Adapté du roman homonyme de Philippe Djian,37°2 le matin est, selon les termes de son réalisateur Jean-Jacques Beineix, une « histoire d’amour moderne », « un romantisme un peu cynique et désespéré, où on sait que les histoires d’amour n’ont qu’une durée éphémère ». Dans un making-of, le cinéaste précise ses intentions : « c’est l’histoire d’un homme qui raconte une femme, et à travers la femme, il se raconte lui-même. Il est intéressant de voir que cette femme est tout ce qu’il n’est pas. Elle ose faire des choses qu’il n’ose pas faire. Elle a du culot, alors qu'il est lâche. Elle a une violence qu'il n’a pas. Elle l’amène à devenir violent, à devenir ci et ça. Je crois que c’est une femme mythique. » (source : making-of du film)
C’est grâce à la couverture d’un magazine que Béatrice Dalle a décroché le premier rôle du film, et ainsi le premier rôle de sa carrière. La jeune femme originaire du Mans avait en effet fait la couverture de « Photo » en 1985 dans le cadre d’une série sur les lolitas, après avoir été repérée sur les Champs Elysées. Remarquée par Dominique Besnehard, elle convainc très rapidement Beineix. C’est également le célèbre directeur de casting qui conseille Jean-Hugues Anglade au cinéaste. Beineix pensait que Anglade était trop jeune et trop fragile. Dans une interview pour AlloCiné, Anglade confie : « « tout est parti d’un premier rôle fort, L’homme blessé. J’étais là au bon moment ».
Jean-Jacques Beineix voulait une actrice inconnue pour le premier rôle de son film, contrairement au premier producteur qui souhaitait Isabelle Adjani. Dans une émission diffusée sur France 2, au moment des 20 ans du film, Beineix est revenu sur cette période : « je voulais une inconnue. Point. Mais, on me disait, vous allez la trouver quand votre inconnue ? Et puis elle est arrivée. On m’a donné cette photo et j’ai dit cette photo, c’est l’affiche du film ». Dans un bonus réalisé pour l’édition DVD des 20 ans, il précise : « Il y avait des inconnus dans Diva. On ne peut pas dire que ça avait été un inconvénient pour le succès du film. Je pensais que pour 37,2, il fallait suivre exactement la même voie. » Selon Jean-Hugues Anglade, « il était vraiment en réaction contre le star système, contre les stars. Nous étions deux jeunes acteurs, nous n’avions pas d’étoile, si ce n’est notre étoile à suivre ».
Selon Béatrice Dalle, une voyante lui avait prédit sa destinée : son mariage à 20 ans et un métier qui la fera connaitre. Le rôle de Betty a fait de Béatrice Dalle une grande star française du jour au lendemain. Avec ses lèvres pulpeuses, elle a vite été promue nouveau "sex-symbol" du cinéma français.
Selon Jean-Jacques Beineix, Béatrice Dalle est « une nature née actrice, avec un petit truc particulier. Au début j’ai eu un doute très léger parce qu’il y avait quelque chose d’un peu décalé. On pourrait dire un peu faux. Mais souvenez-vous, Brigitte Bardot, elle joue un peu faux, et c’est ce faux qui apporte quelque chose de supplémentaire, une sorte de décalage par rapport à un jeu réaliste. Elle a une nature, elle a une sensualité, une beauté. J’étais fasciné par sa beauté ! ». (source : Europe 1, juillet 2013)
37°2 le matin montre la passion torride de Betty et Zorg. Dès les premières minutes, le spectateur est témoin de cet amour charnel avec une scène d’amour très sensuelle. Jean-Hugues Anglade se souvient de cette scène comme « un choc très fort ». « On n’a pas fait l’amour devant la caméra de Jean-Jacques, mais Jean-Jacques a profité de la très grande complicité qu’il pouvait y avoir entre Béatrice et moi. Chacun est allé aux frontières de la vie et de la fiction. », poursuit-il. « C’était une scène difficile à tourner. Elle est vraiment à l’image de ce que nous étions ».
Pour l’anecdote, au départ, Jean-Jacques Beineix n’avait pas l’intention de commencer le film par cette scène : « Ce n’est pas venu tout de suite. Cette scène venait comme une sorte de premier escalier, premier étage d’une relation qui s’installait dans l’érotisme et la sensualité. Puis au cours du montage, je me suis dit enlevons la première bobine, l’acte 1, et commençons par là. Quoi de plus simple qu’un plan-séquence à partir du moment où on a deux acteurs d’une beauté incroyable. » (source : Europe 1, juillet 2013)
37°2 le matin est le plus grand succès de Jean-Jacques Beineix. Plus de 3,6 millions de spectateurs se sont rendus dans les salles lors de la première sortie du film le 9 avril 1986 (le film est ensuite ressorti le 27 juin 1991). Le film a également eu un certain retentissement à l’étranger et a notamment été nommé à l’Oscar du meilleur film étranger. Pour tenter d’expliquer le succès a posteriori, Jean-Jacques Beineix avance les arguments suivants : « C’est une histoire d’un amour, une grande histoire d’amour. Elle a été incarnée par des gens qui avaient une grâce. Si on regarde Betty, c’est une révoltée. Les Betty de 20 ans aujourd’hui, elles sont encore plus révoltées. Il y avait quelque chose de la modernité de notre époque. Et puis c’était Roméo et Juliette. Mais en même temps, il valait mieux que ça finisse mal plutôt de vivre une vie médiocre. J’ai l’impression que dans le monde entier, il y a des gens qui ont eu ce sentiment. » Selon Béatrice Dalle, le succès tient peut-être à la possibilité d’identification aux comédiens : « peut-être parce que les deux acteurs étant inconnus, les gens ont pu y croire ». (source : France 2, mai 2006)
37°2 le matin est la première adaptation d’un roman de Philippe Djian. D’autres livres de l’auteur ont depuis été porté sur grand écran : Bleu comme l’enfer, par Yves Boisset en 1986, et Impardonnables, par André Téchiné en 2011. Dans le making of de 37°2 le matin, Djian confie : « j’ai beaucoup d’admiration pour ce que fait Beineix, pour son travail. C’est un auteur. » Et d’ajouter avant que le film ne sorte : « j’attends de lui qu’il apporte tout son art, toute sa force, c’est important quand même. On passe de quelque chose d’écrit à quelque chose de très visuel, qui est le cinéma. Je ne peux pas m’attendre à une espèce de transposition exacte de ce que j’ai fait. Mais j’attends beaucoup de ce qu’il va faire. Il a changé pas mal de choses par rapport au roman et c’est bien. Au début j’avais un peu peur. Et en fait, il a raison. Il faut qu’il change ça, qu’il adapte ça pour le cinéma ».
Le tournage a connu des difficultés au démarrage. Il a été arrêté pendant 6 mois. Selon Jean-Jacques Beineix, il a commencé par un procès car les droits du livre étaient bloqués. « Nous avons été obligés d’aller devant les tribunaux pour récupérer les droits du bouquin », a expliqué le réalisateur dans une interview à Europe 1.
Quelques comédiens ont été coupés au montage de la version initiale, mais leurs scènes ont été intégrées à la version longue sortie à l’occasion des 20 ans du film. D'une durée initiale de 121 minutes, 37°2 le matin passe dans sa version longue à 188 minutes. Parmi les acteurs crédités dans cette nouvelle édition, Simon de La Brosse, Jessica Forde, Claude Duneton, Rabah Loucif et Fabien Behar.
Avec son dégradé de bleu et le portrait de Béatrice Dalle, l'affiche de 37°2 le matin a marqué les esprits. Elle a d'ailleurs reçu le César de la meilleure affiche lors de 12e cérémonie des César. Pour l'anecdote, c'est le seul prix remporté par l'équipe du film alors qu'il était cité à neuf reprises dont César du meilleur film, meilleur acteur et meilleure actrice !
37°2 a été tourné à Gruissan dans l’Aude. Ses chalets sur pilotis et sa lumière dorée donnent à ces paysages un faux air d’Amérique. Comme le raconte Jean-François Robin, directeur de la photo, dans un carnet de tournage en ligne, l’idée était de trouver une lumière dorée. « Dans ses films, Jean-Jacques avait l’habitude de mettre en image des visages et des décors un peu froids, comme dans Diva par exemple. Pour ma part, je trouvais que 37°2 était tout le contraire d’un film froid : c’était un film qui sentait la transpiration, la chaleur, la sueur, la sensualité… (…) Nous avons commencé à travailler la lumière telle qu’on la découvre à l’écran : chaude, saturée, formelle, avec des couleurs franches s’inspirant des diapositives Kodachrome. » Et d’ajouter : « Nous étions très vigilants sur les horaires de tournage afin d’être sûrs d’avoir l’ensoleillement idéal. Ainsi, certaines séquences devaient être tournées à des heures très précises, et un simple quart d’heure de retard aurait compromis l’esthétique du plan. C’était un vrai travail de précision, tant pour les extérieurs que pour les intérieurs : il fallait arriver à dominer la couleur de ma lumière afin d’avoir toujours la même tonalité. »