Ça parle de quoi ?
Ce nouveau chapitre, situé 183 ans avant la trilogie du Seigneur des Anneaux, explore l'histoire de la Maison de Helm Poing-de-Marteau, roi de Rohan. Face à l'attaque soudaine de Wulf, un seigneur vengeur et cruel, Helm et son peuple se barricadent dans la forteresse de Hornburg, rebaptisée Gouffre de Helm. Dans cette lutte désespérée, Héra, la fille de Helm, doit rassembler le courage nécessaire pour diriger la résistance contre un ennemi déterminé à détruire son peuple.
C'est donc un prequel ?
Tout à fait. Comme le synopsis officiel le souligne bien, l'intrigue se déroule deux décennies avant les aventures de Frodon et la communauté de l'Anneau. Du fait de leur grand âge dans les livres de J.R.R. Tolkien adaptés au cinéma par Peter Jackson, certains personnages sont présents (Saroumane) ou mentionnés (Gandalf), alors qu'Eowyn, apparue dans Les Deux Tours et Le Retour du Roi sous les traits de Miranda Otto, est en charge de la narration de ce prequel.
Cette histoire était-elle dans les livres ?
Oui et non. La Guerre des Rohirrim apparaît bien dans les romans, mais elle ne fait l'objet que d'un court récit dans les appendices du "Seigneur des Anneaux", et son héroïne Hera n'y est même pas mentionnée. "Dans l’une de ses lettres, le professeur Tolkien déclarait que, souvent, les histoires les plus intéressantes sont celles qui n’ont pas été racontées", explique la productrice Philippa Boyens, qui a également travaillé sur les longs métrages de Peter Jackson.
"Le mystère autour d’éléments narratifs restés inexploités lui a toujours plu. Par conséquent, on s’est replongés dans l’univers des livres et on en a extrait tous les éléments de récit qu’on y a trouvés, sans négliger ceux qui sont à la périphérie de l’intrigue. Quoi qu’il en soit, on ne voulait pas raconter l’histoire d’un anneau de pouvoir ou d’un seigneur des ténèbres." De la même manière, et en plus d'avoir un lieu en commun avec lui, La Guerre des Rohirrim se rapproche des Deux Tours, dans la mesure où la notion de siège (donc d'immobilité) prend le pas sur le voyage.
On ne voulait pas raconter l’histoire d’un anneau de pouvoir ou d’un seigneur des ténèbres
"La question de savoir si nous retournerions dans ce monde s'est posée pour la première fois aux alentours de 2019, quand le studio nous a demandé si nous serions intéressés par un film d'animation", nous raconte-t-elle au début du mois de décembre. "Mais il fallait ensuite déterminer quelle forme d'animation et quelle histoire, ce qui n'a pas été aussi facile qu'on pourrait l'imaginer. Puis quelqu'un a suggéré d'en faire un animé. Ce qui, au premier abord, n'est pas immédiatement parlant, et cela rend même certaines personnes nerveuses."
"Mais dès que l'idée d'un animé a été évoquée, j'ai pensé à cette histoire. Je leur ai dit que, pour moi, la guerre des Rohirrim et l'histoire de Helm Poing-de-Marteau feraient l'affaire. Car il y a des thèmes, des éléments de ce récit qui s'inscriraient à merveille dans la grande tradition des films d'animation japonais et de leurs récits cinématographiques en général."
Y a-t-il un lien avec la série "Les Anneaux de pouvoir" ?
Non. Car le show de Prime Video, dont la deuxième saison a été diffusé cette année, se passe bien avant La Guerre des Rohirrim, où Philippa Boyens ne voulait pas raconter "l’histoire d’un anneau de pouvoir ou d’un seigneur des ténèbres", comme vous avez déjà pu le lire plus haut. Et surtout, Les Anneaux de pouvoir se rattache moins aux longs métrages de Peter Jackson qu'aux récits de Tolkien, dont il constitue également un prequel, là où l'opus de Kenji Kamiyama (Blade Runner : Black Lotus), tout en ayant un style qui lui est propre, s'inscrit dans le même univers que celui vu au cinéma entre 2001 et 2014.
Peter Jackson a-t-il été impliqué sur ce film ?
"Peter Jackson et Fran Walsh étaient toujours aussi sur mon épaule", répond Philippa Boyens. "Pas tout le temps non plus, mais ils étaient là. Ils ont été incroyables car j'ai fait appel à eux à de nombreuses reprises, lorsque nous étions bloqués. C'est par exemple Fran qui a nommé Hera, alors que nous ne trouvions pas comment l'appeler. Je savais qu'il fallait que son nom commence par un H, car nous avions Helm, Haleth, Hama, H... (rires) Nous avons pensé à Hilda, Helga, mais nous n'y arrivions pas. Rien ne coulait de source. C'est Fran qui a suggéré Hera, et l'évidence était là. Nous avons trouvé ça très beau et sommes partis dans cette direction."
"Et Peter a toujours été là pour Kenji Kamiyama. Il voulait qu'il puisse développer sa propre vision, donc il a vraiment pris du recul, mais il y a des moments où Kenji avait besoin d'éléments de la part de Weta Digital, comme des paysages par exemple, et Peter leur disait de lui donner tout ce dont il avait besoin." "Il fallait que nous assurions une continuité entre ses films et le mien", ajoute Kenji Kamiyama. "Donc il a fait en sorte de nous donner tout ce qu'il nous fallait, tout en me répétant que le réalisateur, c'était moi, et qu'il fallait que je digère les idées pour me les approprier. Il y a eu une vraie collaboration."
"Et lorsqu'ils ont vu le premier montage, ils nous ont fait de très très bons retours", complète Philippa Boyens. "Des retours nous avons dû relire tellement ils étaient bons (rires). Donc ils ont toujours été à nos côtés, d'une certaine manière."
Est-ce un film uniquement pour les fans ?
"Il y a beaucoup d'easter eggs pour les fans des films et des livres", nous répond Gaia Wise, fille d'Emma Thompson et doubleuse d'Hera dans la version originale. "Nous retournons notamment au Gouffre de Helm, nous voyons les Rohirrim sous un autre jour et, comme il s'agit d'un prequel, nous voyons les ancêtres de personnages que nous connaissons et aimons. Et pour celles et ceux qui n'ont jamais vu Le Seigneur des Anneaux, il s'agit tout simplement d'un film magnifique. D'une belle histoire, qui est visuellement époustouflante. Donc il y en pour tous les goûts." Convaincus de retourner en Terre du Milieu ?
Propos recueillis par Maximilien Pierrette à Londres le 2 décembre 2024