La Force était sur la Croisette ce vendredi 24 mai 2024. Celle du Nouvel Hollywood, quelques jours après la venue de son comparse Francis Ford Coppola, qui présentait son Megalopolis en Compétition. Et, bien sûr, celle de la saga Star Wars qu'il a crée avant de présenter les épisodes II et III dans le Sud de la France.
Avant de recevoir une Palme d'honneur, lors de la cérémonie de clôture, George Lucas a donné une masterclass au Festival de Cannes. Pendant un peu moins de 90 minutes, celui qui a révolutionné l'industrie hollywoodienne et la pop culture est revenu sur les grands moments de sa carrière. Et en voici quelques extraits, 100% Star Wars.
Quand il a découvert le thème de Star Wars
Chaque fan de la saga vous le dira : le thème de Star Wars est une source inépuisable d'émerveillement et de frissons. Mais comment George Lucas a-t-il réagi la première fois qu'il l'a entendu ?
J'ai adoré ! Je parlais avec Steve - Steven Spielberg - en lui disant que tout dans le film renvoyait aux serials des années 30, et qu'ils utilisaient de la musique classique. Je voulais la même chose, en citant "Pierre et le loup" comme modèle : je voulais que chaque personnage ait son propre thème, qu'on ait un orchestre et pas les synthétiseurs de l'époque.
Je voulais un score des années 30, car je faisais un film des années 30. Quand ça a été accepté, Steven m'a parlé de John Williams, mais je pensais qu'il ne faisait que du jazz. Il m'a répondu que personne ne le connaissait alors comme compositeur de classique, mais qu'il pouvait l'être. Nous avons enregistré dans les studios d'Abbey Road, en Angleterre et quand je l'ai entendu pour la première fois avec un orchestre - ce qui n'était pas le cas avant - j'ai dit "Oh mon Dieu !"
Et c'est ce que chacun ferait en entendant ce score. Car je crois fermement que le son représente la moitié du film. Et celle qui coûte le moins cher : vous obtenez 50% du résultat pour environ 25% du coût total. Les gens n'ont pas toujours accordé beaucoup de soin à la conception de la bande-originale, mais moi oui.
Quand il a obtenu les droits des suites de Star Wars
Ce n'était rien pour eux. Ils n'aimaient pas le film, le trouvaient terrible et stupide, donc ils ne se souciaient pas des droits d'une suite. Ils pensaient que le studio allait être revendu, et qu'on ne le leur reprocherait pas, surtout qu'ils imaginaient que ça ne marcherait pas pour autant.
J'ai dû me battre pendant deux, trois ou quatre ans pour faire chaque film
Le secret de tout cela, en fin de compte, c'est la persévérance. J'ai dû me battre pendant deux, trois ou quatre ans pour faire chaque film. J'ai continué à pousser, pousser, pousser et ne pas abandonner parce que j'étais passionné par le film et que je ne me souciais pas vraiment de l'accord. Ce qui m'importait, c'était de pouvoir faire le film. Comme à l'école de cinéma, c'était notre seule passion.
Quand il a revendu les droits de Star Wars à Disney
Un monde dans lequel Star Wars n'aurait pas existé ? Eh bien ça a failli arriver (rires) Quand j'ai vendu ma société [Lucasfilm, en 2012, ndlr], j'ai expliqué que je venais d'avoir une petite fille, que je m'étais marié et que ma vie avait changé. J'avais 69 ans et je savais qu'il me faudrait une dizaine d'années pour faire ces films, je ne me voyais pas faire ça à 79 ans.
Il était temps de passer la main et laisser quelqu'un d'autre s'en emparer. Même si j'étais tout le temps sur le tournage de L'Empire contre-attaque à l'époque, car j'étais le seul à savoir ce que Star Wars était, qu'Irvin Kershner était un bon ami et que je jouais le consultant, le conseiller. Celui qui connaissait l'univers.
Ils ne savaient pas ce qu'était la Force par exemple. D'autres films ont été lancés lorsque j'ai vendu la compagnie, et certaines de mes idées se sont perdues en chemin. Mais c'est la vie. Si vous renoncez, vous renoncez.
Propos recueillis par Maximilien Pierrette à Cannes le 24 mai 2024