Le réalisateur confie : "J'avais envie de raconter l'histoire de gens dont on ne parle pratiquement jamais, sauf de manière anonyme dans la presse pour dénoncer ces actes. L'attentat suicide est un acte extrême, que je condamne, mais ce qui m'intéressait c'était de raconter une histoire de l'intérieur et de partir, non pas de l'acte en lui-même, mais du processus qui conduit ces hommes à commettre de tels actes. Nous ne sommes que très rarement, voire jamais confrontés à leur version des faits. Comment se justifient-ils, non seulement par rapport à leur famille mais aussi par rapport à leur propre conscience ?"
Kais Nashef et Ali Suliman, les deux comédiens qui interprètent Said et Khaled, deux amis inséparables, font ici leurs grands débuts à l'écran.
Centré davantage sur les motivations qui poussent les kamikazes à se faire exploser, le film dévoile une partie rarement explorée. Le réalisateur explique:"Nous avons tous vu des images d'attentats ou plutôt les heures qui suivent un attentat mais jamais personne n'a été témoin des instants qui précèdent l'explosion. C'est précisément de ce moment là dont je voulais parler".
Le réalisateur a consacré beaucoup de temps à étudier des interrogatoires de kamikazes dont les attentats avaient échoué, à rencontrer des proches, famille ou amis et à lire les rapports officiels des autorités israéliennes pour éviter absolument les stéréotypes. Selon lui :"(...) en Palestine la plupart des Kamikazes n'étaient pas des activistes purs et durs, mais des hommes ordinaires ".
Il y a deux ans, Hany Abu-Assad s'était distingué en réalisant Le Mariage de Rana, un jour ordinaire à Jérusalem qui retraçait la quête d'une jeune palestinienne pour trouver un mari. Le réalisateur palestinien retrouve son pays et s'attache cette fois à décrire l'histoire d'une amitié profonde entre deux hommes confrontés à une réalité rude et sacrificielle dans les territoires occupés.
Bien que le film soit tourné en Palestine et réalisé par un cinéaste palestinien, la production quant à elle est très cosmopolite voire européenne. Une partie du budget provient d'un fond de financement israëlien et pour le reste de la France, des Pays-bas et de l'Allemagne. Autre emprunt à l'Allemagne : la langue. En effet, le film a entièrement été tourné en allemand.
Du propre aveu du réalisateur, la Cisjordanie sous occupation est une région qui ressemble au Far West. "C'était une idée totalement démente de vouloir tourner là bas. Chaque jour, à un moment ou à un autre, nous devions arrêter le tournage. Nous étions forcés d'attendre que les échanges de coups de feu s'arrêtent pour pouvoir poursuivre notre travail. Les Israëliens et les Palestiniens sont habitués à voir de petites équipes de télévision mais notre équipe était composée de plus de 70 personnes et de 30 camions. En aucun cas, nous ne pouvions nous échapper rapidement ou nous cacher. " Les mauvaises conditions de tournage ont même incité six techniciens allemands à partir après qu'une voiture qui roulait a proximité du plateau ait été touchée par un missile israélien. De plus après l'explosion a l'endroit du tournage, l'équipe a été obligé de quitter Naplouse pour partir en sécurité à Nazereth.
A sa projection lors du Festival du Film de Berlin, le film n'a pas manqué de soulever son lot de controverses. En cause, la glorification supposée des terroristes qui commettent des attentats suicide. A la conférence de presse organisée lors du festival, les producteurs ont contredit les critiques qui affirmaient que le film prenait position en faveur d'Israël ou Palestine. "Nous avons simplement essayé de raconter une histoire qui démonte le mythe des deux extrêmes et qui se focalise plutôt sur le facteur humain" affirme le co-producteur Bero Beyer. Amir Harel, le producteur espère quant à lui que le film donnera de l'espoir aux deux camps. "La grande tragédie de l'occupation, c'est la façon dont elle corrompt aussi bien Israël que Palestine. Il est important qu'israëliens et palestiniens voient le film".
Le film, présenté en compétition pour l'Ours d'or, à remporté le prix Amnesty International ainsi que le Prix du Meilleur Film Européen et le prix du Public au Festival du Film de Berlin 2005.