Il y a des films qui exercent sur vous quelque chose d’indescriptible : vous vous laissez happer par ce que vous voyez à l’écran et vous ne pouvez pas détourner les yeux une seul seconde jusqu’à vous faire complètement retourner la tête. C’est ce que j’appelle un film coup de poing : un film qui vous marquera et restera à jamais gravé dans votre mémoire. Vu mon âge et ma consommation cinématographique annuelle, je peux vous assurez que j’en ai vu des films de cet acabit et tous les énumérez serait long et fastidieux mais je vais tout de même en citer quelques uns qui m’ont vraiment marqué : "2001, L’Odysée de l’Espace", "Apocalypse Now", "Usual Suspect", "Blade Runner, "American History X", "Mazgnolia", "Reservoir Dogs", "Orange Mécanique", "Fight Club", "Transpotting", "Dark City". Mais aujourd’hui, je vais pouvoir sans hésiter en rajouter un nouveau : "Old Boy". Le scénario nous narre l’histoire de Oh Dae-Su, salary man typique qui se retrouve enlevé mystérieusement après une nuit d'ivresse. Il se retrouve dans une sorte de chambre d’hôtel miteux au sein de laquelle il demeurera séquestré durant 15 ans. Sans savoir pourquoi ni comment, il se retrouve à l’extérieur, libre. Dès lors, Oh Dae-Su n'a qu'une idée en tête : trouver qui lui a fait perdre 15 années de sa vie et se venger…Déjà, on ne peut pas dire que le scénario ne soit pas original et il possède une telle force que nous restons scotchés devant l’écran du début à la fin pour savoir où cette histoire infernale va nous emmener. Oui, car le récit de "Old Boy" suit une ligne directrice précise concentré sur son personnage principal, suivant ainsi peu à peu l’évolution psychologique de ce dernier : au début, nous voyons un homme tout ce qu’il y a de plus normal ayant un peu trop forcé sur la bière et se retrouvant comique malgré lui, en essayant de justifier son état aux policiers. Ensuite, lors de son emprisonnement, l’homme cède successivement à l’incompréhension, la colère et la pseudo-folie, mais parvenant à tenir uniquement par son désir de s’échapper. Une fois libre, le héros devient un vrai badass prêt à tout pour savourer sa vengeance. Pour finir, une fois ayant ouvert une boîte de Pandore (ici un album photos), par se prendre de plein fouet la cruelle vérité le laissant dans le désespoir le plus total. Cette histoire diabolique (jamais le terme « vengeance » n’a connue plus incroyable incarnation cinématographique !!) est sublimée à l’écran par la mise en scène techniquement parfaite de Park Chan-Wook, nous proposant un joli panel de savoir-faire allant du plan fixe sobre aux longs travellings maîtrisés, amenant plusieurs scènes chocs qui en marqueront plus d’un : emprisonné, Oh Dae-Su se retrouve attaqué par une multitude de fourmis ; le gobage du poulpe ; l’arrachage de dents au marteau ; le dernier geste totalement fou de notre héros lors de l’incroyable révélation. Et il faut aussi rajouter LA scène du film : un formidable plan-séquence de presque trois minutes (énorme !) filmé en travelling latéral où l’on voit Oh Dae-Su se battre contre une horde de voyous ! Fabuleuse, cette séquence est d’un réalisme incroyable ne serait-ce que par l’absence d’une chorégraphie parfaitement huilée comme on a l’habitude de voir dans les films asiatiques et par le fait que notre héros s’arrête par moment pour reprendre son souffle entre deux salves de coups portés. La musique est très bien utilisée aussi : souvent douce et mélancolique, elle apporte un léger paradoxe avec l’ambiance noire générale du film qui lui donne une certaine personnalité et nous permet aussi, à nous spectateurs, de ne pas totalement sombrer dans le nihilisme (voyez comment la violence est subtilement atténuée lors de la scène d’arrachage de dents par les violons du morceau classique qui l’illustre). Si "Old Boy" est une expérience inoubliable, c’est aussi en grande partie (et pas qu’un peu !!) grâce à la prestation monstrueuse de l’acteur principal, énorme star en Corée, Choi Min-Sik. Formidable du début à la fin, le coréen nous livre un jeu d’acteur rarement vu qui se révèle être un véritable vaisseau émotionnel de Oh Dae-Su : on rit devant ses mimiques et ses gestes burlesque quand il est au commissariat, on est perdu sans aucun repère comme lui lorsqu’il est enfermé, on compatit lorsqu’il se masturbe devant une chanteuse, on subit sa transformation physique, on comprend sa détresse lorsqu’il se retrouve à nouveau dans le monde après 15 ans d’enfermement, on ressent sa jouissance lorsqu’il refait l’amour à une femme, on est subjugué par sa colère lorsqu’il se bat, on ressent un certain malaise lorsqu’il se souvient de son « erreur passée », on est terrifié lors du monstrueux twist scénaristique final à la vue de la dernière page de l’album, on espère avec lui lors de l’épilogue. Les autres acteurs ne sont pas en reste, qu’il s’agisse de Hye-Jeong Kang qui interprète la jolie et pure Mido, ou de Ji-tae Yu en grand vilain, à la fois très classe et très émouvant ; mais Choi Min-Sik est si fantastique qu’il arrive parfois à éclipser totalement ses camarades !
Etrange poème malsain, conte moderne excessif, baroque et cruel, "Old Boy" est sans conteste une incroyable bombe, l’un des meilleurs films que j’ai pu voir dans ma vie de cinéphile. Avec une réalisation remarquable, une esthétique léchée, des thèmes dérangeants et une violence psychologique et graphique explosive, "Old Boy" n'est pas à mettre entre toutes les mains (ou plutôt sous tous les yeux) mais demeure une œuvre incontournable. Abolute must have or see !!