Souvent, pour ne pas dire toujours, la révolution qui s'opère dans l'industrie du jeu se mesure à l'aune des avancées et prouesses technologiques, à l'heure des consoles "Next Gen" et parfois de la surenchère gratuite des productions.
Fondateur de Quantic Dream en 1997, studio indépendant de création de jeux vidéo, le Game Director français David Cage posait quant à lui, et de longue date, cette révolution en d'autres termes. Et si elle se faisait par l'exploration de nouveaux modes de narration ? Personnalité à la fois attachante et clivante, tant chez les joueurs qu'au sein de la profession, David Cage a toujours souhaité "créer des expériences qui ont du sens", au sein desquelles la quête d'émotions demeure la pierre angulaire de ses oeuvres.
"Créer un jeu vidéo en abordant des thèmes réels, non basés sur le divertissement, c'est difficile. Il faut convaincre, évangéliser" nous disait-il, lorsque nous l'avions longuement rencontré à l'époque de la sortie du dernier titre en date du studio, Detroit : Become Human, en 2018. Ajoutant : "L'expérience interactive n'est pas nécessairement quelque chose de ludique dans le sens d'amusement. C'est un moyen d'expression, au même titre que la littérature, la TV ou le cinéma".
Singulier studio que Quantic Dream, créateur de son propre genre, l'interactive drama. A son lancement, il ne sait évidemment pas encore qu'il donnera naissance à ce genre novateur, porté par une technologie de pointe, qui marquera l'Histoire du jeu vidéo. Aucune suite aussi dans ses titres développés au long cours; toujours des créations originales. Un luxe, aussi, dans une industrie vidéoludique régulièrement taraudée par l'idée de rincer les franchises à succès et une absence de prises de risques dans les productions labellisées "AAA".
De la première expérience marquante The Nomad Soul, qui verra une formidable collaboration inédite avec David Bowie, au déjà très attendu Star Wars Eclipse, premier jeu d'ailleurs de Quantic Dream qui ne reposera pas sur une idée originale mais un univers préexistant, en passant par Heavy Rain, Beyond : Two Souls et bien entendu Detroit : Become Human, ce sont 25 ans de la vie d'un studio dont l'existence même a plusieurs fois vacillée, qui sont balayés de manière passionnante dans l'ouvrage L'Art de Quantic Dream.
Ecrit par le journaliste Jean Zeid et publié par la jeune maison d'édition Mana Books (née en 2017) mais déjà grande par son catalogue spécialisé dans la Pop culture, cet ouvrage de 280 pages est logiquement agrémenté de très nombreux dessins préparatoires jamais révélés et de splendides illustrations couchées sur un papier de belle qualité.
Découpé en 5 copieux chapitres (le 5e étant consacré à Star Wars Eclipse), comme autant de tournants et moments clés dans la vie du studio, L'Art de Quantic Dream apporte un éclairage bienvenue sur les coulisses du studio, abondamment nourri des entretiens menés par Jean Zeid avec ses membres, anciens ou non. A commencer bien entendu par la tête pensante du studio.
On saluera également la bonne idée de proposer aux lecteurs la prolongation de cette immersion en vidéo, en permettant de scanner avec son smartphone des QR codes qui donnent accès à des bandes-annonces, making-of et courts-métrages produits par Quantic Dream. Un bel ouvrage donc, à s'offrir ou à offrir, surtout si vous commencez votre liste au Père Noël.
L'Art de Quantic Dream
280 pages / 252x253 mm
39,90€
Le site de l'éditeur Mana Books