Après avoir tourné le court métrage L’Avant dernier, le duo Luc Besson-Pierre Jolivet écrit un scénario de long métrage : Subway. Faute de moyens financiers nécessaires, ils décident entretemps de réaliser une version longue de leur court métrage : Le Dernier Combat.
Le succès critique remporté par ce dernier (Prix spécial du Jury du Festival d’Avoriaz) permet au duo de pouvoir mettre en image Subway. Cependant, les relations entre les deux compères ayant commencé à se dégrader dès la récompense de leur précédent film et allant de mal en pis, le résultat final correspond plus à la vision de Besson qu’à celle de Jolivet. Malgré tout, au vu des œuvres suivantes des deux hommes, on peut penser que le fait de décrire la vie de marginaux est un apport important de la part du futur réalisateur de Fred.
Pour le reste, le film porte indéniablement la patte de Besson. Ainsi, le personnage de Christophe Lambert possède l’aspect un peu naïf et de grand enfant typique du réalisateur
(il est fasciné par une photo du personnage d’Adjani âgé de seulement 9 ans, détail laissant rétrospectivement un goût étrange après les polémiques autour de Léon et le fait que quelques années plus tard le cinéaste épousera Maïween Le Besco alors que celle-ci n’avait que 15 ans)
. De même, l’irréalisme de certaines évolutions de personnages et certaines facilités de scénario
(la relation entre Héléna et Fred qui devient brusquement une histoire d’amour partagée rend la fin assez peu crédible, fin ne possédant pas de réel climax et étant assez expédiée)
annoncent les points faibles en tant que scénariste que l’on reprochera plus tard à Besson (en particulier pour ses productions qu’il ne met pas en scène).
Ces faiblesses ne doivent pas pour autant gommer les côtés positifs du film. Ainsi, les acteurs produisent de belles performances (même si celles d’Adjani et de Lambert semblent volontairement assez irréelles) : Michel Galabru (dans le rôle du commissaire Gesberg : hommage à son mythique rôle d’adjudant Gerber dans la série des Gendarmes ?) est comme toujours génial, Richard Bohringer est parfait, Jean-Pierre Bacri est excellent dans un rôle annonçant ses futurs emplois de personnages bougons, Jean-Hugues Anglande est plein de fougue dans un de ses premiers rôles et Jean Reno offre une plus grande palette de jeu que dans la plupart de ses futurs rôles…
D’un point de vue visuel, le talent de Besson est déjà à l’œuvre. Comme à son habitude, le cinéaste utilise le cinémascope de manière splendide. Il possède un sens visuel indéniable et s’amuse avec les mouvements de caméras dans les scènes de poursuites (on peut même voir dans la poursuite en voiture inaugurale mélangeant action et humour avec le personnage du jogger les prémisses de la série Taxi). Toutefois, il arrive à livrer une séquence des plus mémorables en misant sur la simplicité et sur le talent de Michel Galabru avec la séquence du fameux "Police, menottes, prison".
Enfin, il ne faudrait pas oublier de mentionner la présence à la musique de l’habituel Eric Serra (qui co-signe notamment le célèbre It’s only mystery) et aux décors d’une légende de la profession : Alexandre Trauner (L’Âge d’or, Drôle de drame, Quai des brumes, Hôtel du nord, Les Visiteurs du soir, Les Enfants du Paradis, Coup de torchon, Tchao pantin ne sont que quelques uns des films où il a apporté sa patte) qui nous permet de découvrir les recoins méconnus du métro parisien.
Malgré certaines faiblesses scénaristiques (cet aspect est toujours le point noir du cinéaste), Subway reste toujours un film assez plaisant où le cinéaste fait preuve de son incontestable sens visuel.