"J'étais à l'hôpital au chevet de mon père, qui est mort là-bas. Il n'avait plus que 10 shillings en poche. C'était tout ce qu'il restait d'une vie de dur labeur. Lorsque je suis sorti de l'hôpital, je me suis juré de réussir ma vie".
Ainsi débute Sir Michael Caine : du monde ouvrier aux Oscars de la gloire, excellent portrait de l'acteur diffusé ce soir sur Arte à 23h45. Un 52' dont on aurait, à vrai dire, aimé qu'il dure au moins le double, tant le portrait dressé à ce récent nonagénaire révèle un homme profondément attachant, humble et opiniâtre, qui n'a jamais oublié d'où il venait, en dépit de l'ivresse des feux de la rampe.
Né au sein d'un foyer aimant mais pauvre, grandissant dans un quartier ouvrier défavorisé, Michael Caine a pris une magnifique revanche sur la vie. Immense comédien, deux fois oscarisé, il aligne une vertigineuse carrière forte de plus de 150 rôles : Alfie le dragueur, Le Limier, L'Homme qui voulut être roi, La Vallée perdue, La loi du milieu, Un Pont trop loin, la saga des Batman de Christopher Nolan... Une liste qui donne le tournis.
Nolan sort l'acteur de sa retraite
Une carrière au très long cours, traversée avec une tranquille humilité. Caine est un infatigable travailleur, amoureux de son métier. Ce qui ne l'a pas empêché, à deux reprises, de déclarer prendre sa retraite. La première fois fut quelques temps après avoir reçu son premier Oscar, celui du Meilleur second rôle, dans Hanna et ses soeurs de Woody Allen, en 1987.
Etrangement et paradoxalement, les propositions de rôles ne se sont guère bousculées derrière, si ce n'est pour la TV (extraordinaire téléfilm Jack l'éventreur) au point que l'acteur parti en Floride ouvrir un restaurant, déclarant en avoir terminé avec son métier de comédien. Jusqu'à ce que son voisin, un certain Jack Nicholson, lui remette le pied à l'étrier.
Après son second oscar, reçu pour L'oeuvre de Dieu, la part du Diable en 2000, il se retrouve un peu au même point que précédemment. Michael Caine tourne nettement moins, étant, selon ses propres termes dans le documentaire, dans un état de semi-retraite. Jusqu'à ce que Christopher Nolan ne vienne frapper à sa porte, pour lui proposer le formidable rôle d'Alfred Pennyworth, dans le Batman Begins qu'il prépare.
"Je n'avais pas vraiment l'intention de refaire un film" commente Caine. "Je croyais qu'il allait me proposer un petit rôle dans un joli petit film artistique. Mais il m'a dit : "je travaille sur un Batman !" Evidemment, j'ai d'emblée écarté l'idée de jouer Batman, j'étais déjà trop vieux.
"Donc je vais jouer le majordome ?" lui ai-je demandé. "Et mon texte, ca sera quoi ? "Le dîner est servi ?" ou "Souhaitez-vous un autre verre de vin ?" Il m'a alors répondu : "Michael, cet homme, Bruce Wayne, est orphelin. Le majordome est comme un père pour lui. je vous laisse donc lire le scénario, avant de faire d'autres commentaires".
On connait évidemment la suite. Caine apportera une grande profondeur à ce personnage, avec sa diction si caractéristique et élégante, emballé dans un jeu d'acteur faisant la part belle à la sobriété, en grand adepte du Less is More. L'acteur, est d'ailleurs devenu, depuis cette première collaboration, un véritable mentor pour Nolan, au point de figurer dans tous ses films. Pour la plus grande joie des admirateurs et admiratrices de cette légende du cinéma. A commencer par Nolan lui-même.
Sir Michael Caine : du monde ouvrier aux Oscars de la gloire, à voir sur Arte ce 19 mars à 23h45.
Le documentaire est également disponible sur arte.tv du 19/03 au 16/06/2023.