.
Nous avons déjà posé la question à Boris Terral : combien devons-nous vous payer pour que vous nous révéliez le dénouement du "Maître du Zodiaque" ?
Je ne suis pas vénal (rires) !
Vous êtes réalisateur. Aviez-vous une approche différente sur le plateau ou vis-à-vis du scénario ?
Non parce qu'il y a des scénaristes et une chaîne qui s'occupent de ça. Après c'est vrai qu'avec Claude-Michel Rome (ndlr : le réalisateur), on avait un deal. A certains moments dans ce genre de sagas, il y a des répétitions parce qu'on a parfois trop peur que le public ne comprenne pas, ce qui fait qu'on répète parfois trois la même information. Avec Claude-Michel, on a pris la liberté, quand les dialogues étaient redondants, de les couper. Voilà, ma seule intervention concernait parfois les dialogues. Il vaut mieux ne rien dire et c'est peut-être plus intéressant d'avoir un regard. On en revient à ce qu'on disait au début de notre conversation, le regard du spectateur a vraiment évolué. Il est beaucoup plus adroit, habile, parce que beaucoup plus averti.
Vous prenez en exemple les séries américaines. Quelles sont celles que vous aimez justement ?
Je viens de finir une série extraordinaire qui s'appelle Prison Break, avec Wentworth Miller. Elle n'a pas été encore diffusée en France mais je précise que je ne l'ai pas téléchargé. On me l'a envoyé des Etats-Unis. C'est extraordinaire. J'ai aussi vu Rome mais je n'ai pas accroché aux premiers épisodes. Sur la fin c'est crescendo jusqu'à l'apothéose. Qualité de jeu, de mise en scène, de décors... Mais je suis également un grand fan de Six Feet Under, des Soprano. Je vois beaucoup de séries et de films parce que j'écris et que c'est souvent une source d'inspiration.
Après "Edy", votre premier film, vous êtes actuellement en train d'écrire une comédie romantique. Que pouvez-vous nous en dire ?
Mon ambition c'est à la fois de faire un Love story des temps modernes et un film d'anticipation, un peu dans la veine d'Eternal sunshine of the spotless mind. Mon postulat de départ c'est l'histoire d'un couchettiste, c'est-à-dire quelqu'un qui loue des couchettes, pour le train Paris – Florence. Il va avoir un coup de foudre qui se traduit par une crise cardiaque. Après on part dans l'anticipation...
Vous écrivez en ayant des comédiens en tête ?
En ce qui concerne l'actrice, je sais pour qui j'écris...
Propos recueillis par Thomas Destouches le 30 juin 2006