Après American Sniper, dans lequel le soldat tireur d’élite Chris Kyle se démenait en Irak au péril de sa vie... et de sa vie de famille, puis Sully où Tom Hanks incarnait Chesley Sullenberger réussissant à sauver tous les passagers de son avion aux réacteurs endommagés par des oiseaux migrateurs, Clint Eastwood remet le couvert avec d’autres gloires du quotidien issues des Etats-Unis avec Le 15:17 pour Paris.
"Ça n’a pas été un choix conscient de ma part que de raconter des récits héroïques ou de faire des films sur les héros du quotidien. Je me consacre aux histoires qui se présentent et m’intéressent. Certains exploits sont non seulement exceptionnels mais aussi bénéfiques pour la société, et c’est bien de pouvoir raconter ce genre d’histoires", confie le metteur en scène.
Le 15:17 pour Paris est l'adaptation du livre écrit par Anthony Sadler, Alek Skarlatos, Spencer Stone et l'auteur Jeffrey E. Stern. Le titre de l'ouvrage est The 15:17 to Paris: The True Story of a Terrorist, a Train, and Three American Heroes.
Le film de Clint Eastwood relate l'attaque terroriste du 21 août 2015 perpétrée par le djihadiste marocain Ayoub El Khazzani dans un train Thalys reliant Bruxelles à Paris. Sur le point de commettre son attentat, l'islamiste a été stoppé par trois américains présents dans le train, Spencer Stone, Alek Skarlatos et Anthony Sadler. Plus précisément, l'attentat s'est déroulé dans le train venant d'Amsterdam et voyageant entre Bruxelles et Paris. À l'intérieur, Ayoub El Khazzani est sorti d’une cabine de toilettes, armes à feu au poing et portant suffisamment de munitions pour assassiner 500 personnes. Il est désarmé et neutralisé par les trois touristes américains, qui ont su garder leur sang-froid et réagir à propos.
Spencer Stone, Alek Skarlatos et Anthony Sadler, les héros du Thalys, jouent leurs propres rôles dans Le 15:17 pour Paris. De l'enfance à la vie adulte, Clint Eastwood nous décrit les personnalités des trois touristes américains qui ont effectivement réussi à mettre le terroriste hors d’état de nuire le 21 août 2015. Dans la lutte, seul Spencer Stone a été coupé au cutter à la main et au cou. Avant eux, deux autres passagers du train avaient tenté de désarmer le terroriste. L’un d’eux, Mark Moogalian, s’est même fait tirer dessus au pistolet après avoir arraché le fusil d’assaut des mains du tireur.
Ils ont été décorés tous les trois de la Légion d’Honneur par le Président de la République François Hollande. Spencer Stone pratique les arts martiaux et fait partie de l'US Air Force tandis qu’Alek Skarlatos est membre de la Garde Nationale de l’Oregon.
Clint Eastwood a posé ses caméras en France, à Paris et Arras, pour tourner Le 15:17 pour Paris. C'est dans la gare d'Arras que le Thalys s'était arrêté en urgence afin de permettre l'arrestation par la police du terroriste Ayoub El-Khazzani.
Clint Eastwood est réputé pour sa capacité à réaliser des films aux budgets limités, tout en sachant mettre tous ses collaborateurs à l'aise sur le plateau, ce qui s’est avéré un environnement idéal pour les trois acteurs en herbe, Alek Skarlatos, Spencer Stone et Anthony Sadler. "Je pense que le plus difficile pour un acteur, c’est de jouer son propre rôle", explique Eastwood. "Il est plus facile de se dissimuler derrière un personnage que de se dévoiler aux yeux de tous. Mais plus je passais du temps avec ces gars, plus je comprenais qu’ils étaient la colonne vertébrale de cette histoire. J’ai senti qu’ils pouvaient y parvenir et faire comprendre aux spectateurs ce qu’ils avaient ressenti mieux que quiconque. J’ai déjà fait appel à des non-professionnels pour des petits rôles mais pas pour camper leur propre rôle ou revivre des événements de leur parcours.
Mais pour ce film, alors qu’on reconstituait tout le passage dans le train, pour comprendre l’enchaînement des 8 événements et déterminer la meilleure façon de les filmer, ils se sont peu à peu transformés en acteurs interprétant leur propre rôle. Ils nous montraient comment ces événements s’étaient déroulés, pour que l’on soit aussi précis que possible, et pour que je puisse filmer comme si j’avais été témoin de l’histoire. C’était une opportunité presque irréelle de réunir les vrais témoins de cet événement pour ce film, et de leur donner la possibilité d’y participer. Je voulais qu’ils soient eux-mêmes, rien d’autre, et j’ai senti qu’ils en étaient capables". "Comme nous sommes amis depuis très longtemps, il y a une alchimie naturelle entre nous, si bien que ça nous a paru faisable", raconte Skarlatos.
Dans un souci d'authencité, la production du film et Thalys ont commandé 11 sillons à la SNCF pour un montant de 60 000€ pour les besoins du tournage. Les sillons sont mis en location par la SNCF pour permettre à un client de faire circuler un train d’un point à un autre du réseau à un moment donné sans perturbations.
Présent à bord du Thalys le jour de l'attentat, le comédien Jean-Hugues Anglade a accepté de nous faire part de sa réaction au sujet du tournage du film auquel il ne participe pas :
"Je ne comprends pas les raisons véritables qui poussent Clint Eastwood à faire ce film si ce n'est celle de faire l'éloge de l'héroïsme de ces américains, dont Spencer Stone avec lequel je suis resté en contact depuis l'attentat raté du Thalys. Je ne vois pas d'autre raison de faire ce film. Cela ne sera jamais montré du point de vue d'un père de famille qui a pensé l'espace de quinze minutes qu'il allait mourir avec sa femme et ses deux garçons, coincés au fond d'un compartiment.
Si c'est donc un film qui s'intéresse uniquement à l'héroïsme, cela sera très certainement un film formidablement raconté, et c'est mérité car on nous a vraiment sauvé la vie. Mais si c'est pour exacerber le nationalisme américain, je suis beaucoup moins d'accord. Car avant d'être sauvés par les américains, d'autres hommes courageux sont intervenus, et peu importe qu'ils soient anglais, allemands, belges."
En montrant ces jeunes quand ils étaient enfants, chez eux, mais aussi en train de jouer dans les bois à proximité de leurs maisons, le film fait aussi allusion à ce qui a pu attirer Spencer Stone et Alek Skarlatos dans l’armée. Ce dernier poursuit : "On avait un très bon professeur d’histoire au collège dont l’enthousiasme était communicatif, et c’est parti de là. Tout au long du lycée, l’histoire, et notamment l’histoire militaire, était notre matière préférée". Bien après le lycée, cette passion les suivra tout au long des exercices de simulation tactique et des entrainements au combat qui joueront un rôle primordial dans leur capacité à agir lors de l'attentat à bord du train. Les connaissances de Skarlatos en matière d'armes à feu et dispositifs de sécurité, ainsi que la formation médicale et en jiu-jitsu de Stone leur étaient devenues naturelles, et ont déterminé l’issue de cette journée fatidique du 21 août 2015.
Le comédien Patrick Braoudé a été choisi par Clint Eastwood pour incarner l'ex-Président de la République François Hollande dans Le 15:17 pour Paris. Braoudé avait déjà incarné François Hollande dans le téléfilm La Dernière campagne, fiction qui voyait un Jacques Chirac malade et vieillissant (Bernard Le Coq) s'inviter dans la campagne présidentielle entre Hollande et Sarkozy (Thierry Frémont).
S'il a su reconstituer le cadre où se sont déroulés les événements avec une précision extrême, Clint Eastwood a également rassuré les trois garçons sur leur travail d'acteur en instaurant un climat détendu sur le plateau. Connu pour la douceur avec laquelle il démarre le tournage d'une scène, le réalisateur enclenchait souvent les caméras alors que les acteurs en herbe étaient sur le plateau, au beau milieu d’une conversation. Il raconte : "On commençait à filmer, et on leur disait juste de poursuivre tranquillement leur conversation, sans les interrompre dans ce qu'ils faisaient, et d'enchaîner. Une bonne partie du film s’est faite sur des improvisations, mais comme ils improvisaient en jouant leurs propres rôles, ils n’avaient aucune pression."
Spencer Stone, Alek Skarlatos et Anthony Sadler, les héros du Thalys, ont été décorés tous les trois de la Légion d’Honneur par le Président de la République François Hollande. Bien que les archives de la cérémonie aient été utilisées dans le film, la caméra n’avait filmé que sous quelques angles : la scène a donc été reconstituée pour les besoins du film au Palais de l’Élysée, et les différentes séquences ont été montées avec fluidité par Blu Murray.
Ray Corasani interprète le terroriste, Ayoub, qui a tenté de tirer sur Stone sans que la gâchette de l’arme ne se déclenche… par chance ou grâce à une intervention divine. Le djihadiste a tout de même réussi à poignarder Spencer Stone dans le cou et lui a profondément entaillé le pouce, avant que ce dernier et ses amis, Skarlatos et Sadler, ne le mettent à terre.
Les trois amis pensent encore qu’ils doivent davantage leur survie à leur chance qu’à leur héroïsme. "Quand j’y repense", explique Stone, "on a eu l'occasion d'agir… et on l’a saisie. J’ai jeté un oeil dans le couloir et j’ai vu que Ayoub était là, et que la plupart des gens à côté de lui étaient en état de choc. Heureusement, nous avons tous les trois pu réagir à temps. Et je crois qu’on avait vraiment une bonne étoile au-dessus de la tête".
Si le tournage du 15H17 pour Paris a emmené l’équipe et les acteurs dans plusieurs régions d’Italie et de France, il a débuté par quelques semaines sur le sol américain. C’est en Californie, à Santa Clarita, au nord de Los Angeles, que les scènes dans le désert afghan, où Skarlatos a été mobilisé quelque temps, ont été filmées, avant que l'équipe ne s'établisse dans la région d’Atlanta, en Géorgie, pour plusieurs scènes dans la maison des Stone.
Plusieurs séquences ont été tournées à la périphérie de la ville, notamment celles qui se déroulaient à l’aéroport de l’Oregon ; à l’aéroport international d’Atlanta ; sur la base aérienne de Lackland et la base militaire de Fort Sam Houston (pour laquelle la base aérienne Robins a servi de doublure) ; dans la maison des Stone, avec leur aire de jeux en bois ; dans la chambre que Sadler occupe à l’université ; dans les collèges et lycées des garçons, ainsi que dans les salles de classe, d’entraînement et de jeux ; dans une chambre d’hôtel à Sacramento, ainsi que dans une boîte de nuit et un pub d'Amsterdam.
C’est après que le tournage en dehors des États-Unis a commencé, en s'attachant aux pas de Stone et Sadler. "On a simplement emprunté le même chemin qu’eux", explique Clint Eastwood. "On est allés sur place pour faire le voyage comme ils l’avaient fait, et on a pu acheminer une équipe vraiment efficace, où tout le monde était sur la même longueur d’ondes".
Tourner à bord d'un train s’est avéré un défi de taille pour le chef-opérateur Tom Stern et son équipe, en raison de la durée limitée du voyage, et surtout, l’étroitesse des couloirs. Mais Stern avait de l’expérience, puisqu’il avait tourné Sully dans l’espace tout aussi réduit d’un avion.
"L’équipe du Thalys a été extraordinaire : ils nous ont vraiment aidé à gérer toute la logistique nécessaire au tournage d’un film dans un train lancé à 300km/h", remarque Stern.