J'étais un peu récalcitrant à l'idée de regarder ce film parce que je ne suis pas fan de C'est arrivé près de chez vous et le mélange Benjamin Biolay et "histoire qui pourrait être la nôtre" sentait le film de bobos à plein nez. Cependant, Bonzel parvient à faire quelque chose d'assez remarquable, c'est-à-dire réussir en racontant l'histoire de sa famille, ses souvenirs de jeunesse et ses amours perdus, à retracer, en quelque sorte l'histoire du cinéma... comme ça, sans avoir l'air de trop y toucher... Le tout en étant assez touchant.
J'aime assez le procédé qui consiste à récupérer des images, à se les approprier et faire comme si ces images de parfaits inconnus illustraient notre propre vie. Tout ça me rappelle un peu le cinéma de Jay Rosenblatt dont j'admire le travail.
Donc Bonzel en mélangeant ses vidéos issues de ses archives familiales et celles de parfaits inconnus évoque, sans détour, la vie. J'insiste sur le "sans détour", parce que ça fait la force du film, il n'a pas honte d'évoquer des gens de sa famille qui ont collaboré, qui ont balancé ensuite des noms à la libération par vengeance... Il n'a pas honte non plus de parler du sexe, du rapport quasiment maladif que les gens de sa famille pouvaient avoir avec lui. Et tout ça sans sombrer dans le mélodrame. Le film est certes mélancolique, on sent une certaine langueur, mais il n'est jamais désespéré, il n'est jamais lourd. Ce qui est raconté ici, c'est juste la vie, avec ses hauts, ses bas, ses moments bien : l'amour, ses moments moins bien : l'absence d'amour.
Et en disant tout ça, il fait surtout le parallèle entre sa famille et le cinéma qui se développe petit à petit, et notamment le cinéma amateur. Il y a toujours quelque chose de touchant à voir des vieilles images qui sortent un peu d'on ne sait où, dont on devine le contexte de tournage et qui sont plus ou moins intimes. Ces filles qui se déshabillaient devant la caméra déjà il y a cent ans... les filles qui rougissent quand on les filme... ces enfants qui jouent... C'est vrai, ça a quelque chose d'universel. Ces visages ont quelque chose de touchant et Bonzel arrive, en faisant de leur histoire la sienne, à ne jamais rendre ça voyeur.
En tous cas j'aime beaucoup le côté aigre-doux qui se dégage du film.