On dit toujours que les vieux films sont les meilleurs, là on est sur du 1947 et je n’accroche pas, mais j’irais plus loin : ce n’est pas génial, loin de là.
Si le noir et blanc passe bien, que la construction ainsi que l’esthétisme du final sont soignés, et que le résultat n’est pas affreux, on s’arrête là pour les bons points, cela fait peu. Je modérerai même un fait : le montage est pas mal, la mise en scène également, mais la trame est trop simple et l’histoire se complexifie sans raisons. Vous me direz que c’est inspiré d’une nouvelle de Sherwood King qui était déjà embrouillée, certes. Cela donne un ensemble trop alambiqué, pas forcément difficile mais chiant à suivre, accentué par de nombreuses longueurs ça en devient lourd. Rajoutons que c’est lent à démarrer (le rythme prend le relais ensuite), soporifique car il ne se passe rien, prévisible, mou et que l’on a rien pour nous réveiller, vous comprendrez ma note.
Pour un thriller sombre on est plus dans l’obscur, et la psychologie des personnages, si importante dans ce registre, est juste reléguée au second plan, limite oubliée. C’est là que l’on voit les limites d’Orson Welles dans la réalisation : il veut trop en faire, il essaie de montrer l’étendue de sa palette, mais à trop passer en force dans la quantité il en oublie la qualité. Cependant, il réalise mieux qu’il ne joue, même si là cela demeure médiocre malgré la scène des miroirs et la fin. Il se montre trop, tant dans le jeu que dans la réalisation, un film à sa gloire en somme, donc tout est trop surfait/superficiel. J’irai même plus loin en disant qu’on voit son égo surdimensionné dans cette vendetta envers Hollywood, et que ça fait très prétentieux. Au moins ça permet qu’il joue bien son personnage froid, boursouflé d’orgueil, à la condescendance supérieure et cynique, mais je tends à penser que c’est sa nature plus qu’un rôle.
Le reste du casting est pas mal (Rita Hayworth), mais ça ne relève pas le niveau de jeu. En effet, les acteurs sont plutôt agaçants car trop peu réalistes, trop maniérés, pour plaire. Surtout que Welles en profite pour régler ses comptes en faisant jouer à son ex femme le rôle d’une mante religieuse cupide, oubliant de creuser plus le personnage, ça tombe à plat. Les dialogues suivant cette tendance ça plombe. Ce sont les codes de l’époque, mais ça mal vieilli. Si on complète par le fait que les décors sont mal faits, que la musique est peu fréquente et à peine passable, qu’il n’y a pas de FX (c’est pas un mal) et que les décors sont à peine visibles, on obtient un thriller loupé.