J'avais une crainte en allant voir Suzume, c'était de retomber sur une histoire à la Your Name. Car après les Enfants du Temps qui malgré ses nombreuses qualités, présentait finalement une structure narrative et un style assez proches du premier chef d’œuvre de Makoto Shinkai, l'enjeu était réellement de voir si le réalisateur n'allait pas s'enfermer dans ce schéma narratif et s'il pouvait nous proposer autre chose.
Et heureusement oui, du moins pas entièrement. Car en effet, si la structure narrative est très similaire à celle de ses deux films précédents, une histoire d'amour entre deux adolescents (ou plutôt un jeune adulte pour Sôta) qui vont à travers leur histoire empêcher une catastrophe naturelle, la comparaison s'arrête là.
On part ici sur un road movie sur fond de voyage initiatique pour l'héroïne Suzume, un voyage où elle va peu à peu trouver son identité, ou plutôt la retrouver et guérir des blessures de son passé.
un passé tragique où des indices semés au fil de l'histoire prennent tout leur sens lorsqu'on découvre que la mère de Suzume est décédée lors du terrible tremblement de terre de 2011, simplement révélé par la date (11 mars) dans le journal intime de l'héroïne.
Et si ses films précédents laissaient la part belle à des scènes remplies d'émotion à vous mettre les larmes aux yeux, l'ambiance est ici plus posée, plus apaisée, comme si à l'image de son héroïne Suzume qui entre dans l'âge adulte, le réalisateur avait définitivement trouvé sa patte et son style pour nous offrir un film qui puisse le libérer du poids et de la comparaison avec Your Name.
On a quand même droit à une scène poignante en fin de film lorsque Suzume retrouve son moi du passé et parvient à la consoler. La symbolique est magnifique, alors qu'elle pensait jusque là que c'était sa mère qu'elle avait retrouvée pour la consoler, et se retrouve désarmée devant la détresse de son moi-enfant, et à raison car elle sait parfaitement ce que cette petite fille qui pleure devant elle a vécu, elle finit par trouver le courage et les mots pour la consoler, guérissant ainsi par elle-même une blessure de son enfance. Si simple et si beau.
Même musicalement, la J-Pop de Radwimps qu'on retrouvait tout au long de ses deux films précédents a laissé sa place à de belles partitions plus contemplatives qui se marient parfaitement à l'aspect road movie du film.
Et pour l'animation il n'y a absolument rien à redire, c'est beau, c'est vivant, ça grouille de vie, et c'est rempli de poésie, le style visuel de Makoto Shinkai, si reconnaissable, est ici sublimé par ces plans et paysages de différentes régions du Japon.
Bref, pari réussi pour Makoto Shinkai, l'animation japonaise a de beaux jours devant elle avec un tel réalisateur.