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inspecteur morvandieu
15 abonnés
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4,5
Publiée le 25 décembre 2023
Le film de Claude Chabrol raconte l'obstinée volonté d'un homme de retrouver et d'assassiner le chauffard qui a tué son fils. Avant d'entrer dans le vif du sujet et d'illustrer la froide résolution de Charles Thénier, Chabrol évoque avec sensibilité son épreuve douloureuse et le raisonnement qui pousse cet homme intelligent et lucide à la vengeance. Et l'attitude du personnage joué par Michel Duchaussoy est d'autant plus convaincante qu'elle exclut totalement, de la part de Chabrol, l'idée d'auto-justice et les relents populistes qui l'accompagnent couramment. Car Thénier est tout sauf un beauf. On ne peut pas en dire autant de l'homme qu'il traque que le hasard va enfin aider à identifier. L'apparition de Jean Yanne au milieu du film est d'ailleurs un grand moment. L'homme est immonde, d'une grossièreté et d'une brutalité inouïes, qui tyrannise son entourage et incarne, de surcroît, cette bourgeoisie de province que Chabrol ne manque jamais de railler. Dans l'antre de l'ignoble Decourt, Thénier attend son heure. La force du récit de Chabrol est de ne pas tout sacrifier au suspens introduit par la situation (et en dépit qu'il ne fait pas mystère sur l'identité du chauffard). Le cinéaste renforce l'intérêt et la crédibilité en préservant la gravité initiale du sujet et en insérant des indices psychologiques grâce auxquels les personnages sont, plus que des figures typées de roman noir, les sujets d'un authentique drame humain. L'interprétation est superbe et la maîtrise, l'intelligence de la mise en scène sont évidentes.
(Spoiler) super film mais il y a un truc incohérent : quand Jean Yann chute au bord de la mer, il se rend bien compte que duchaussoy est pas parti pour l’aider... or après, il ne lui en tient pas rigueur... et accepte même l’invitation sur le bateau...
Un polar dramatique efficace et sombre, avec deux grands acteurs, et la présence de Caroline Cellier qui ne gâte rien. Néanmoins, la réalisation est à mon avis par trop académique, ce qui est bien pratique pour cacher certaines invraisemblances, et colle assez mal avec le jeu de Yanne : on a presque l'impression, dans certaines scènes de la seconde moitié, qu'il y a deux films différents, celui de Michel Duchaussoy et celui de Jean Yanne. Il faudrait presque faire un remake !
J’ai vu ce film en 2019, lors d'un passage sur ARTE : le film apparaît bien vieilli. Il n'y a d'ailleurs que celà qui en fasse le charme : les vieilles voitures, les costumes, la vie quotidienne d'alors, pendant les trente glorieuses. Pour le reste, l'intrique policière ne passe pas. Les ficelles sont grosses, pour ne pas dire grotesques. Par exemple la scène où Jean Yanne, marchant au bord de la falaise, glisse dans le vide. Il crie pour que Michel Duchaussoy (qui veut venger la mort son fils écrasé par Jean Yanne) vienne l'aider. Michel Duchaussoy ne fait rien, laisse une trentaine de secondes Jean Yanne pendu dans le vide se raccrochant du bout des doigts à la falaise (ça rappelle la fameuse scène de "Mort aux trousses" sur le Mont Rushmore - mais en infiniment moins bien filmé, moins angoissant..). Pire, il va chercher une grosse pierre pour lui écraser les doigts sans doute... Tout ça sous les yeux de Jean Yanne qui s'époumone "vous n'allez pas me laisser comme ça.. aidez-moi...". Mais Michel Duchaussoy, se ravisant quand il entend les voix des autres qui arrivent, repose la pierre au sol et va enfin tendre la main à Jean Yanne pour qu'il puisse se hisser en haut de la falaise. Eh bien, ensuite Jean Yanne, comme s'il n'avait rien vu ni compris au manège de Michel Duchaussoy, qui l'a laissé pendouiller dans le vide plusieurs dizaines de secondes, non seulement n'en veut pas à Michel Dussaussoy, mais devient son grand copain. De la façon dont c’est présenté et filmé, c'est complètement irréaliste, pour ne pas dire ridicule. Et on pourrait critiquer de la sorte tous les rebondissement - ou pseudo-rebondissements - du film. Et on dit que c'est un film hitchcockien !!! Laissez-nous rire. C'est un très mauvais Chabrol. On passe sur les lieux communs de la critique de la bourgeoisie (soit-dit en passant, de la très petite bourgeoisie de Province...) qui fit les délices des intellos de gauche des années 60, celle des inénarrables soixante-huitards.
Un film au récit intelligent, je dirais même au langage intelligent qui malheureusement se laisse porter par le langage littéraire plutôt que par le langage cinématographique. Chabrol, qui améliore de film en film son intérêt pour le suspense, le mystère et l'enquête, ne s'est pas assez préoccupé du médium qu'il avait dans les mains. Peut-être qu'il a manqué de temps, ou qu'il ne l'a pas pris..
C'est bien dommage. Tout expliquer nous fait perdre le goût des belles interventions, comme ce final sur le vier ernste Gesänge de Brahms, dont la dimension théologique est grandement signifiante, car le titre du film comme la pièce s'accordent sur un verset de l'ecclésiastique (3.19) qui éclaire tragiquement d'une lumière nouvelle tout le récit: l'homme et la bête sont indissociables, leur coexistence est une fatalité.
Chabrol n'a pas su être à la hauteur du scénario de Paul Gégauff, admirable scénariste, notamment de "plein soleil", chef d'oeuvre de René Clément.
Tourné durant la même période que Le Boucher avec le même Jean Yanne, Que La Bête Meure rappelle la meilleure période de Claude Chabrol. En 1969 et à presque 40 ans, lun des réalisateurs les plus prolifiques du cinéma nous replonge dans lesthétisme du milieu bourgeois, avec lambiance sombre quon lui connaît si bien, Brahms en plus. Mais un milieu bourgeois largement mis à mal. Car là, un célèbre écrivain (Michel Duchaussoy) na plus quun but : éliminer de quelque manière lhomme coupable (Jean Yanne) de laccident de son fils, lui-même beau-frère dune célèbre actrice de cinéma (jouée par Caroline Cellier, lépouse de Jacques Brel dans Lemmerdeur). Où quand un intellectuel retourne à létat le plus primaire de lhomme, incarné ici par lintemporelle vendetta. Avec la prestation magistrale de Duchaussoy, on sétonne que la carrière de cet acteur nait pas obtenu une meilleure aura par la suite, même si on le revoit toujours fréquemment (Le Plus beau jour de ma vie par exemple). Jean Yanne quant à lui, joue son personnage le plus hideux et le réalisateur Maurice Pialat apparaît de manière surprenante, en inspecteur. Jouant sur une psychologie percutante et des émotions humaines à leur paroxysme, tout en proposant une histoire policière alléchante, Chabrol prouve ici son surnom dHitchcock français, et réalise probablement le film le plus symbolique de sa carrière. Indémodable.
Excellent film. Les 3 acteurs sont au sommet : Jean Yanne, Michel Duchaussoy bien sûr mais caroline Cellier n'est pas en reste. Elle est magnifique de retenue, de sensibilité.
"Que la bête meure" est sans nul doute mon œuvre préférée de Chabrol. L'histoire raconte la tragédie que vit Charles Thénier (incarné par Michel Duchaussoy) qui a perdu son fils, percuté par un chauffard. Il se jure alors de le retrouver et de le tuer, peu importe le temps et les conséquences. Le scénario prend peu à peu, l'apparence d'une tragédie homérique, Chabrol réactualisant le mythe d'Oedipe. Le film est éprouvant, noir mais c'est un chef d'œuvre de bout en bout. Lorsqu'au fil de ses pérégrinations, Charles Thénier retrouve par "hasard", le meurtrier de son fils, il s'attèle à bâtir sa stratégie de vengeance. Il avait peur de tomber sur une personne gentille pour lequel, il aurait eu des scrupules mais là il tombe sur un "salaud" de premier ordre, interprété par un Jean Yanne qui s'en donne à cœur joie. La scène où on le découvre est en cela symbolique, à peine rentrer dans la maison, on ne le voit pas mais on l'entend déjà vociférer ; puis il rentre enfin dans la pièce, et d'invectives en sarcasmes, il taille en pièces toute la famille rassemblée. C'est contre ce monstre, que Charles Thénier tient sa vengeance. Mais en le tuant, il deviendrait lui aussi une bête. A la fin du film, on entend cette phrase lourde de sens et qui résume cette dualité : « Il existe un chant sérieux de Brahms qui paraphrase l'Ecclésiaste : "Il faut que la bête meure ; mais l'homme aussi. L'un et l'autre doivent mourir." »