Avec Que le diable nous emporte, Jean-Claude Brisseau aborde l'un de ses thèmes de prédilection, la sexualité. Le cinéaste déclare rechercher la beauté et sublimer les corps qu'il filme. Il souhaite également "aller un peu plus loin que dans mes films précédents. J’avais deux objectifs: d’abord renvoyer à la réalité et montrer les effets traumatisants de certains excès à travers le personnage interprété par Fabienne Babe, en utilisant le sexe comme élément dramatique. Ensuite je voulais exprimer davantage de compassion pour mes personnages féminins."
Jean-Claude Brisseau s'est inspiré de plusieurs témoignages pour écrire Que le diable nous emporte, dont celui d'une jeune femme qui lui a confié envoyer des images intimes à ses petits amis par portable : "J’ignorais que ces pratiques existaient. Je me suis dit que cela devait modifier la vie des gens. Je pense que s’il y avait eu des ordinateurs du temps de ma jeunesse je serais moins allé au cinéma. Ces petites machines miniaturisées se sont immiscées dans notre vie privée et ouvrent de nombreuses perspectives."
Jean-Claude Brisseau explique l'origine du titre, qui provient d'une citation de Pouchkine : "Nous ne savons pas où nous allons, alors laissons le diable nous emporter. C’est ce que raconte le film. Il met en scène des gens un peu paumés, qui n’ont plus de guide. Les guides sont en train de disparaître. (...) Avant nous lisions les journaux. Maintenant les gens se fient à des avis sur internet. C’est souvent n’importe quoi, ce qui personnellement me choque. Il n’y a plus de guides de l’opinion réellement sérieux."
Le réalisateur souhaitait s'essayer à un travail de stylisation en utilisant la 3D et le mélange des images : "J’ai eu beaucoup de satisfaction en faisant pour la première fois l’expérience de la 3D dans un court métrage, Des jeunes femmes disparaissent, en 2014. J’y utilisais le relief pour créer de la peur, en dramatisant du vide. Avec la 3D la notion de cadre est modifiée, c’est comme si vous pénétriez dans la vie réelle, alors que le cadre du cinéma vous renvoie quand même à un spectacle. J’aurai aimé aller plus loin avec le relief."
Fabienne Babe collabore à nouveau avec Jean-Claude Brisseau 30 ans après De Bruit et de fureur.
Depuis A l'aventure en 2007, Jean-Claude Brisseau a la particularité de tourner ses films dans son domicile en équipe réduite. L'actrice Fabienne Babe témoigne : "J’étais préoccupée à l’idée de tourner chez lui car il venait de le faire avec La Fille de nulle part. J’avais peur qu’on reconnaisse un peu trop son appartement et je lui ai demandé de faire quelques aménagements, de changer les rideaux ! (rires). On sent qu’on est chez lui. (…) Il va à l’essentiel, il tourne vite, fait très peu de prises. Il n’est pas du genre à faire beaucoup de commentaires sur le plateau. Il est très concentré, avec son côté bourru et ses angoisses."