Dans Saltburn, le personnage d’Oliver, joué par Barry Keoghan, est décrit comme un papillon de nuit : “Calme, inoffensif, attiré par la lumière, cognant contre la fenêtre en suppliant qu’on le laisse entrer.”
Une image qui lui sied à merveille. On pourrait également parler de vampire ou de sangsue tant le jeune homme, mystérieux et dangereux, est prêt à tout pour s’accaparer tout ce qui l’entoure.
Quand il croise le regard de Felix, l'élève le plus populaire de l’université d’Oxford et fils d’une famille d’aristocrates, Oliver tombe sous son charme. Les deux étudiants deviennent amis et passent l’été dans la majestueuse propriété des parents du jeune premier.
Très vite, de nombreux événements troubles vont venir souiller la vie parfaite de cette microsociété aveuglée par l’opulence et ses privilèges.
Sexy, méchant et politiquement incorrect, ce thriller signe la deuxième réalisation d’Emerald Fennell, récompensée par l’Oscar du meilleur scénario original en 2021 pour Promising Young Woman.
Avec Saltburn, la cinéaste pousse tous les curseurs au maximum. Elle imagine un personnage manipulateur et pervers dans un univers coloré, baroque et volontairement excessif.
Pour incarner son Oliver, qui emprunte beaucoup à Tom Ripley, l’antihéros de Patricia Highsmith, Emerald Fennell fait confiance à Barry Keoghan, l’un des acteurs les plus talentueux de sa génération.
L’Irlandais, dont la filmographie donne déjà des vertiges, est coutumier des rôles de méchants, comme il l'a déjà prouvé dans Mise à mort du cerf sacré ou The Batman, où il prêtait - brièvement - ses traits au Joker.
“Ce qui m’intéresse, c’est d’humaniser ces personnages, révèle Barry Keoghan à AlloCiné. Je veux leur donner vie, les rendre réels et non pas les interpréter en collant des étiquettes. Je cherche avant tout une vérité et une honnêteté.”
L’acteur précise que son approche est la même pour chaque film, avec “le même engagement, la même énergie et le même processus de découverte”. “La différence avec Saltburn, c'est que le film exige beaucoup plus, car il s'agit d'un rôle principal, ce qui implique une certaine endurance”, ajoute-t-il.
Il est de tous les plans et donne chair à des séquences aussi amusantes que provocantes, comme cette scène de danse finale, qui a nécessité pas moins de onze prises, ou cette séquence dans une baignoire.
Sur le plateau, aucune place pour l’improvisation. Tout est minutieusement préparé, répété. “Je pense que l'improvisation peut parfois intervenir quand il n'y a pas assez de matière. Mais avec Saltburn, tout était là.”
Emerald Fennell met au point un film d’une beauté visuelle sidérante, mélangeant ainsi des inspirations de la littérature du XXe siècle, comme Retour à Brideshead, à la culture populaire moderne à travers des films comme Sexe Intentions.
Elle crée surtout une véritable tension homoérotique entre ses deux acteurs principaux, Barry Keoghan et Jacob Elordi, révélé dans la série Euphoria, qui illumine chaque plan dans lequel il apparaît.
“Exaltant”, “érotique”, “excitant”... C’est avec ces mots que Barry Keoghan décrit Saltburn, une véritable bombe à retardement doté d'un humour cinglant qui conclut l’année 2023 en beauté.
Propos recueillis par Thomas Desroches, à Paris, en décembre 2023.
Saltburn est disponible sur Prime Video.