Ça parle de quoi ?
Sidonie se rend au Japon à l’occasion de la ressortie de son best-seller. Malgré le dévouement de son éditeur japonais avec qui elle découvre les traditions du pays, elle perd peu à peu ses repères… Surtout lorsqu’elle se retrouve nez à nez avec son mari, disparu depuis plusieurs années !
Isabelle au Japon
Le titre peut faire penser à des livres tels que "Martine à la ferme", ou à la série Emily in Paris, autre histoire de dépaysement. Avec moins de clichés en ce qui concerne le troisième long métrage réalisé par Elise Girard. Qui aime le Japon puisque le premier, porté par Valérie Donzelli et Jérémie Elkaïm en 2010, s'appelait Belleville-Tokyo.
Quatorze ans plus tard, elle quitte la France pour le Pays du Soleil Levant, en compagnie d'une romancière qui semble avoir perdu l'inspiration et le goût de vivre. Et qui va se retrouver confronter à son passé de deux manières : parce qu'elle doit assurer la promotion de la ressortie de son best-seller, et qu'elle croise le fantôme de son défunt mari.
"C’est parce qu’on est au Japon. C’est le pays des fantômes", lui dit ce dernier lorsqu'elle s'habitue à sa présence et cesse de sortir en courant de la pièce dans laquelle il apparaît, éclairé de manière à ce qu'August Diehl, son interprète, donne l'impression d'être dans un autre monde. Et le spectateur comprend que cette histoire ne pouvait pas se dérouler ailleurs.
"Vos mots sont comme un écho secret à mon histoire" : cette réplique est prononcée par Tsuyoshi Ihara, dont le personnage incarne la notion de mort à laquelle le Japon est lié, puisque sa famille a été marquée par les drames d'Hiroshima et le tremblement de terre de Kobe, survenu en 1995. Encore marquée par un deuil qu'elle n'a jamais vraiment fait, c'est dans ce pays que Sidonie va pouvoir dépasser le décès de son époux.
Dans ces lieux où les fantômes font davantage partie de la culture populaire qu'en France ("Ils vivent partout autour de nous", entend l'héroïne), et où l'on retient ses sentiments, comme la romancière. Et c'est en cela que Sidonie au Japon est intéressant.
Cette confrontation entre deux modes de pensée et arts de vivre qui lui permet, non pas de jouer sur les clichés attendus dans un récit de ce style, mais de faire en sorte que cette femme regarde une dernière fois son passé dans les yeux et règle ses comptes avec lui, pour ensuite aller de l'avant. Et, peut-être, se laisser aller à aimer et créer de nouveau.
Un film doux, lent et cinéphile
Doté d'un rythme lent, plus proche de celui des productions nippones, le long métrage demande un peu de patience au spectateur avant qu'il ne puisse entrer dans le récit, ne sachant pas très bien dans un premier temps, à quoi la présence du fantôme d'Antoine. Mais, comme Sidonie avec ce dernier, il lui faut un peu de temps pour l'apprivoiser et se laisser porter par sa lenteur et sa douceur.
Le tout dans un film cinéphile, qui fait plusieurs fois référence au réalisateur Kenji Mizoguchi, l'un des grands maîtres du cinéma japonais, dont l'un des personnages porte le même nom de famille. Le metteur en scène de L'Intendant Sansho ou Les Amants crucifiés est assez souvent mentionné pour que cela donne envie de se pencher sur son oeuvre. Histoire de rester dans l'ambiance de ce film.