A l'occasion de la sortie du déjanté Incontrôlable ce mercredi 8 janvier, AlloCiné a rencontré son turbulent acteur vedette Michaël Youn. Dans le tourbillon d'un infernal marathon promotionnel , le comique a d'abord failli ne pas pouvoir nous accorder un entretien. Mais plus motivé que jamais, il a tenu à nous rencontrer coûte que coûte : l'interview s'est donc déroulé... dans le taxi qui le menait à l'aéroport ! Très loquace, Michaël Youn nous parle de son dernier ovni cinématographique, évoque avec lucidité et passion son amour pour le métier d'acteur et revient, sans reprendre sa respiration, sur son attirance pour le cinéma américain, ses essais pour le prochain James Bond et... AlloCiné ! Ouf !
AlloCiné : Il y a deux ans, AlloCiné t'interviewais à l'occasion de la sortie des "10 commandements". Que s'est-il passé depuis 2004 ?
Michaël Youn : J'ai pas mal bossé. J'ai tourné mon spectacle un peu partout en France, je l'ai sorti en DVD. J'ai sorti Iznogoud... pour le meilleur et pour le pire ! (rires) Et puis me revoilà avec Incontrôlable, une comédie bien déjantée, dans l'esprit de ce que j'aime faire. Je suis en pleine promo, bientôt en tournage. Je n'arrête pas, j'aimerais être plusieurs, mais... j'adore ça !
"Iznogoud", "pour le meilleur et pour le pire" ? C'est-à-dire ?
Je n'ai pas du tout honte de ce que j'ai fait. Le seul problème, au niveau du jeu dans Iznogoud, c'est que j'ai trouvé une note, mais que je n'ai pas su la faire évoluer. Je trouve que je suis très monocorde pendant tout le film, alors que par exemple, dans Incontrôlable, je peux vous assurer qu'on va de A à Z, de 0 à 100, de gauche à droite et de haut en bas ! (rires)
Donc, te voilà avec "Incontrôlable",...
(Il interrompt la question) Je tiens à dire que j'aime beaucoup AlloCiné, je suis inscrit, j'ai un pseudo ! Mais je ne vous le donnerai pas, sinon c'est foutu ! D'autant que parfois, je mets des commentaires sur mes propres films, j'avoue ! (rires) Comme des fois, il y a des bandes d'énervés qui s'excitent pour un oui ou pour un non, j'aime bien rétablir quelques vérités !
Justement, avant de parler d'"Incontrôlable", il y a certains énervés qui s'excitent sur une grosse rumeur te concernant ces jours-ci : tu pourrais être le méchant du prochain James Bond !
Ecoute, j'ai fait les essais pour Casino Royale, maintenant je n'en sais pas plus. Ce que je peux dire, à tous ceux qui s'excitent sur les sites de James Bond en disant "Mais quelle honte, déjà qu'ils ont pris Daniel Craig, si en plus ils prennent Michaël Youn, James Bond est mort !", c'est : "Rassurez-vous !"! Si vous aimez Simon Abkarian, vous serez ravis, c'est tout ce que je peux vous dire. Donc, voilà, je suis tellement content d'avoir passé des essais pour ce film, c'est la classe. Peut-être qu'après, en France, il y a des gens qui me prendront un peu plus au sérieux. Maintenant, moi, je suis un guignolo, je le revendique, j'en suis fier, je suis fier de faire rigoler les gens. C'est un très beau métier, ça peux peut-être paraître mégalo de dire ça, mais tu ne peux pas imaginer la satisfaction que tu as quand tu va voir Incontrôlable et que tu vois les gens, dans la salle, se bidonner de rire ! Ca fait vraiment plaisir et je me dis que voilà, elle est là mon utilité dans cette société. Je suis un cachet d'aspirine pour aider certaines personnes à avoir moins mal au crâne et... pour que d'autres aient un peu plus mal au crâne aussi ! (rires) J'ai envie de m'éclater, de prendre mon temps, de connaître plein d'expériences différentes, de montrer plein de choses.
D'ailleurs, tu montres différentes choses dans "Incontrôlable". Au-delà de provoquer le rire, tu fais pour la première fois passer de l'émotion dans ton rôle...
Et bien merci ! (rires) Mais vous verrez que ça se confirmera dès mes deux prochains films. D'abord, Héros, avec Patrick Chesnais, que je tourne en mai, qui est l'histoire d'un comique raté devenu chauffeur de salle un peu aigri et qui va, un jour, kidnapper un chanteur très populaire pour avoir son quart d'heure de gloire. L'univers est proche de Requiem for a Dream et le scénario de La Valse des pantins de Scorsese. L'autre film, qui n'est pas encore signé, c'est l'histoire d'un mec pris au piège d'une société tentaculaire qui, il s'en rend compte, emploie des figurants dans tous les secteurs de la vie. C'est un vrai thriller. J'espère qu'on pourra vérifier l'étendue de mon potentiel avec ces deux films.
Dans "Incontrôlable", c'est cette petite part touchante, en tout cas autre que purement comique, qui t'a convaincu de faire le film ?
C'est vrai qu'il y a cette part assez touchante du personnage, mais franchement, avec Incontrôlable, j'ai surtout été attiré par le côté physical comedy à l'américaine, le côté Jim Carrey, frères Farrelly, Jerry Lewis, le truc complètement déjanté. Le réalisateur Raffy Shart est une éponge, il a puisé dans toutes ces références américaines, tous ces films qui nous ont fait marré lui et moi. J'étais vraiment ravi de faire un "frères Farrelly à la française". Une comédie de situation, sur le corps, qui permet de complètement exploser les limites du scénario, de partir dans des trucs complètement dingues qu'on a pas l'habitude de voir dans des comédies françaises. C'est sûr que dans une comédie un peu plus franchouillarde, tu n'as pas un mec qui parle avec la voix de l'âne dans Shrek ! (rires) Pas un mec qui se bat avec un flic de petite taille, qui se brûle le sexe sur un barbecue ou qui envoie une mamie valdinguer dans un escalier ! Tu n'as pas ce genre de dédoublement de personnalité.
Le cinéma américain est une sorte de fil rouge au gré de tes rôles au cinéma, excepté "Iznogoud"...
Oui, c'est vrai. Bon, je ne renie pas le cinéma français. J'adore Sautet, Claude Chabrol ou Chéreau, mais c'est vrai que j'ai baigné dans toute cette culture américaine. Si tu regardes mes DVD, j'ai tous les Coppola, les Farrelly, les Coen... C'est le cinéma qui m'éclate. En plus, je n'ai pas vraiment une gueule de franchouille. Certains trouveront peut-être ça arrogant, mais je me trouve moderne, et si tu es moderne, tu es obligé de regarder de l'autre côté de l'Atlantique.
Quelles sont tes références comiques outre-Atlantique ?
Pour moi, Jim Carrey est le meilleur. Avec Will Ferrell également. Je conseille d'ailleurs à tous les internautes Présentateur vedette : la légende de Ron Burgundy, un film-culte qui est pour moi la plus grande comédie des dix dernières années ! Faut pas passer à côté de ce truc-là, c'est énormissime ! Sinon, bien sûr, j'aime Jack Black ou Ben Stiller. Moi, je crois que les gens adorent les comédies américaines, mais qu'en même temps, ils aiment voir des gens qu'ils connaissent bien au cinéma. Donc, peut-être qu'avec Incontrôlable, ça va remplir le rôle. C'est une comédie américaine avec des acteurs français. On a un Thierry Lhermitte énorme, entre le Pierre de Le Père Noël est une ordure et le De Niro de Mon beau-père et moi. Il y a Hélène De Fougerolles, qui est magnifique, Hippolyte Girardot... Le film ressemble au réalisateur Raffy Shart, complètement déjanté. Le tournage était incontrôlable, c'était presque moi qui devait faire le Père Fouettard, un comble ! (rires)
Pour finir, comment as-tu préparé le film ? Hélène De Fougerolles dit de toi que tu es un monstre de travail...
Depuis ça, je lui dit : "T'es pas obligée de faire flipper les gens, travailler c'est pas une honte !" (rires) Pour Incontrôlable, ce que j'ai eu à faire était très dur. Je fais d'abord deux personnages qui sont loin de moi. J'ai du prendre des cours de mime, et j'ai surtout du grossir. Je suis allé voir un nutritionniste qui m'a donné un régime impossible. Alors, j'ai fait mon régime à moi, c'est-à-dire pizza, pizza, pizza, bière, bière, bière, puis, à 22h, des grosses boîtes d'Haagen-Daas et des plats de pâtes énormes avec du Coca ! (rires) Mais pour revenir à la réaction d'Hélène, je voudrais juste répondre que si je bosse, c'est simplement parce que j'adore ce métier, j'adore tourner. Je me pointe le premier sur un plateau, je regarde comment font les techniciens, je sens l'odeur du tournage... J'adore tout, apprendre mon texte, rentrer dans mon personnage, me concentrer. J'aime ce métier, pas pour les à-côtés, pas pour les soirées show-biz, pas pour les pailletes, mais pour la crasse des fils électriques, les ombres des perches que tu vois dans le champs... Voilà pourquoi je fais ce métier.
Propos recueillis par Clément Cuyer le vendredi 27 janvier 2006