Deuxième volet du triptyque de la vengeance de Park Chan-wook, Old Boy est l'adaptation du manga homonyme racontant l'histoire d'un père de famille séquestré pendant quinze ans, Oh Dae-Soo, qui tente d'obtenir vengeance en retrouvant son ravisseur. Autant le dire d'entrée, ce film est un chef-d'oeuvre rare et virtuose qui nous entraîne dans intrigue haletante et surprenante par son final, grandiose.
Comme le synopsis le dit si bien, le film suit le thème de la vengeance avec intelligence et exploite parfaitement son sujet. Car ici, la vengeance n'est pas simplement un prétexte mais une vraie réflexion sur la nature de l'homme qui se définit par ses actes. On se retrouve donc face à des scènes choc, brutales où l'horreur n'est que suggéré, mais suffisamment pour amener un climat très sombre, à la limite du malsain. Park Chan-wook joue donc parfaitement sur les non-dits pour ne jamais dépasser les limites tout en rythmant son film avec ces scènes qui s'inscrivent dans le contexte pour ne jamais paraître superflu, mais nécessaire. Car le film pose aussi le problème de la nécessite de cette violence, de sa justification à travers les motivations d'Oh Dae-Soo qui, bien que paraissant raisonnables, sont toujours vu avec du recul et une grande maturité.
Mais Old Boy se distingue aussi par sa mise en scène, sublime et originale. Car si le film traite un sujet très sombre, sa mise en scène prend là aussi un certains recul sur cette violence pour apporter une touche plus esthétique qui s'allie à cette ambiance plus violente. En voyant ce film, on est autant choqué devant cette violence qu'admiratif devant la beauté des plans. Old boy se caractérise donc aussi par son soin apporté à l'image, qui, à l'aide d'un montage parfait et d'une bande originale décalée mais poignante, permet une plongée dans cet univers, une immersion entière qui ne nous laisse pas le temps de sortir du film, ne serait-ce qu'une seule seconde. Le montage est d'ailleurs l'élément essentiel de la gestion de la violence du film, suggérée avec une habilité déconcertante. La bande originale, quant à elle, instaure définitivement un climat surréaliste et prenant avec l'utilisation d'oeuvres diverses et variés comme le premier mouvement du mois d'hiver des quatre saisons de Vivaldi qui transforme un plan séquence violent en une scène teintée de poésie, apportant un côté étrangement serein dans ce déchaînement de violence.
L'autre aspect que l'on se doit d'aborder avec Old Boy est aussi scénaristique. Car si la mise en scène aide à nous immerger dans cet univers, le scénario nous tient quant à lui en haleine du début à la fin, totalement inattendue. Si le film aurait pu se contenter de suivre la vengeance d'Oh Dae-Soo sous la forme d'un road movie, Park Chan Wook fait ici le choix d'utiliser une intrigue plus dense et originale qui ne nous laisse pas une seconde de repos. En effet, en plus de disposer de l'un des meilleurs retournement final, le scénario fait monter la tension crescendo en forçant Oh Dae-Soo à fouiller dans son propre passé pour trouver son ravisseur. Ce scénario est aidé d'une narration incroyable, capable de mélanger présent et passé sans jamais se perdre tout en offrant une chronologie des évènements précise dans les recherches d'Oh Dae Soo
Avant de conclure, j'aimerais mettre en lumière la prestation grandiose des acteurs qui jouent à merveille leurs rôles très durs. Min-Sik Choi tout d'abord nous offre une interprétation à la hauteur de son personnage, complexe et humaine. Il contribue ainsi à apporter un côté d'autant plus réaliste dans son interprétation sans jamais tenter d'en faire trop. Ji-Tae Yu joue quand à lui le rôle du grand méchant avec beaucoup de charisme mais aussi de sensibilité, passant au delà de la violence du personnage pour en faire un homme tout aussi torturé. Nous avons enfin l'excellente Hye-Jeong Kang qui jour le rôle de Mido, une jeune fille aidant Oh Dae-Soo dans sa quête de vengeance. Elle interprète un personnage fragile et tendre dont on tombe tout de suite sous le charme enfantin.
Ainsi, Old Boy est un chef d'oeuvre complet et puissant qui jouit d'un scénario particulièrement prenant et tordu et d'une mise en scène impeccable.